Le 16 décembre 2023
Bradley Cooper organise avec brio son propre triomphe, et ouvre sa filmographie à la grande fresque classique hollywoodienne.
- Réalisateur : Bradley Cooper
- Acteurs : Vincenzo Amato, Bradley Cooper , Carey Mulligan, Matt Bomer, Michael Urie
- Genre : Drame, Biopic, Romance, Musical
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Netflix
- Durée : 2h09mn
- Date de sortie : 20 décembre 2023
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Résumé : D’un coup de pouce du destin qui lance sa carrière jusqu’au crépuscule de sa vie, Léonard Bernstein n’aura eu de cesse de se consacrer à la musique, et aura créé parmi les compositions les plus marquantes du XXème siècle. Mais la musique, géniale, cache une personnalité et une vie complexes...
Critique : Avoir Scorsese et Spielberg à la production, c’est une certaine manière de se mettre la pression. Cooper assume par là un héritage, ou ce qu’il souhaiterait être un héritage, en s’inscrivant dans les pas de grands maîtres du classique hollywoodien tel qu’ils peinent encore à exister. Ce n’est pas faire injure à Cooper que d’affirmer qu’il n’est pas encore tout à fait dans leur cour, mais qu’il fait bien d’assumer de suivre leur trace. Car de talent et d’ambition, il n’est pas dépourvu.
Le choix de son sujet assume aussi une filiation avec le classicisme hollywoodien, tant West Side Story (Robert Wise, 1961) fut un jalon : il n’y a qu’à voir l’application qu’a mis Steven Spielberg – tiens, tiens - à l’adapter en 2021. Il est donc heureux de constater que Cooper évite les principaux écueils qui lui tendaient pourtant les bras. L’hommage facile, la démonstration gratuite de mise en scène, ou encore la paraphrase des grands cinéastes affiliés à Bernstein. Certes, n’occultons pas quelques effets artificiels ou quelques manquements aux lois élémentaires de la subtilité, mais retenons ceci : il est possible qu’à la fin de sa vie, nous disions de Cooper qu’il possède une grande filmographie, et Maestro pourrait bien en être une étape marquante.
- © 2023 Netflix, Inc.
L’axe principal qu’il choisit pour nous propulser dans la vie d’un Bernstein qu’il incarne impeccablement est celui du destin de Felicia mêlé au sien, dans la beauté comme dans l’horreur. Felicia, interprétée par la stupéfiante Carey Mulligan, jouit d’un rôle joliment écrit et traité, loin des rôles féminins souvent bâclés dans les productions du même acabit. Au contraire, elle est indirectement le commencement et la conclusion du long métrage. Par le truchement de la musique et du théâtre, leur rencontre est électrique. Classique mais efficace, le développement de leur attachement se trouve tout entier résumé dans une jolie scène de comédie musicale, aussi douce que programmatique.
Puis vient l’effacement de Felicia, sous la pression du monde extérieur, des frasques de Bernstein. Le meilleur exemple de ce glissement provient de la scène de l’interview télévisée, où Berstein est amené à parler de lui-même, et elle de lui… et du foyer. Cooper insiste d’ailleurs sur l’ambiguité de Bernstein, et met autant en exergue les vertus transcendantales de sa musique que sa dimension de plus en plus écrasante, et son incapacité à se montrer véritablement digne de l’amour des siens, et notamment sa fille. Ce portrait contrasté, teinté de ses infidélités avec d’autres hommes au nez de Felicia, le scénario le porte au bord de la rupture pour mieux amorcer sa possible rédemption.
- © 2023 Netflix, Inc.
La volonté de Cooper de ponctuer son film des compositions du maître lui-même se trouve être un peu lourde, mais a le mérite de faire sens, tant les notes de Bernstein accompagnent avec justesse ses soubresauts émotionnels. À l’ensemble, bourré de qualités, il faut en ajouter quelques autres : le découpage très juste du film, qui laisse respirer le cadre, avec seulement les coupes utiles, le tout permettant de porter l’attention sur la photographie de Matthew Libbatique, d’une infinie douceur, et au rythme impeccable des dialogues coécrits par Cooper et John Singer. Le soin apporté aux transitions, lui, exalte la mise en scène, principalement au début.
Maestro nous laisse alors avec quelques moments de grâce (les retrouvailles musicales dans la maison de Dieu), quelques légères lourdeurs formelles (la caméra tremblotante quand la maladie frappe), et surtout une impression générale de solidité : celle d’un auteur qui construit, pas à pas, une œuvre remarquable au sein d’une industrie qui laisse pourtant si peu de place à ceux qui tentent d’imposer leur style.
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