Le choix des armes
Le 27 juillet 2009
Un beau film rigoureux et nuancé, marqué par l’exceptionnelle composition d’Olivier Gourmet.
- Réalisateur : Laurent Herbiet
- Acteurs : Cécile de France, Olivier Gourmet, Robinson Stévenin
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Algérien
– Durée : 1h51mn
La guerre d’Algérie à hauteur d’hommes livrés à eux-mêmes. Un beau film rigoureux et nuancé, marqué par l’exceptionnelle composition d’Olivier Gourmet.
L’argument : 1995, Paris. Le colonel en retraite Raoul Duplan est trouvé chez lui, une balle dans la tête. Une lettre anonyme est envoyée aux enquêteurs : "Le colonel est mort à Saint-Arnaud".
1957, Saint-Arnaud, est de l’Algérie. Un jeune officier juriste, Guy Rossi, prend ses fonctions auprès du colonel Duplan. La machine des pouvoirs spéciaux et de la torture institutionnalisée se met tranquillement en route. Elle fera du jeune juriste un bourreau. Et elle rattrapera Duplan quarante ans plus tard.
Notre avis : Longtemps peu abordée dans le cinéma français (même si des cinéastes comme Vautier ou, plus récemment, Tavernier l’avaient traité, sans rencontrer le succès que méritait leurs œuvres), la guerre d’Algérie trouve avec cinquante ans de retard la place qui lui revient dans la mémoire collective et ses représentations. Question de génération sans doute, la douleur engendrée par ce conflit âpre, cette "sale guerre" (mais n’est-ce pas le propre de toutes les guerres ?) qui vit l’Etat français se déshonorer en recourant à d’abominables méthodes, indignes d’une démocratie, pour faire face au harcèlement des fellagas, ces douleurs étant en voie d’apaisement.
Produit par Costa-Gavras, c’est sur ces aspects peu glorieux de la lutte que revient le film de Laurent Herbiet. Comment interpréter des ordres qui laissent de plus en plus le champ libre aux militaires sur place, à la position intenable, et aux méthodes les plus condamnables ? Jusqu’où doit-on obéir à des ordres en total désaccord avec sa conscience ? Quel est le prix à payer ? Et quel regard porter actuellement sur ces événements ?
Le film se place résolument du côté des individus d’hier et d’aujourd’hui. Le colonel, terrifiant mélange de conscience chrétienne, de communiste et de nationaliste, s’est forgé ses propres principes et utilise sans scrupule le blanc-seing qui lui a été délivré par un régime désemparé et beaucoup moins débonnaire qu’il n’y paraît (François Mitterrand, alors garde des sceaux du gouvernement Coty, est clairement mis en cause). D’abord séduit et impressionné, le jeune Rossi ouvre peu à peu les yeux. A cinquante ans de distance, le lieutenant Galois s’identifie au jeune homme quand les plaies ouvertes chez les acteurs de ce drame ne sont pas cicatrisées.
Laurent Herbiet parvient dans sa réalisation à échapper presque totalement au double piège de la reconstitution et du film-dossier. Bien que didactique, son film parvient à limiter les lourdeurs (léger bémol sur les flash-backs). Il faut dire qu’il est secondé par des interprètes de poids qui sensibles (Robinson Stévenin), modestes (Cécile de France), émouvants (Charles Aznavour, dans une courte apparition) ou carrément géniaux (Olivier Gourmet, complètement flippant car humain et monstrueux en même temps), apportent beaucoup à cette saine entreprise.
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cvr_pn@laposte.net 25 mars 2020
Mon colonel - la critique
J’ai vu ce film à sa sortie, à Paris : il y avait 6 spectateurs !
Je suis né à Saint-Arnaud, où se situe la partie principale du film et il me vient une réflexion, au delà des commentaires et critiques faits au sujet de ce film et de son thème.
"Lorsque des problèmes intimes se passent au sein d’un couple, ceux qui sont en dehors de leurs draps ne peuvent comprendre ces problèmes !"
J’ai bien connu l’époque dite de la colonisation et les années de "guerre", puis 4 années de coopération à Alger, de 68 à 71, et enfin, après la "décennie terrible" (1992 - 2002), des missions sur place ...et j’espère avoir quelques éléments d’objectivité.