Le 2 avril 2015
- Réalisateur : Manoel de Oliveira
- Voir le dossier : Nécrologie
Le doyen des cinéastes mondiaux nous a quittés. Il laisse une œuvre grandiose à la fois austère et fascinante.
Manoel de Oliveira, très prolifique depuis deux décennies, était le plus grand cinéaste portugais, et sans doute l’un des créateurs les plus singuliers de son temps, de la trempe des Robert Bresson ou Theo Angelopoulos. Cet homme de culture, érudit et exigeant, était né dans une famille bourgeoise de Porto. Après une période où il s’était consacré aux courts métrages et documentaires, il s’était fait connaître avec Aniki Bobo (1942) : ce premier long métrage annonçait le néoréalisme italien, par sa description sans concessions d’un petit groupe d’enfants dans le quartier populaire de Porto. Mal à l’aise dans la société salazariste, Oliveira préféra longtemps l’exil, avant d’effectuer un retour remarqué dans les années 70, avec trois films majeurs révélateurs de son style. Benilde ou la vierge mère (1975) conciliait mysticisme et fantastique, quand Amour de perdition (1979) et Francisca, adaptions littéraires, dévoilaient un style tant dépouillé que romanesque, privilégiant le plan fixe, les cadrages austères, et un sens tout pictural de l’art filmique. En 1985, Oliveira proposait Le soulier de satin, excellente adaptation de Claudel à l’écran, avant de s’atteler à Non ou la vaine gloire de commander (1990). Mais peut-être son chef-d’œuvre est-il Val Abraham, triomphe de la Quinzaine des Réalisateurs en 1993. Adapté d’un roman d’Agustina Bessa-Luis, lui-même inspiré de Madame Bovary, ce modèle de cinéma de l’épure et de la grâce lui permit d’élargir un peu son audience. Car Oliveira a souvent eu l’étiquette de réalisateur confidentiel, loin des codes de l’industrie du spectacle, mais objet d’un véritable culte de la part des cercles de cinéphiles. Après Val Abraham, Oliveira n’arrêta pas de tourner, comme s’il voulait rattraper le temps perdu des années 40 à 70. Parmi les films les plus marquants de sa dernière période, on peut retenir La lettre (1999), adaptation de La Princesse de Clèves, ou L’étrange affaire Angelica, merveille onirique sélectionnée à Un Certain Regard en 2011. Manoel de Oliveira, qui a dirigé Leonor Silvera, Luis Miguel Cintra, Michel Piccoli, Catherine Deneuve, Jeanne Moreau et autres pointures de l’écran, avait reçu près de cinquante prix internationaux.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.