Le 2 avril 2020
Entre quête de soi et découverte culturelle, on se laisse gentiment emporter par cette fable africaine dépaysante, même si débordante de bons sentiments.
- Réalisateur : Philippe Godeau
- Acteurs : Omar Sy, Lionel Louis Basse, Fatoumata Diawara, Germaine Acogny
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Français
- Distributeur : Pathé Distribution
- Date télé : 22 avril 2024 21:10
- Chaîne : France 3
- Date de sortie : 23 janvier 2019
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Résumé : Depuis son village au nord du Sénégal, Yao est un jeune garçon de 13 ans prêt à tout pour rencontrer son héros : Seydou Tall, un célèbre acteur français. Invité à Dakar pour promouvoir son nouveau livre, ce dernier se rend dans son pays d’origine pour la première fois. Pour réaliser son rêve, le jeune Yao organise sa fugue et brave 387 kilomètres en solitaire jusqu’à la capitale. Touché par cet enfant, l’acteur décide de fuir ses obligations et de le raccompagner chez lui. Mais sur les routes poussiéreuses et incertaines du Sénégal, Seydou comprend qu’en roulant vers le village de l’enfant, il roule aussi vers ses racines.
Notre avis : Ses précédents long-métrages nous l’ont déjà démontré (Le dernier pour la route racontait le combat contre la dépendance à l’alcool d’un grand patron de presse, suivi quatre ans plus tard de 11.6 très directement inspiré de l’histoire du convoyeur de fonds Toni Muslim) : Philippe Godeau situe invariablement ses récits entre réalité et fiction, son but étant, à travers le cinéma, d’espérer faire découvrir des univers ou des coutumes mal connus et de les rendre plus proches. Ayant souvent rendu visite à son père qui travaillait au Mali alors qu’il n’était qu’un enfant, il a côtoyé très tôt une culture et un quotidien bien éloignés de sa vie de jeune occidental. Inspiré par cette différence, il souhaite aujourd’hui nous faire partager ces valeurs qui l’ont touché et parlent du sens de la famille, du partage, de l’accueil et de la foi à travers ce road movie exotique ; loin de l’image touristique du Sénégal, il nous présente sans afféterie les paysages et la réalité du continent africain, de Dakar à Kanel, petit village du Nord dont est originaire le jeune héros du film, en passant par Saint-Louis ou Thiés.
- Crédit photo : Nouma Bordj
Le réalisateur/scénariste/producteur délaisse alors François Cluzet, son acteur fétiche pour se tourner vers le plus célèbre représentant de la diversité culturelle française. Car qui mieux qu’Omar Sy pouvait se glisser dans la peau de ce « bounty » (surnom que lui octroie le jeune Yao), noir à l’extérieur et blanc à l’intérieur qui ne manque pas de soulever la difficulté d’identité de ceux qui, nés en France sont considérés comme Français dès qu’ils retournent dans leur pays d’origine mais sont qualifiés d’étrangers au moment de regagner leur pays d’accueil ? Derrière Seydou, cet acteur à succès, fils d’immigrés africains, venus faire la promotion d’un ouvrage relatant sa jeunesse dans une cité des Yvelines, il est difficile de ne pas imaginer l’ombre d’Omar Sy. Pourtant, peu d’éléments nous sont livrés sur la vie de cette gloire du cinéma français, si ce n’est que cet homme vit confortablement, qu’il est bousculé par le temps, qu’il n’est pas vraiment heureux malgré ce que son statut pourrait laisser supposer et surtout qu’il vient de se séparer de sa femme et qu’alors qu’il avait projeté de faire découvrir le pays de ses ancêtres à son fils, il fera le voyage seul. Si d’un point de vue européen, il a tout du conquérant, son arrivée dans une Afrique dont il n’appréhende guère les us et coutumes le contraint à une humilité et un dépouillement qui paradoxalement lui laisseront le temps d’enfin remplir son rôle de père par enfant interposé.
- Crédit photo : Nouma Bordj
Après ses récentes interprétations de Knock et Le flic de Belleville dont ne ressortaient que cabotinage et outrance, Omar Sy retrouve une saine sobriété faite d’émotion contenue et de pudeur qui sied tout juste à Seydou tout à l’écoute de ce jeune guide qu’est Yao, sans qui il lui serait impossible de partir à la reconquête de ses racines. Il partage assurément la vedette avec Lionel Louis Basse, un gamin lumineux, image d’un Sénégal espiègle mais néanmoins avide de culture, tout en ne rechignant pas à la resquille avec la complicité bon enfant de sa voisine de transport en commun. La rencontre de ces deux personnalités qui se nourrissent l’une de l’autre constitue la base d’une réelle sincérité qui ne se démentira jamais tout au long du récit.
- Copyright Mouna Bordj
Existant par et pour celui qui en 2016 fut désigné personnalité préférée des Français, le film se doit de nous servir tout ce qui a fait sa marque de fabrique : son sourire éclatant, son corps toujours en mouvement, quelques vannes bien placées, ici enrobées dans une ambiance dégoulinante de bons sentiments. Pour arriver à caser tout ça, il convient d’étirer le scénario et de multiplier des situations plus ou moins cocasses, parfois jusqu’à l’inutile. Et puis, au moment où la lassitude commence à pointer, le voyage retrouve ses couleurs grâce à l’arrivée de Gloria (Fatoumata Diawara), chanteuse libre et lucide, symbole d’une Afrique en route vers la modernité pour s’achever sur une note de spiritualité particulièrement émouvante.
Dédié à Jacques Godeau et à Demba Sy, Yao peut se prévaloir de rendre un hommage appuyé à la paternité, la transmission et la richesse de la différence.
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