Le diable au corps
Le 28 juillet 2011
Bourgeois et soubrettes se dévorent symboliquement en pleine Espagne contemporaine, dans ce thriller horrifico-érotique mené par un jeune poulain de Guillermo del Toro. Appliqué et relativement maîtrisé, mais sans surprises...
- Réalisateur : Sebastian Cordero
- Acteurs : Martina García, Gustavo Sánchez Parra
- Genre : Drame, Thriller
- Nationalité : Espagnol, Colombien
- Date de sortie : 2 juin 2010
- Plus d'informations : Le site du distributeur
– Durée : 1h35min
Bourgeois et soubrettes se dévorent symboliquement en pleine Espagne contemporaine, dans ce thriller horrifico-érotique mené par un jeune poulain de Guillermo del Toro. Appliqué et relativement maîtrisé, mais sans surprises...
L’argument : Madrid. Rosa et José-Maria, immigrés sud-américains viennent de se rencontrer lorsque ce dernier provoque la mort de son chef de chantier.
Il doit alors se cacher et trouve refuge à l’insu de tous dans la grande maison bourgeoise où Rosa est employée comme domestique.
Rosa malgré elle va devenir le centre de tous les fantasmes.
Notre avis : Maisons hantées, peurs d’enfants, fantasme du maître et de l’esclave : autant de résidus troubles et instinctifs qui traversent l’univers morbide de Rabia. Produit par Guillermo del Toro, le film semble conserver l’empreinte d’un « réalisme fantastique » pesant, particulièrement attentif aux détails d’ambiance qui s’accumulent progressivement pour installer une tension psychologique aux frontières de l’horrifique. Davantage que par les teintes verdâtres plutôt rebattues dans le cinéma de genre de la dernière décennie - à croire qu’il n’y a rien de tel qu’un carrelage de salle de bains pour une atmosphère glauque -, c’est du côté du son que Cordero se démarque, ramenant le spectateur à un état de peur primale, quand le moindre grincement du plancher se transforme en signe menaçant. On n’est pas loin d’une relecture minimaliste d’une autre Rage, celle de David Cronenberg qui, en 1977, s’était lui aussi livré à un exercice de style au bord de la crise de nerfs sur le thème de l’hystérie et des perversions sexuelles. Pas très loin non plus d’une vision pasolinienne des rapports de classe entre bourgeois et (nouveaux) prolétaires, électrisés par le désir et les pulsions de mort. A cet égard, Cordero manque paradoxalement d’audace, puisque tout en jouant clairement sur le filon de la tension érotique entre les personnages qui s’affolent autour du corps de Rosa, il provoque un trouble bien inférieur à celui de Théorème ou de certains films de Buñuel.
- © Haut et Court
A dire vrai, c’est ce manque de radicalité qui fait de Rabia un film certes inquiétant, mais qui peine à trouver un principe directeur véritablement fort. En parsemant le scénario de problématiques sociales, psychologiques et sentimentales, Cordero s’éparpille, plus qu’il ne s’aventure dans la complexité. Le récit s’organise en une série d’épisodes malheureusement plus ou moins prévisibles, et qui se succèdent en faisant stagner l’émotion au niveau d’une angoisse diffuse, qui ne retombe ni ne décolle jamais vraiment. Quant à la fin, que nous n’entendons bien sûr pas vous révéler, elle cumule une résolution pressée et un symbolisme pesant, qui laissent au film un goût d’inachevé. Le personnage le plus fascinant, c’est finalement moins celui vers lequel tous les regards sont censés se tourner - la jeune et fraîche Rosa, entre fétiche de soubrette et icône mariale -, que « l’enragé », le très animal José Maria, qui incarne avec brio une peur très contemporaine de l’étranger, sur laquelle le film porte d’ailleurs un regard un peu ambivalent. Malgré le caractère brûlant de son sujet, le plus étrange est donc que Rabia demeure dans l’ensemble un exercice plutôt sage, énième variation sur le thème de la demeure menée avec application par l’élève Cordero, mais qui dissimule mal ses artifices rhétoriques les plus voyants.
- © Haut et Court
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Norman06 6 juin 2010
Rabia - La critique
Un scénario de mauvais téléfilm M6, des personnages stéréotypés (la victime immigrée, le fils de famille abject...), un suspense policer inodore et incolore, des situations ridicules, des acteurs principaux inexistants, un dénouement grandiloquent et banal à la fois... Rien à sauver dans ce polar mou.
roger w 13 juin 2010
Rabia - La critique
Certes, le symbolisme social du film n’est pas toujours léger, mais la maestria formelle du cinéaste, ainsi que sa capacité à orienter le récit là où on ne l’attend pas forcent le respect. Les acteurs sont excellents, l’ambiance est étouffante et la résolution très belle. Laissez-vous tenter.