Le 10 août 2020
Avec une qualité de réalisation remarquée lors de festivals internationaux, Bai Xue nous livre un premier film sur un sujet sensible, mais qui manque cruellement de rythme et de poésie. Un récit initiatique sans surprise.
- Réalisateur : Bai Xue
- Acteurs : Huang Yao, Sunny Sun, Carmen Soup
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters
- Nationalité : Chinois
- Distributeur : 3L Films
- Durée : 1h39min
- Titre original : 过春天
- Date de sortie : 12 août 2020
- Plus d'informations : Site de Makna Presse
Résumé : Deux lycéennes meilleures amies vivant à Hong Kong rêvent de s’offrir un voyage au Japon. Ne pouvant compter sur leurs parents pour financer le voyage, l’une d’entre elle, Peipei, décide de rejoindre un groupe de trafiquants de téléphones portables pour faire la mule entre Hong Kong et la ville où elle vit, Shenzen.
- Copyright 3L Films
Critique : L’idée originale du film a tout pour faire une bonne histoire : la spécificité du régime de Hong Kong sur le territoire chinois, le trafic douanier et une adolescente sans histoires, qui décide de pimenter son quotidien. Malgré tous ces bons ingrédients, on n’échappe pas à l’ennui et l’intrigue ne parvient pas à rythmer le film.
Peipei et sa meilleure amie, Jo, ont un rêve : profiter des sources d’eau chaude au Japon en hiver, sous la neige. Mais le voyage coûte cher et leurs parents ne peuvent pas les aider. La mère de Peipei élève seule sa fille et dépense toutes ses économies dans des parties de Mahjong, tandis que les parents de Jo sont quant à eux absents. Lors d’une fête où cette dernière rencontre son petit ami, Hao, Peipei découvre le goût du risque et va demander à intégrer un trafic d’iPhone. Lycéenne à Hong Kong bien que vivant à Shenzen, elle passe la douane tous les jours. Elle peut ainsi transporter les téléphones portables interdits en Chine et gagner l’argent nécessaire à son voyage.
Tout au long de l’histoire, Peipei, brillamment interprétée par Huang Yao – meilleure actrice pour ce film au Festival International du Film de Pingyao en Chine – évolue dans son costume d’écolière. Queue de cheval, jupe plissée et chemisier blanc, elle s’affiche comme la jeune fille sage, au quotidien lisse et sans surprise. Le récit maintient malheureusement cette platitude dans son parcours initiatique : l’adrénaline de son activité ne transparaît jamais à l’écran, ni ses sentiments, ni son évolution. Nous sommes en attente d’une sensation forte qui ne vient pas, alors que le sujet s’y prête pleinement. Est-ce parce que l’intention de la réalisatrice était de montrer la banalité de ce trafic pour les lycéens ? A l’inverse, le personnage de Jo, sa meilleure amie, incarne l’insouciance adolescente, les obsessions amoureuses et l’enthousiasme des découvertes. Leur relation n’est cependant pas assez développée pour redonner au film l’intensité légitimement attendue.
- Copyright 3L Films
Toutefois, ce premier film s’appuie sur une réalisation tout à fait prometteuse et remarquable. Bai Xue maîtrise les couleurs, acidulées et pastel, lorsqu’elle filme la vie insouciante de la jeune fille, sombres et plus fades pour montrer ses activités illicites. Les plans larges sont très fréquemment utilisés, mais donnent l’impression de dérouler un storyboard, sans que le jeu à l’écran ne donne l’épaisseur nécessaire. Le film manque de rythme, d’alternance, de lenteur permettant d’apporter de la poésie, peut-être même de la nonchalance et de moments de tensions ou de colère, qui auraient pu être davantage exploités. La beauté de certains plans témoigne cependant du regard de la réalisatrice, notamment dans les scènes de nuit ou en rapport avec l’eau. Tout est lisse, presque léché, et cette forme contraste avec le ton du film qui aurait dû monter davantage de noirceur ou d’incandescence.
Quant au titre, The Crossing – le passage en français – il évoque à la fois cette frontière à franchir, mais aussi celle du passage de l’enfance à l’âge adulte, sans que cela ne soit clairement énoncé. Peipei franchit ainsi des paliers, marqués comme dans un jeu vidéo par un arrêt sur image et la musique d’accompagnement, dans sa quête d’identité et la recherche d’elle-même. La quête d’un paysage de neige ne serait-elle pas la métaphore, pour enfin voir la beauté intérieure qui la caractérise ?
La pudeur du film et la banalité des épreuves adolescentes, du premier émoi à l’opposition vis-à-vis des parents, empêchent donc d’apprécier la maîtrise impressionnante de la réalisation. Malgré tout, The Crossing est un premier film dont l’idée originale et intéressante nous conduit à suivre le travail de Bai Xue, dans l’attente d’une véritable révélation.
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Lucien75 16 août 2020
The Crossing - Bai Xue - critique du film
On n’arrive pas à savoir si il faut aller voir ou non ce film... J’ai l’impression que vous n’aimez pas tout simplement.