Le 8 novembre 2022
Un premier long métrage attachant sur l’univers des drag-queens, à travers l’évocation subtile d’un amour improbable.
- Réalisateur : Florent Gouëlou
- Acteurs : Hafsia Herzi, Pablo Pauly, Romain Eck, Harald Marlot, Mathias Jamain Houngnikpo, Holy Fatma, Calypso Baquey, Jean-Marie Gouëlou
- Genre : Comédie, Romance, LGBTQIA+
- Nationalité : Français
- Distributeur : Pyramide Distribution
- Durée : 1h43mn
- Date de sortie : 9 novembre 2022
- Festival : Festival de Venise 2022
Résumé : Baptiste, vingt-neuf ans, est en couple avec Samia, quand il fait la rencontre de Cookie Kunty, une jeune drag-queen de la nuit parisienne. Poussé par l’idée d’un projet photo avec elle, il s’immerge dans un univers dont il découvre tout, jusqu’à entamer une relation avec Quentin, le jeune homme derrière la drag-queen.
Critique : Coécrit avec Raphaëlle Valbrune-Desplechin, Trois nuits par semaine est le premier long métrage de Florent Gouëlou, formé à la Fémis. Pourtant, il est dans la continuité thématique de ses courts métrages qui, tels Un homme, mon fils (2017) et Beauty Boys (2019), avaient abordé, implicitement puis explicitement, le thème des drag-queens. Construit avec un long flash-back, le récit aborde l’amour, a priori improbable, de Baptiste, jeune photographe et manager de la FNAC (Pablo Pauly), pour Cookie Kunty, une drag-queen rencontrée à l’occasion d’une animation organisée près d’un centre de dépistage. Volonté de chercher une nouvelle expérience avec un corps n’ayant de féminin que l’apparence, ou attirance réelle pour le garçon qui se prête au travestissement ? L’ambiguïté des sentiments de Baptiste, qui sera vite levée, est d’abord d’autant plus trouble qu’il vit avec une femme (la toujours lumineuse Hafsia Herzi), leur couple subissant toutefois une zone de turbulence. L’on est séduit par cette histoire d’une touchante subtilité, qui évite les écueils dans lesquels un tel sujet aurait pu tomber, à savoir la grivoiserie, le pathos ou l’exotisme.
- 2022 © Yukunkun Productions. Tous droits réservés.
Florent Gouëlou trouve le ton juste pour favoriser l’identification à son protagoniste, et l’originalité du triangle amoureux qui se forme sous nos yeux est d’être celui auquel on ne s’attend pas, puisque Cookie est également l’objet de toutes les attentions de Quentin, qui se cache sous cet apparat de spectacle mais aussi de vie réelle. Il faut préciser que le film est largement nourri de l’expérience personnelle du réalisateur, lui-même drag-queen sous le nom de Javel Habibi (il s’offre d’ailleurs un caméo dans le métrage), et que Cookie Kunty est aussi le nom de scène de Romain Eck, qui l’interprète à l’écran… Cette mise en abyme n’est pas le moindre intérêt de Trois nuits par semaine, qui brille également par la qualité du travail des collaborateurs artistiques. La photo de Vadim Alsayed évite ainsi le naturalisme glauque autant que le clinquant, contribuant à une harmonie picturale : « Intuitivement, les scènes quotidiennes appelaient plus souvent un filmage à l’épaule, au plus près des corps, et les shows autorisaient plus de machinerie ; des mouvements de travellings, des suivi parfois à deux steadycams. Pour autant, on s’est autorisé à ramener de la machinerie dans les intérieurs d’appartements et une caméra très mobile sur scène, pour croiser les grammaires. Ce qui était magique enfin dans le fait de filmer le spectacle, c’est que cela nous permettait de faire apparaître les sources à l’image ; les projecteurs, les poursuites. Avec des bascules lumières visibles qui accompagnaient les performances, ou des couleurs très marquées », a précisé le réalisateur dans le dossier de presse.
- 2022 © Yukunkun Productions. Tous droits réservés.
Bien sûr, le film est nourri de références évidentes (assumées par le cinéaste), comme Talons aiguilles (1991) de Pedro Almodóvar (1991) et Priscilla, folle du désert (1994) de Stephan Elliott, voire Tenue de soirée (1986) de Bertrand Blier ou Nettoyage à sec (1997) d’Anne Fontaine. Mais cela n’enlève rien aux qualités d’une œuvre marquée par l’esprit de famille, de troupe et de communauté. Et en dépit de quelques scènes inutiles dont une séquence d’agression transphobe qui certes correspond à une réalité sociétale, on ne peut que se laisser tenter par cette œuvre séduisante, inclusive sans céder aux lourdeurs du wokisme. Trois nuits par semaine a été présenté en ouverture à la Semaine internationale de la Critique du Festival de Venise 2022, avant d’avoir intégré la sélection des longs métrages pour les Rencontres In&Out de Cannes.
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criss 27 octobre 2022
Trois nuits par semaine - Florent Gouëlou - critique
surprenant et plein de tendresse