Le 18 octobre 2007

- Dessinateur : LARCENET, Manu
Au cours de sa jeune vie, le prolifique Manu Larcenet a déjà coiffé les casquettes d’objecteur de conscience, de chanteur punk, d’humoriste hors pair et de lauréat à Angoulême. Joli parcours !
Objecteur de conscience, chanteur punk, humoriste hors pair et lauréat à Angoulême. Joli parcours d’un auteur pas ordinaire !
Né Emmanuel Larcenet le 6 mai 1969 à Issy-Les-Moulineaux, Manu Larcenet commence à dessiner de la BD dès l’âge de dix ans. Adolescent, il étudie le graphisme au lycée de Sèvres, puis fait un BTS d’expression visuelle.
En 1991, il passe son service militaire, expérience traumatisante qu’il commentera sans faux détour dans l’album Presque où il décrit l’aliénation et la négation de l’individu que constitue tout entraînement militaire. Après avoir rempli ses obligations patriotiques, non sans avoir essayé d’y échapper (le pauvre s’était vu offrir un séjour tous frais payés en bataillon disciplinaire), il se jette corps et âme dans la musique. Devenu chanteur d’un groupe de punk, il vit dans un squat avec d’autres musiciens dont il partage l’idéal libertaire. A la même époque, il commence à publier des dessins dans différents journaux de rock et dans des fanzines de bande dessinée.
CLIQUEZ SUR LES COUVERTURES POUR VOIR UNE PLANCHE
En 1994, laissant tomber son groupe et des études qu’il avait reprises, Larcenet entame une collaboration avec Fluide Glacial. Il s’y fait remarquer pour son humour décalé et faussement dérisoire. Détournant les clichés et les personnages célèbres ou historiques, il impose une rare verve parodique qui rencontre très vite le désir du public.
Son premier album Soyons fous sort en 1996. Depuis, il ne s’arrête plus ! Ce qui, chose incroyable, lui laisse tout de même le temps de fonder avec Nicolas Lebedel la maison d’édition Les Rêveurs de Runes où il publiera différents albums autobiographiques tels que Presque, Dallas cowboy ou encore l’écorché L’artiste de la famille.
En 1998 sort le premier album de son premier personnage récurrent : Bill Baroud, espion au service de la CIA, une parodie loufoque du cinéma d’aventure et d’espionnage.
A partir de l’année 2000, il entame avec Dargaud une collaboration fructueuse et devient, sous les auspices du regretté Guy Vidal une des figures de proue de la collection "Poisson pilote".
Juin 2001, Manu Larcenet quitte Paris pour la campagne lyonnaise ; la série Le retour à la terre signée avec Jean-Luc Ferri évoque avec humour ce retour aux sources.
CLIQUEZ SUR LES COUVERTURES POUR VOIR UNE PLANCHE
En mars 2003, il publie chez Dargaud Le combat ordinaire ; sur un mode mariant humour et récit intimiste poignant, l’album nous conte les errements d’un jeune photographe, Marco, artiste névrotique qui a du mal à assumer ses propres choix. Très vite la presse s’emballe, les fans affluent, les femmes s’arrachent les bouts des seins pour en remplir la boîte aux lettres de l’artiste. Devant un tel plébiscite, le jury d’Angoulême ne trouve rien de mieux à faire que de lui attribuer le prix du meilleur album de l’année. Le magnifique deuxième tome des aventures de Marco ne devrait pas décevoir les attentes que le premier avait suscitées.
De 1996 à 2004, multipliant les collaborations (avec son frère, Patrice Larcenet, mais aussi avec Thiriet, Julien, Trondheim, Gaudelette, Jean-Yves Ferri...) et les éditeurs (Fluide Glacial, Glénat, Dupuis, Dargaud, Delcourt...), Larcenet a publié pas moins de trente albums avec une constance en terme de qualité qui force le respect.
Difficile de faire le tour d’une œuvre aussi riche et diverse. L’homme aime visiblement arriver là où on ne l’attend pas : parodie, dessin d’humour, BD pour enfants, autobiographies et même récits fantastiques (les deux tomes des Entremondes ), Manu Larcenet étonne. S’il existe néanmoins un thème récurrent chez lui, c’est peut-être celui du rapport de l’individu au monde qui l’entoure. Que ce soit dans sa veine humoristique parodique, où il aime expédier des personnages dans des univers qui ne leur correspondent pas, faisant, par exemple, du commandant Cousteau ou de Calimero d’ignobles méchants que le valeureux Bill Baroud combat, que ce soit dans des œuvres plus sombres telles que La ligne de front où il place un artiste, en l’occurrence Vincent Van Gogh, au beau milieu de l’enfer des tranchées de la guerre 14-18 ou encore dans Les entremondes où un personnage est projeté dans un univers parallèle... le décalage entre l’individu et le monde dans lequel il est envoyé ou forcé de vivre est permanent. Même la situation de Marco dans Le combat ordinaire, n’est pas, à y réfléchir, tellement différente, elle est juste traitée de manière beaucoup plus réaliste et intimiste.
D’album en album, Manu Larcenet s’est efforcé d’aller chercher, sous le gag, la racine des sentiments les plus diffus : le pathétique, l’angoisse, la colère. Son humour ravageur et sa sensibilité d’écorché vif en font une des personnalités les plus duelles et les plus attachantes de la bande dessinée contemporaine.
A lire aussi :
– Rencontre avec Manu Larcenet
– Bill Baroud, Tome 4
– Le combat ordinaire, Tome 1
– Le combat ordinaire, Tome 2
– La ligne de front
Bibliographie complète de Manu Larcenet
|