Tout va bien - La chronique BD

S’il convient de mentionner que Charlie Genmor, désormais garçon transgenre, a écrit ce récit autobiographique pour raconter ses vingt ans et ses questionnements, il faut aussi dire qu’ignorer la situation personnelle de l’auteur n’empêche en aucun cas de découvrir un personnage aussi torturé qu’attachant, car reflet impeccable de de la fin de l’adolescence et d’un malaise intérieur que beaucoup ont ou vont expérimenter. En effet, la sexualité est, selon un carcan préétabli par une culture cinématographique ou télévisuelle populaire, quelque chose d’assez simpliste, pourvu que l’on tombe sur le bon ou la bonne, tout roule ensuite.

L’histoire d’Ellie prouve que tout n’est pas aussi simple, basique, déterminé. Non pas à cause d’un changement de sexe, qui n’apparaît en vérité pas explicitement dans cet album, mais plutôt à travers des souvenirs en forme de rancœurs, des empêchements en forme d’interdits, des images véhiculées par des stéréotypes sentimentaux... Pas vraiment de leçon à tirer, car toute situation est personnelle, mais plutôt un témoignage émouvant permettant de dire : cela arrive à d’autres.

Charlie Genmor / Delcourt

Le dessin, tout de bleu vêtu, part en plongée intime, comme une introspection des fonds sous-marins de l’être. Jeunesse, pulsions, amitiés et blocages défilent comme des bancs de coraux, et c’est lorsque l’on atteint l’abysse que se dessine le mieux cette histoire. Il fallait que le couple, étonnant de compréhension, se délie pour accéder à ce qui touche vraiment. Il fallait que la famille éclate pour que les liens reviennent en mémoire. La catharsis est ainsi au centre de ce premier album, superbe d’empathie.

Charlie Genmor / Delcourt

Plutôt extraordinaire dans son approche mais faisant appel à sentiments et des situations très ordinaires, Tout va bien veut toucher, comprendre et apprendre. Un roman graphique personnel et courageux, qui fait avancer à grand pas les perceptions.