Pour la peau - La chronique BD

Fruit d’une belle rencontre entre entre Sandrine Saint Marc et Zac Deloupy, Pour la peau est un roman graphique érotique qui joue sur les points de vue alternatifs des deux amants pour se forger une sensibilité duelle et une originalité fusionnelle. Les scènes du début ne sont pas d’amour mais bien de sexe, sans brutalité ou bestialité, un adultère se voulant désir inavoué mais conventionnel, le temps d’un coït au bureau ou une escapade au grand air de la campagne. L’essentiel est sexuel , mais l’important est ailleurs : les sentiments qui partagent ou séparent, le silence complexe d’une grossesse adultérine, la culpabilité consciente ou l’intelligence de l’éloignement, autant de thèmes qui percutent davantage qu’une position bien amenée ou dessinée. En ce sens, les conséquences, et donc le final, auraient mérité d’être plus exploitées, et plutôt que d’insister sur les impressions de chacun durant l’acte, rendre l’œuvre psychologique plus concrète, quitte à sacrifier de l’érotique. Mais ce serait assurément faire l’impasse sur une partie du public visé, car la sensualité est remarquable.

© Delcourt

L’originalité de deux narrations se retrouve dans le dessin, avec un choix audacieux de rechercher deux identités graphiques, deux types de traits tout en les laissant proches et pouvant à loisir se mêler. Ainsi, un bic trois couleurs s’invitera dans certaines pages, se rajoutant ou contournant les traits noirs, plus épais et plus conformes au style recherché. Mélange des encres et des fluides donc, mais qui ne peut empêcher une certaine monotonie des scènes d’ébats, même si, encore une fois, elles sont caractéristiques du genre et donc de l’attente des lecteurs.

© Delcourt

Collision intentionnelle de deux auteurs, deux corps et deux narrations, Pour la peau saura ravir les amoureux d’une lecture torride sans aucune vulgarité. Il faudra piocher pour les autres, mais reste un roman graphique original et charnel.