Plein ciel – Pierre-Roland Saint-Dizier, Michaël Crosa – la chronique BD

Critique :Journaliste et scénariste de bande dessinée, Pierre-Roland Saint-Dizier a couché sur le papier ses souvenirs d’enfance pour créer Plein Ciel. Dans une postface qui croise images et photographies d’époque, le scénariste revient ainsi sur son enfance à Mulhouse, « au cœur d’un quartier de grands ensembles de 15 000 habitants ». La tour dans laquelle il a passé sa jeunesse, et qui a inspiré l’album, est sortie de terre dans les années 1960 : forte de 22 étages, elle abritait 400 habitants. Plein Ciel est donc le fruit d’une douce nostalgie qui témoigne d’une réalité sociale finalement peu explorée : la vie quotidienne des habitants d’un immeuble et ses aléas, des ascenseurs en panne aux drames de la vie, en passant par les conversations avec le facteur. Sans le dire explicitement, Saint-Dizier fait remonter l’intrigue de l’album aux années 1990 de son adolescence.

Pierre-Roland Saint-Dizier, Michaël Crosa / Ankama

Confrontés au drame de la mort d’Émile, les habitants se serrent les coudes et reprennent tant bien que mal leur vie quotidienne. Ils sont cependant intrigués lorsqu’ils voient arriver un couple de nouveaux voisins venus tout droit de Paris, et que l’un d’eux n’est autre que le petit-fils d’Émile. Pourquoi cet emménagement, alors que le jeune homme ne venait guère voir son grand-père de son vivant ? Avec cet épisode, le récit de Saint-Dizier nous fait doucement glisser vers le cœur de l’intrigue, qui concerne l’immeuble lui-même, véritable personnage central de l’histoire.

Pierre-Roland Saint-Dizier, Michaël Crosa / Ankama

Une présentation, sur une même planche, des différents appartements de l’immeuble Plein Ciel. Le dessinateur retranscrit sur la planche la verticalité du bâtiment.

Avec ses planches à l’aquarelle, le dessin de Michaël Crosa s’arrête sur les intérieurs bigarrés des appartements – les plantes envahissantes de Martine, les aquarium de ses voisins du dessus… – ainsi que sur les lieux communs. L’entrée, l’ascenseur, et jusqu’au toit de l’immeuble, sont autant de lieux de sociabilité. Au-delà du récit principal, ces scènes du quotidien font le sel de l’album. La mise en page met également en relief le bâtiment, entre les différentes vues de l’image et le découpage par étage de certaines planches, où l’on observe la vie quotidienne des différents appartements.

Album empreint d’une certaine nostalgie, Plein Ciel s’intéresse au vécu d’une communauté avec beaucoup de tendresse pour, au-delà des clichés, offrir un autre regard sur les grands ensembles.