Le 17 juin 2018
Une œuvre curieuse, ni totalement satisfaisante ni insignifiante.
- Réalisateur : Richard Brooks
- Acteurs : Richard Widmark, Karl Malden, Russ Tamblyn, Jerome Courtland, Elaine Stewart
- Genre : Film de guerre
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h41mn
- Box-office : 50 228 entrées France / 30 056 entrées Paris Périphérie
- Titre original : Take the High Ground!
- Date de sortie : 18 août 1954
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Résumé : Un vétéran de la Corée devient sergent instructeur à fort Blith, et entraîne ses fantassins avec beaucoup de rigueur.
Notre avis : Sergent la terreur est une œuvre profondément décevante, voire frustrante : film de guerre sans guerre ou presque, romance avortée, conclusion qui revient au point de départ. Rien ne manque pour que le spectateur ait l’impression d’assister au prélude d’un métrage qui ne viendra jamais. C’est que Brooks et son scénariste évoquent principalement l’entraînement de jeunes hommes en tant de paix. Peut-être ne se battront-ils jamais. Mais leur séjour dans un camp militaire sert surtout à faire d’eux des hommes, selon le beau cliché en vigueur à l’armée, c’est à dire, sous la conduite du sergent Ryan, à vaincre leurs peurs et traumatismes et à se débarrasser des oripeaux encombrants, à l’image de ce chapeau que le Texan finit par balancer.
Figure paternelle exigeante dont on découvre peu à peu les failles, le sergent du titre incarné avec une grande justesse par Richard Widmark est lui-même en conflit permanent, que ce soit avec les autorités, avec son passé ou avec les femmes. Dans une séquence mémorable, il avoue être le fils d’un déserteur et reste prisonnier d’une impossible revanche. L’amour lui est donc interdit et, malgré une magnifique scène de baiser dans l’obscurité, la belle Julie lui restera inaccessible.
L’autre face de ce militaire, celle qui donne son titre français absurde au film, c’est celle d’un homme dangereux, qui expose ses recrues à des expériences cruelles : se confronter au gaz sans masque ou crapahuter sans eau, par exemple. Il n’hésite même pas à se mettre en danger en faisant tirer un homme entre ses jambes écartées. Psychopathe ou instructeur sévère-mais-juste ? Pour Brooks, qui avait connu la guerre, il ne fait pas de doute que la dureté de Ryan n’est que la préparation à des situations bien plus rudes, et qu’au fond, par rapport à l’image traumatisante du début, les épreuves que subissent les jeunes hommes sont un mal nécessaire. On peut sourire de cette vision que d’autres films (on pense à Full metal jacket) ont poussé plus loin. Mais ce qui transpire du film avec évidence, c’est le regard du cinéaste, profondément humain : dans la camaraderie qui le lie au sergent Holt (impeccable Karl Malden) comme dans sa relation avec Julie, Ryan est un pudique maladroit, qui ne se plaît qu’au combat et, même s’il le nie au début, dans la satisfaction de faire de ses recrues de vrais soldats.
Le film est plus caricatural dans sa description des jeunes mal dégrossis ; certes, il déjoue les clichés en faisant du Noir un lettré, mais peine à nuancer des caractères sommaires. Si telle scène (en particulier celle de la désertion) parvient à toucher, les querelles de chambrées et les exercices d’entraînement sont assez lassantes. Restent des portraits de personnes torturées (le seul et beau rôle féminin, pendant de Ryan, et traité sans moralisme) qu’une mise en scène soignée magnifie : ces deux êtres fondamentalement seuls ne se réuniront pas, et la belle séquence de départ dans la gare sonne comme un adieu mélancolique, possiblement désespéré. Pour celle-ci, pour d’autres moments puissants, on garde un bon souvenir de ce film inaccompli, même si Brooks a fait largement mieux par la suite.
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