Vider la corbeille - La chronique BD

Stanislas vient de commencer un stage au sein de la société La Bucha. Cette dernière conçoit des décorations très kitsch pour les cheminées, composées de petites scènes thématiques animées par des personnages et éclairées par des guirlandes électriques. Chaque matin, Stan assure donc la distribution du courrier dans tous les services. Il rencontre ainsi la douce Sophie, sérieuse assistante marketing, pour qui il en pince très vite. Mademoiselle Ridard, la cerbère frustrée, au service de la direction. Carrière et Da Rocha, les Dupont du montage minute, ou Le Guellec le dépressif. Pichon le fumiste. Ou encore Alain Jadiau, le PDG étourdi, qui a plus de 1500 messages en attente, parce qu’il ignore tout d’Internet. Avec ses compétences informatiques, Stanislas va vite devenir son protégé.

Vider la corbeille est un livre élégant. Gnaedig et Thirault parviennent à dépeindre avec finesse des caractères délicats et des relations complexes. Le trait accompagne les joies ou les rancœurs en optant pour la simplicité. Une collection de visages et d’émotions s’offre alors à nous. Le côté désabusé de Stanislas, la rudesse de Ridard ou la mélancolie de Sophie, fonctionnent grâce à trois coups de crayons judicieux. C’est donc un monde à part qui nous est présenté. Celui de l’entreprise, sa hiérarchie, ses corps de métier, mais aussi ses mesquineries, ses confidences ou ses amitiés. Le ton est drôle. Le fond est dur. Hésitant entre tendresse et cynisme, jouant avec le pathétique ou l’attachant jusqu’au coup de théâtre final, voilà une des plus belles galeries de portraits que l’on ait rencontrée ces derniers temps.

On pourra aussi s’amuser à dénicher les divers clins d’œil des auteurs, comme ces employés de La Bucha aux noms de joueurs de foot. Mais il ne faudra surtout pas manquer l’hilarant catalogue de l’entreprise proposé en annexe, avec par exemple son exceptionnelle décoration "Siècle des Lumières" et ses figurines de Diderot, d’Alembert, Rousseau ou Alexandre Jardin.