Le 19 août 2021
Avec ce roman, Cécile Coulon revisite les codes du gothique, mêle la modernité à ce genre victorien, laissant le suranné contaminer sa plume et le rythme de son récit s’empeser, similaire à ces titres dont le plus connu reste sans doute Dracula.
- Auteur : Cécile Coulon
- Editeur : L’Iconoclaste
- Genre : Roman
- Nationalité : Française
- Date de sortie : 19 août 2021
- Plus d'informations : Le site de l’éditeur
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Résumé : Le domaine Marchère lui apparaîtrait comme un paysage après la brume. Jamais elle n’aurait vu un lieu pareil, jamais elle n’aurait pensé y vivre. " C’est un mariage arrangé comme il en existait tant au XIXe siècle. À dix-huit ans, Aimée se plie au charme froid d’un riche propriétaire du Jura. Mais très vite, elle se heurte à ses silences et découvre avec effroi que sa première épouse est morte peu de temps après les noces. Tout devient menaçant, les murs hantés, les cris d’oiseaux la nuit, l’emprise d’Henria la servante. Jusqu’au jour où apparaît Émeline. Le domaine se transforme alors en un théâtre de non-dits, de désirs et de secrets enchâssés, "car ici les âmes enterrent leurs fautes sous les feuilles et les branches, dans la terre et les ronces, et cela pour des siècles".
Critique : Les romans gothiques et leur imaginaire imprègnent ce roman qui revisite le genre, reprend ses codes pour y ajouter des notes de modernité, une attirance toute féminine dans un décor digne de Dracula.
Aimée, comme toute ces demoiselles en détresse, est une ingénue timide qui n’a jamais quitté la maison familiale, avant de rejoindre le domaine de son époux, Candre Marchère, riche propriétaire jurassien. La Forêt d’Or forme comme un écrin pour la demeure, tantôt paradis de lumière, ambré par l’aube, tantôt prison aux pins noueux, qui rappelle les arbres maléfiques écorchant la peau pâle de Blanche-Neige. La nature a ce sublime si commun dans l’esthétique « fin de siècle », rappelant la petitesse de l’homme face à sa grandeur étouffante, suffocante.
La jeune femme se fait discrète dans cette maison hantée par Henria, la domestique, Angelin, son fils, et les fantômes des disparues – la mère de Candre, puis sa femme, Aleth. Aimée ne parle que peu, se plie aux rituels conjugaux nocturnes et découvre la bienveillance prévenante de celui qui partage son lit. Bientôt, pour l’aider à accepter cette nouvelle vie et amollir sa chair, la détendre, Candre fait venir de Genève une professeure de flûte. En invitant une intruse dans ces bois inquiétants, il pourrait bien tout remettre en question, bouleverser le fragile équilibre entre vérité de façade et non-dits...
Cécile Coulon, en dressant une toile de fond digne des classiques britanniques du XIXème siècle, contraint également sa plume, la dompte pour la faire embrasser des tournures parfois surannées. Loin de desservir Seule en sa demeure, cette désuétude l’illumine de rayons du passé, d’un doré certes un peu terni par l’âge, mais comme embelli par les années. Cette patine se double d’un jeu sonore minutieux, d’une toile soigneusement tissée où assonances et allitérations se relaient pour mieux empoisser et ravir la protagoniste et le lecteur. Ce dernier peine d’ailleurs à se laisser porter, comme retenu par les arbres, muraille protectrice qui ceint le domaine et le tient à l’écart, lui et ce roman déployant un attirail complexe, récit lent et empesé raconté dans une langue différente et parfois presque dépaysante. Puis, le rythme s’accélère, la focalisation perd de sa monotonie et les échos sonores se font plus rares, l’histoire ayant soudain presque pris le pas sur l’ambiance et la poésie – la modernité a gagné.
Cécile Coulon - Seule en sa demeure
L’Iconoclaste
333 pages
13cm x 18cm
19 euros
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