Ennemis intimes
Le 10 mars 2009
Dans la campagne autrichienne, des personnages désespérés jouent avec leurs désirs, leur instinct et leur destin. Un drame psychologique intéressant et douloureux, mais qui souffre parfois de froideur excessive.
- Réalisateur : Götz Spielmann
- Acteurs : Johannes Krisch, Andreas Lust, Irina Potapenko
- Genre : Drame
- Nationalité : Autrichien
- Date de sortie : 11 mars 2009
- Plus d'informations : Le site officiel du film
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– Durée : 2h01mn
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Dans la campagne autrichienne, des personnages désespérés jouent avec leurs désirs, leur instinct et leur destin. Un drame psychologique intéressant et douloureux, mais qui souffre parfois de froideur excessive.
L’argument : Dans le "quartier rouge" de Vienne, Alex, employé d’un bordel, et Tamara, sa copine ukrainienne et prostituée dans ce même établissement, aimeraient changer de vie, mais il leur faut de l’argent. Alex met au point un plan pour braquer une banque dans un petit village rural. Tamara insiste pour l’accompagner. Alors que les deux amants tentent de prendre la fuite avec le butin, un policier, Robert, tire sur la voiture et tue Tamara. Brisé par le chagrin, Alex abandonne la voiture avec le corps de sa compagne et se cache dans la ferme de son grand-père. Mais la ferme voisine n’est autre que celle de Robert et de sa femme, Susanne. Rongé par la douleur et la haine, Alex prépare sa revanche...
Notre avis : La vengeance est, paraît-il, un plat qui se mange froid. Et c’est la froideur qui domine dans les environnements mornes et solitaires qu’explore Revanche, du vestiaire d’un bordel glauque de Vienne à une grange sombre dans la campagne autrichienne. On s’enfonce dans l’histoire principalement par le biais d’une atmosphère pesante, où les circonstances extérieures - la nuit, la pluie, la grisaille... - semblent se mouler sur les caractères. Le film s’organise autour de quelques espaces limités, pris dans leur simplicité quotidienne, et au sein desquels les personnages paraissent nus, vidés de tout espoir et de tout vécu réel. La charge émotionnelle qui se déploie à partir d’une trame simple reste en effet latente, sournoise, et par là même peut-être un peu trop sous-jacente pour réussir à faire entrer le spectateur dans les réseaux de contradiction et de désarroi qu’elle suppose. Le jeu des acteurs est volontairement austère, comme si l’absence d’intensité dans les regards et les gestes - hormis le rôle principal tenu par Johannes Krisch - devenait paradoxalement une performance. Souvent, les visages ne laissent passer qu’une neutralité certes dérangeante et suggestive, mais qui fait en même temps écran pour la trame psychologique. C’est là le parti pris de Spielmann : concevoir un cinéma qui s’élabore dans le cerveau de celui qui le regarde, en partant de simples traces. Des motifs lancinants, visuels aussi bien que sonores, scandent ainsi le film et lui donnent un tempo particulier : une scie à bois,un banc au bord d’un étang, l’air essoufflé d’un accordéon... Progressivement, ce rythme installe un déroulement plus singulier par rapport à une première partie amenée à développer longuement certains clichés.
Revanche constitue alors un morceau de bravoure trompeur, qui évite soigneusement les affects violents et douloureux que suggère son titre : il y est en fin de compte très peu question d’action humaine et personnelle, et c’est surtout le silence qui y dessine son fil conducteur. Spielmann crée un univers nuancé, qui ne renonce pas à la beauté, mais la place systématiquement dans la nature, par opposition au dégoût que suscitent les relations sociales et la vie en groupe. On peut parfois retrouver les accents d’un malaise présent chez un autre cinéaste autrichien, Michael Haneke : la violence, qu’elle soit montrée ou fantasmée, y travaille toujours en profondeur, et surtout elle s’offre comme un fait sans réelle réponse philosophique ou spirituelle possible. Cette discrétion volontaire sur un possible “message” est finalement porteuse d’une ambiguïté surprenante, qui évite de sombrer dans une morale simplificatrice et laisse toutes les issues ouvertes. Si Revanche manque de densité et présente l’aspect d’un paysage un peu aplani, à l’image des décors qu’il met en scène, le film laisse tout de même un goût d’amertume qui prête au spectateur une matière sérieuse à la réflexion.
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- © Lukas Beck
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