Blame Canada !
Le 20 octobre 2009
La voix de Guy Maddin s’engouffre dans sa propre vie et son univers personnel pour livrer une vision hallucinée de sa ville natale. Un voyage poétique et esthétique entre fantasme et réalité.
- Réalisateur : Guy Maddin
- Acteurs : Ann Savage, Louis Negin, Darcy Fehr
- Genre : Drame, Documentaire, Expérimental
- Nationalité : Canadien
- Date de sortie : 21 octobre 2009
- Plus d'informations : Le site du distributeur
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– Durée : 1h19mn
– Titre original : My Winnipeg
La voix de Guy Maddin s’engouffre dans sa propre vie et son univers personnel pour livrer une vision hallucinée de sa ville natale. Un voyage poétique et esthétique entre fantasme et réalité.
L’argument : Winnipeg mon amour est un hommage doux-amer à la ville natale de Guy Maddin
au Canada.
Ville des superlatifs, selon le réalisateur : la plus froide au monde, le plus petit parc
du monde, la ville des somnambules, des magnétiseurs et des séances de spiritisme,
une ville somnolente, habitée par les esprits.
C’est ainsi que la décrit à la première personne le narrateur, en la regardant défiler
derrière la fenêtre d’un train. Plongeant son regard dans le paysage délavé, il repense
à son enfance, à l’histoire et à la topographie de sa ville.
Notre avis : Attention : œuvre à caractère fortement personnel. Guy Maddin est l’un de ces cinéastes dont l’univers intérieur s’impose avec tant de force qu’il contamine tout ce qui passe sur l’écran. Winnipeg mon amour fait d’autant moins exception qu’il s’agit d’une expérience mi-documentaire, mi-psychanalytique sur sa ville natale, qu’il tente de ramener à la vie et d’exorciser dans un geste compulsif et contradictoire. C’est une schizophrénie filmique où tout se dédouble et se met à vivre d’une manière inattendue : les reconstitutions hallucinatoires de la mémoire doublent au pas de course les images d’archives, la silhouette - fausse - du réalisateur se laisser absorber par sa voix - véritable - à la diction fascinante, et les épisodes familiaux traumatiques sont répétés et joués par une troupe d’acteurs dont on ne sait plus très bien où s’arrête leur rôle et où commence l’improvisation forcenée. Chez Maddin, le mouvement semble contraire et irrépressible à la fois : pour saisir au mieux les instants condensés de vie qui forment la personnalité d’un individu à travers son environnement social, l’idéal est de s’immerger au plus profond dans les délires que suggère l’imaginaire, sans jamais perdre contact avec le monde « tel qu’il est ». Car Winnipeg mon amour se garde (de justesse) d’être un film égocentrique ; ce sont précisément cette acuité et cette sensibilité vis-à-vis des détails fourmillants - d’une trivialité pourtant sidérante : équipes de sport locales, grands magasins et renversements de fortune divers - qui, par agglomération, créent la dynamique d’une ville, et donnent au film le ton d’une ode plus que d’une confession.
Réflexion sur la mémoire, l’enfance, le désir, la « madeleine » maddinienne déploie ses saveurs lentement, au rythme du train qui, dans le film, parcourt Winnipeg comme s’il s’agissait pour l’intellect et les sens d’une attraction devenue réalité. Sur la vitre de son wagon, le « faux » Maddin assiste ensommeillé à ce que son Maître véritable a recueilli et projeté d’images poétiques, que celles-ci relèvent de l’archive ou de la reconstitution loufoque. L’utilisation des cartons et des intertitres renvoie au temps du muet, mais contribue surtout à irradier le film de paroles, faisant déborder l’écran de fragments de sens qu’il revient au spectateur de déchiffrer. Comme chez Lynch, se met au jour un goût prononcé du spectacle dans le spectacle, où le voile discriminant entre rêve, fantasme et monde matériel s’évanouit progressivement. La séquence de « spiritisme » est à cet égard l’une des réussites lyriques du film, où la caméra se met au service d’un véritable ballet qui n’est pas sans rappeler la fascination des avant-gardes du début du XXème siècle pour le « cinéma pur » s’incarnant dans les notions de mouvement et de lumière. Winnipeg mon amour marque donc une étape dans la carrière du cinéaste, un approfondissement des thèmes et des formes qui enthousiasmera ceux qui ont choisi de s’embarquer sur le même train... ou laissera indifférents ceux restés à quai.
- © E.D. Distribution
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