Le 11 décembre 2015
Sur une trame réaliste, Sandrine Veysset construit un premier film beau et poignant.
- Réalisateur : Sandrine Veysset
- Acteurs : Daniel Duval, Dominique Reymond
- Genre : Drame, Film de Noël
- Nationalité : Français
- Distributeur : Pyramide Distribution
- Editeur vidéo : Carlotta Films
- Durée : 1h31mn
- Date de sortie : 25 décembre 1996
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Résumé : Dans une modeste ferme du sud de la France, une femme élève seule ses sept enfants. Pleine de courage, elle s’attache à ce que ces derniers ne manquent de rien, travaillant dur chaque jour sur l’exploitation du père des enfants, un homme brutal et autoritaire qui a délaissé cette partie bâtarde de sa progéniture afin de vivre avec sa famille officielle. Par son amour, son attention de tous les instants, la mère réussit à préserver des abus paternels, l’univers de ses enfants.
Critique : On redoute toujours un peu de revoir, longtemps après, un film qu’on a aimé, beaucoup aimé ; la peur de la déception joue un rôle dans la manière dont on l’appréhende, dont on perçoit ce qu’on appelle à tort le vieillissement du film, qui est en fait le nôtre. Aussi est-on soulagé, en revoyant Y aura t’il de la neige à Noël ?, de retrouver la même grâce, la même fraîcheur d’un ton singulier. Pourtant a priori le scénario n’est guère engageant : une mère courage et ses sept enfants, un père volage et sévère, les travaux des champs, autant de motifs qui, déjà en 1996, n’annonçaient en rien le succès relativement surprenant (836 717 entrées).
C’est qu’il y a un miracle d’équilibre et de justesse dans le film : la première heure, avec ses instants comme volés à la réalité, décrit par petites touches une vie rugueuse, laborieuse, mais dont les séquences alternent les tonalités. Le quotidien, même difficile, est illuminé par le soleil et l’esprit de famille qui, en excluant le père, soude les enfants et leur mère. La caméra portée, les travellings, soulignent une énergie dépensée à produire des légumes et, malgré quelques accrocs, on est plutôt sur le registre d’un réalisme exempt de pathos et de misérabilisme. Ce qui étonne dans cette première partie, c’est de ne pas décrocher un instant de ce spectacle minimal, sans musique, sans afféteries. Le naturel des comédiens y est pour beaucoup, tous travaillant avec des gestes sûrs et machinaux, débitant leurs dialogues comme s’ils les inventaient. Mais déjà Sandrine Veysset dépasse le strict réalisme pour des envolées discrètes : les trois enfants sous la bâche, en contre-plongée et léger ralenti, les ombres portées avant le feu d’artifice ; quelque chose coince, résiste.
La seconde partie est le basculement, à partir d’un artifice étonnant, la fermeture à l’iris. Étonnant parce que détonnant, mais aussi par la rareté du procédé depuis le muet, ce qui livre une autre piste, celle du cauchemar (la mère racontera le rêve aux sept enfants), de la réalité qui dérape. Il faut voir avec quelle finesse, par des jeux de regards et des silences, la réalisatrice suggère la possibilité d’inceste. Et, comme dans un récit mythique, c’est le monde entier qui devient froid : la maison glaciale, les couleurs, le rapport au père. On est dans un conte, sauvage et cruel comme le sont les contes, avec l’ogre et les sept innocents. C’est aussi le moment où la caméra se fixe en une glaciation hivernale, où les cadrages laissent les personnages sur le côté, définis par un manque : voir, entre cent exemples, ce magnifique plan d’un garçon assis par terre, à droite de l’écran, dans un écrin de feuilles mortes ; voir aussi ces plans vides d’une nature désolée.
En toute logique, la mère se trouve dans une impasse qui se résoudra en partie, et de belle manière, le jour de Noël. Mais là encore, nulle facilité : pas de happy end improbable, ni de miracle inattendu ; tout en collant au réel, la cinéaste construit une fin ambiguë et poignante qui, somme toute, est affaire de regard, donc de cinéma.
Les suppléments :
Outre l’inévitable bande-annonce, le Blu-ray contient deux bonus : Tout en liberté (31 minutes) est un entretien très intéressant avec la réalisatrice et la chef-opératrice, Hélène Louvart, qui reviennent sur la genèse, le tournage et ses aléas comme sur l’esthétique du film. Dans Terre-mère-amour (15 minutes), c’est la comédienne principale, Dominique Reymond, qui retrace son parcours, ce premier film, et parle de Daniel Duval d’une manière touchante mais sans excès laudateur.
L’image :
Les propos d’ Hélène Louvart dans les suppléments concernant ses choix esthétiques sont magistralement prouvés par la copie proposée : le grain du Super-16, le travail sur les couleurs, tout y est, propre et net.
Le son :
La piste DTS-HD 5.1 rend justice au mixage qui joue sur l’audible, l’importance du bruitage dans ce film où la musique est quasiment absente. L’impureté même a son importance, dans le rendu d’une atmosphère plutôt que d’une précision chirurgicale. L’audiodescription et des sous-titres sont également disponibles.
– Sortie Blu-ray : 2 décembre 2015
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