Natür Therapy - la critique du film + le test DVD

Notre avis : Ce run movie passé par la section Panorama de la Berlinale est le second film de Ole Giaever, mais le premier à connaître les faveurs d’une sortie française. Si le précédent long-métrage du réalisateur norvégien évoquait déjà une fuite en pleine nature – The Mountain avait en effet pour sujet deux parents tentant de survivre à la mort de leur enfant en se perdant dans les montagnes - c’était pour mieux aborder la problématique du deuil. Ici, Ole Giaever resserre l’étau et réduit au maximum son nombre de personnages. Nous voici donc en compagnie de Martin, plus de trente ans, boulot dans un bureau, femme et enfant, éternel insatisfait englué dans un quotidien qui l’étouffe. Le week-end arrivant, c’est le moment de partir, de faire un genre de cure, une « Natür Therapy ».

© Epicentre Films

Lâcher prise et s’enfuir en solitaire, loin de ses obligations familiales et professionnelles, voilà le credo du film, déjà au centre de quelques longs métrages réussis dont l’incontournable Into the wild ou plus récemment Comme un avion, sorti cette année. Là où Podalydès voguait sur les cours d’eaux, Ole Giaever choisit la randonnée pure, en pleine nature Norvégienne. Au premier abord, une idée rafraîchissante pour un film destiné à sortir à la rentrée, lorsque tout le monde aura ressorti les dossiers. Pourtant de bol d’air pur il n’en est presque rien tant le personnage est embourbé dans ses pensées, des plus classiques aux plus inavouables – comme l’instant où il songe que ce serait plus pratique si sa femme était morte, comme ça il pourrait profiter de la pitié des autres et n’aurait pas à s’excuser de la tromper. Le film est en effet presque tout entier guidé par la voix off du héros, qui ne cesse de réfléchir à son existence. Nous serons donc accompagnés par ses réflexions au cours de sa ballade en solitaire.

© Epicentre Films

Martin a un week-end, pas plus, pour changer de vie. Il se met à l’épreuve, tant sur le plan physique que moral. Cette pratique de la fuite en avant est au départ assez plaisante. Le titre original a été traduit par « Natür Therapy », sans doute pour faire écho au film de Ruben Ostlund, Snow Therapy où un sens de l’humour assez cynique régnait déjà. On appréciera d’ailleurs le coté chien fou du personnage, cette liberté de pensée presque totale qui le rend par moments touchant et drôle. La caméra portée qui suit le héros qui déambule à la fois dans la nature et dans ses pensées contribue à faire de Natür therapy un film modeste mais curieusement refermé sur lui-même, à l’image de son héros. Tant et si bien que, toujours obsédé par l’idée de se masturber, il finit par se faire surprendre, illustrant le fait de ne jamais pouvoir être seul. Une mise à nu au propre comme au figuré, dans un geste aussi osé qu’inattendu. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’auteur/acteur/réalisateur s’est donné corps et âme à son projet.

© Epicentre Films

Natür Therapy parle aussi de notre obsession si contemporaine pour l’activité. Pour survivre dans cette société ultra connectée, il faudrait toujours avoir quelque chose à l’esprit, qu’on ne peut jamais laisser au repos, même pendant un effort physique intense. Ces intentions sont louables, toutefois la monotonie gagne vite le spectateur tant le procédé est systématique. Martin réfléchit à un moyen d’améliorer sa vie, il s’abîme en pleine nature, et il se relève et poursuit sa réflexion, de plus en plus cynique. Ce qui différenciera Natür therapy des autres films sur le thème de la quête personnelle à travers un genre de retour aux sources écolos – comme Into the wild par exemple - est sa propension au pessimisme, voir au déterminisme. Entre la fraîcheur vite devenue froideur de l’ensemble et ses traits d’humour assez noirs, on hésite à savoir sur quel pied danser. On ressort de Natür Therapy perturbés par cette introspection totale mais partagés sur l’intérêt du film et de son final sous forme d’éternel retour.

Le DVD

Sortie le 7 juin 2016

Les suppléments :

19mn de présentation du film par le réalisateur-promeneur solitaire, qui introduit volontiers son oeuvre, laissant de temps à autre la parole aux deux actrices qui hantent de leur présence la randonnée existentielle du protagoniste principal.
Bande-annonce et filmo-biographie complètent cette section.

L’image :

Lumineuse et d’un piqué précis. Un beau compromis pour parer l’absence de blu-ray.

Le son :

Un discret 5.1 D.D, avec quelques envolées musicales (la chanson d’Alphaville, Forever Young, est l’un des moments les plus remarquables) dans un projet intimiste, peu enclin aux dialogues et aux moments d’esbroufe. Le résultat est correct.