Huis clos
Le 8 juillet 2009
Le premier long métrage d’Enrique Rivero déploie avec langueur une réflexion sur la fracture sociale et l’exclusion. Une œuvre ambitieuse malgré un discours redondant.
- Réalisateur : Enrique Rivero (II)
- Acteurs : Nolberto Coria, Nancy Orozco, Tesalia Huerta, Federico Flores
- Genre : Drame
- Nationalité : Mexicain
- Date de sortie : 8 juillet 2009
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– Durée : 1h26mn
Le premier long métrage d’Enrique Rivero déploie avec langueur une réflexion sur la fracture sociale et l’exclusion. Une œuvre ambitieuse malgré un discours redondant.
L’argument : Beto est le gardien d’une maison à Mexico, restée vide depuis plusieurs années, dans laquelle il a longtemps travaillé comme domestique. La solitude des dix dernières années, la monotonie et la routine de son travail l’ont incité à mener une vie recluse, qui pourrait sembler étouffante, mais lui fournit un environnement sûr et stable, contrairement au monde extérieur menaçant. Il a développé une crainte pathologique de l’extérieur, au point de limiter ses contacts à deux seules personnes : la propriétaire de la maison, pour qui il a un sentiment de gratitude et de respect profond qui se traduit par un lien d’obéissance ; et Lupe, une amie, à la fois sa confidente et maîtresse. La maison devant être vendue, Beto se demande s’il va à nouveau devoir se confronter au monde extérieur ou s’il va trouver une solution pour rester dans son isolement.
Notre avis : Le réveil de Beto sonne tous les jours à 7h15. L’homme s’étire, se lève et va déjeuner avant de s’occuper de l’entretien de la maison ; tel est le rythme quotidien de ce gardien qui n’est plus sorti depuis trente ans. Le premier long métrage d’Enrique Rivero contemple lentement les jours qui se suivent, inlassablement semblables et expose l’aliénation qui enferme Beto dans un monde qui n’a rien de commun avec la réalité.
La télévision est le seul média que s’autorise le gardien de la maison. Il l’utilise avec parcimonie : seulement le soir, en somnolant. Regarder les informations constitue une habitude au même titre que les activités ménagères qu’il effectue quotidiennement. Les actualités elles-mêmes entrent dans une logique ritualisée : chaque soir, le journal télévisé présente une violence mondialisée. Cet homme aux us ascétiques démontre à lui seul qu’une société sur-exposée, sur-médiatisée ne favorise pas nécessairement une meilleure communication entre les individus et n’empêche en rien une solitude réelle. Dans son fauteuil, dans un salon à la lumière tamisée, le héros de Parque via connait le monde mais n’y prend absolument pas une part active. L’enfermement du personnage est accentué par une photographie granuleuse, par de lents travellings à l’image du temps qui s’écoule et par une atmosphère sonore en exergue : si le décor ne peut changer, la nature environnante se meut au gré des variations climatiques et ses transformations bousculent ponctuellement le calme ambiant.
- © ASC Distribution
Les contrastes exposés par Enrique Rivero ne sont pas uniquement visuels. Le cinéaste souligne les différences de niveaux de vie, le fossé existant entre les classes sociales au Mexique. Sous une apparente cohésion et un respect sincère entre Beto et la maitresse de maison, le gardien n’en reste pas moins un employé sans domicile fixe qui ne peut se restaurer à la même table que sa patronne, même le jour de Noël. Si l’univers dans lequel le personnage principal évolue est quelque peu factice, le discours du réalisateur puise sa crédibilité dans son aspect documentaire. Basé sur l’histoire vraie de l’interprète de Beto, Parque via, est tourné en seize millimètres, apportant de ce fait un effet de réalisme. Un long encart sur une reproduction du tableau de Fernando Botero, Couple dansant, résume l’ensemble du film : la femme est de dos, l’homme la serre dans ses bras, le regard dans le vague. Il n’existe pas de liens véritables entre eux, ce sont deux solitudes côte à côte. A l’instar du peintre colombien, Enrique Rivero témoigne de la misère sociale et affective qui peut exister au cœur d’une société qui fonde une grande part de ses valeurs sur l’interrelation.
« Les amorphes ne sont pas une voix, mais un écho ». Ces propos du psychologue expérimental, Théodule Ribot, pourraient s’appliquer pour décrire Beto et sa situation sociale. En s’appuyant sur un personnage hors de toute réalité commune, Parque via se présente comme une œuvre aride qu’il faut suivre patiemment en acceptant la redondance et la lenteur des séquences pour découvrir un regard singulièrement lucide et douloureux sur le monde actuel.
- © ASC Distribution
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