L’œil du mal
Le 23 juin 2010
Cette œuvre perverse, qui réfléchit sur le mal et sur les dérives du pouvoir, se laisse agréablement regarder malgré un manque d’envergure et un final maladroit.
- Réalisateur : Jennifer Chambers Lynch
- Acteurs : Bill Pullman, Pell James, Julia Ormond, Ryan Simpkins
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters
- Nationalité : Américain
- Date de sortie : 30 juillet 2008
- Plus d'informations : Le site du film
- Festival : Festival de Cannes 2008
– Durée : 1h38mn
Cette œuvre perverse, qui réfléchit sur le mal et sur les dérives du pouvoir, se laisse agréablement regarder malgré un manque d’envergure et un final maladroit.
L’argument : Deux agents du FBI arrivent dans une petite ville perdue pour enquêter sur une série de meurtres. Ils retrouvent sur place trois témoins : un policier à la gâchette facile, une junkie complètement déconnectée et une petite fille de huit ans encore sous le choc.
Au cours des interrogatoires, les agents découvrent rapidement que les témoins donnent chacun une version différente des faits, dissimulant manifestement une partie de la vérité.
Notre avis : Voici enfin le deuxième long-métrage de Jennifer Lynch, fille de l’illustre cinéaste, suite au sulfureux Boxing Helena en 1993, qui avait donné lieu à de nombreuses péripéties, notamment un procès intenté à Kim Basinger pour s’être désengagée du film. Après un retrait cinématographique de 15 ans, et une addiction aux drogues, on retrouve avec un certain plaisir l’univers ténébreux et inquiétant de l’auteur qui n’est pas sans rappeler celui de son père.
La structure de Surveillance s’inspire de Rashômon d’Akira Kurosawa, qui montrait les différents points de vue de ses personnages, chacun d’eux mentant sur le déroulement d’un fait. Cette référence s’arrête là, Lynch livrant une oeuvre très manipulatrice, qui réfléchit sur la perversité du pouvoir et la part de mal qui est en nous. On est loin de l’humanisme du Japonais, la réalisatrice faisant preuve d’une terrible noirceur mais aussi d’une certaine lucidité envers l’Homme. Le thriller décrit des personnages peu sympathiques, ne cherchant qu’à jouir de leurs privilèges ; des personnages très humains en somme, dont les dires sur le drame sont montrés par un ensemble de flash-back. Le seul être pur est l’enfant qui observe ce monde adulte avec toute sa naïveté. L’originalité de Surveillance résulte dans son dispositif : afin de mener l’interrogatoire, l’agent du FBI Hallaway (Bill Pulman), placé devant des moniteurs, contemple, surveille et donne des ordres aux protagonistes placés dans différentes pièces. Il en résulte une métaphore du cinéaste dirigeant ses acteurs, chacun jouant son rôle en essayant de mentir avec talent. Il y a surtout cette idée intéressante de l’autorité suprême jouant avec ses sujets.
Le métrage est composé de séquences d’une grande violence psychologique, notamment celles mettant en scène les deux flics qui utilisent leur pouvoir pour assouvir leurs pulsions. Lynch ne porte aucun jugement moral sur les actes de ses protagonistes, ce qui est assez bienvenue, son discours visant à faire triompher la vérité : l’Homme doit accepter ses zones d’ombres et en jouir. On regrettera tout de même la gratuité de certaines séquences qui n’apportent rien au propos. Cette façon de valoriser si excessivement la jouissance peut également choquer, celle-ci résultant d’une véritable position de domination envers l’autre. Une grande partie du film se regarde avec intérêt, grâce à une tension bien orchestrée et une musique renforçant l’impression d’étrangeté, pourtant, les bonnes idées tombent progressivement à plat, notamment dans un twist final hystérique et mal joué qui fait retomber l’œuvre au niveau d’une série B quelconque. Cette fin se veut logique avec le discours de la cinéaste, mais elle amenée et filmée de telle sorte que le spectateur décroche complètement, Lynch devenant soudainement très explicative dans une histoire qui se voulait faite de faux semblants. Malgré ces défauts, Surveillance reste agréablement pervers et provoquera quelques sensations en cet été de disette cinématographique.
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Norman06 29 avril 2009
Surveillance - la critique
Fraichement accueilli au Festival de Cannes, ce thriller déjanté est captivant de bout en bout, les inconditionnels d’émotions fortes ne devant pas être déçus. Scénario habile et montage hallucinant, pour un récit qui distille une véritable frayeur, sans effets racoleurs. Jennifer Chambers n’est donc pas uniquement "la fille de" : elle signe une série B efficace et originale qui a été le polar de l’été 2008.