Le 25 septembre 2020
Mélange subtil de profondeur et de légèreté, Marie des poules éblouit.
Du grand et beau Théâtre !
- Acteurs : Béatrice Agenin, Arnaud Denis, François Nambot
- Durée : 1 h 25
- Metteur en scène : Arnaud Denis
- Genre : Théâtre (spectacles)
- Salle de Théâtre : Théâtre Montparnasse
- Plus d'informations : Le site du Théâtre Montparnasse
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Résumé : A onze ans, Marie Caillaud entre à Nohant au service de George Sand. Les années passent et Maurice, le fils de la maison, entretiendra avec elle une liaison chaotique. Quelle sera l’attitude de George Sand ? De Maurice ? Les conventions sociales briseront-elles les espérances de Marie ? Quel sera le destin de Marie des Poules ?
Critique : Dès le début du spectacle, le public est saisi par la grâce de Béatrice Agénin. Elle peut avoir l’âge qu’elle veut. Tour à tour gamine de onze ans, jeune gouvernante ou George Sand en personne, elle rayonne tout en exprimant la passion, des sentiments ambigus ou de sombres facettes. Elle est émouvante avec ses larmes au bord des yeux.
Copyright Fabienne Rappeneau
Toute fraîche ou rocailleuse, sa voix porte loin. Elle alterne les débits
avec musicalité, elle chante quand elle parle. Sa longue chevelure la couronne avec élégance. Béatrice Agénin a un charme et un talent fous, qu’elle met au service d’un spectacle intense sur des destins de femmes plus ou moins libres, aux prises avec les conventions.
C’est tout un roman sandien qui s’écrit dans la maison de Nohant. Marie Caillaud a du tempérament, mais peu d’éducation. Elle cultive la fraîcheur des sentiments. Maurice, fils de George Sand, l’enfant "trop gâté d’une femme trop bonne", viendra lui ravir son innocence et entretenir une relation qu’il imagine uniquement charnelle et distrayante. Campé avec talent et en alternance par Arnaud Denis et François Nambot, Maurice est présenté sous des traits qui appellent les qualificatifs suivants : macho, odieux, menteur, jaloux, méprisant...
Copyright Fabienne Rappeneau
Marie Caillaud, qualifiée de meuble familier devient très vite Marie des poules pour la distinguer d’une autre Marie et parce qu’elle s’occupe d’aller chercher les œufs. Au-delà de son surnom, c’est l’éducation par George Sand elle-même qui va lui conférer une vraie noblesse, sincère et authentique. En effet, elle apprendra à lire, à écrire, à jouer au théâtre. Très vite, elle sera grisée par la lumière et les applaudissements, sans pour autant délaisser l’ombre des cuisines. Elle dévore les livres et a soif d’évasion. Elle se découvre de l’esprit qui ne demandait qu’à être révélé. George Sand l’associe aux conversations avec les invités, jusqu’à en faire sa gouvernante. "J’aime comprendre" dit Marie.
La romancière l’élève, mais son fils la rabaisse, lui qui se sent déjà dépassé par l’intelligence et l’aura de sa mère. D’une certaine façon, l’écolière dépasse sa maîtresse quand il s’agit de dénoncer les différences de statuts. Marie des poules bouscule les certitudes de Maurice. Toutefois, George veut rompre la relation entre sa protégée et le fils de la maison.
La pièce montre ainsi une George Sand qui s’affranchit de son propre discours sur la modernité, le féminisme et l’égalité avec les hommes. Elle a peur pour sa réputation, elle veut une descendance. Bref, elle s’accommode des conventions, se contredit quand cela l’arrange et sert ses intérêts. Sand apparaît sous d’autres facettes peu flatteuses. Elle est ici une matriarche autoritaire avec son fils, l’obligeant à se marier avec celle qu’elle a choisie parce qu’elle a de l’argent.
"Il m’a manqué d’être bien née", relève Marie. Chez l’auteur de Marie des Poules, Gérard Savoisien, il y a du Marivaux, du Beaumarchais et une touche de Balzac. Il s’était déjà penché sur la vie de Sand (et de Mérimée) à travers Prosper et George.
La mise en scène, signée Arnaud Denis, est fluide et enlevée, utilisant à bon escient des marionnettes et une maison de poupée, reproduction de celle de Nohant. Le très joli jeu de grandes ombres est particulièrement bien vu et expressif, pour amplifier le texte.
Copyright Fabienne Rappeneau
La création de lumières par Laurent Béal, avec des intensités opposées, participe à la thématique des classes sociales et de la dualité de George Sand. L’équipe du spectacle a réussi à créer une atmosphère dans laquelle se fondent ou s’écartent les extrêmes. L’affiche de la pièce suit cette perspective.
Les thématiques de la différence des classes, de l’amour empêché par les conventions ne sont pas nouvelles, mais elles sont ici particulièrement bien traitées. Le double Molière (meilleure comédienne et meilleur spectacle dans un théâtre privé) est venu couronner à juste titre cette harmonie de jeu, de couleurs et de mots.
Jusqu’au 20 décembre 2020
Au Théâtre Montparnasse
31, rue de la Gaieté
Paris 14ème
Le texte est édité aux Editions de l’Avant-Scène.
Décor : Catherine BLUWAL
Créateur sonore : Jean-Marc ISTRIA
Création marionnettes : Julien SOMMER - Le Théâtre des Marionnettes Parisiennes - Champs de Mars
Assistant à la mise en scène : Georges VAURAZ
PRODUCTION
Atelier Théâtre Actuel, Melodi, Canal 33, Sésam’ Prod et Laurent Grégoire
Avec le soutien de l’ADAMI et du Théâtre du Val d’Osne de la Ville de Saint Maurice
Galerie Photos
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