Le 3 janvier 2019
Marie-Hélène Lafon, dont l’œuvre a toujours témoigné d’une attention à ses origines, dialogue avec une proche connaissance de sa famille. A travers leur échange, c’est tout le passé d’une région qui ressurgit.


- Réalisateurs : Marc-Antoine Roudil - Sophie Bruneau
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français, Belge
- Durée : 1h13min
- Plus d'informations : Voir en VOD

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Résumé : Une ancienne ferme, dans le sud du Cantal, au bord de la route. Madame Jean est assise à la table. Elle accueille Marie-Hélène Lafon, écrivain. Toutes deux sont filles de paysans et ont une histoire en commun.
© ADR Productions
Notre avis : Dans l’intérieur vétuste d’une maison qui semble figée, une vieille table en bois sépare deux femmes. A l’extérieur, le bruit continuel des voitures rappelle que la route, autrefois empruntée par les poules, n’est plus ce chemin agreste par lequel cheminaient aussi les équidés. Le dialogue feutré entre l’écrivain Marie-Hélène Lafon et Madame Jean, une habitante du Cantal mais aussi une bonne connaissance de la famille, fait ressurgir le passé enfoui des campagnes, la vie souvent âpre des paysans, le traumatisme des guerres (il est surtout question du premier conflit mondial). Madame Jean évoque la mémoire de son père, éleveur de moutons, de chèvres et de vaches ; Marie-Hélène Lafon lui rappelle que, de leur côté, ses parents ne s’occupaient que des bovidés. En posséder, c’était assurément se distinguer par rapport aux autres agriculteurs. Dans cet échange où chacune des femmes s’écoute attentivement, n’interrompt que rarement la parole de l’autre, la caméra demeure discrète, à travers un dispositif classique de champ-contrechamp qui peut, à la longue, paraître monotone.
Mais l’intérêt provient de ce que l’hôte et son interlocutrice semblent retirer du dialogue, sans jamais le formuler : du côté de Madame Jean, il y a assurément le plaisir à se souvenir, par les menus détails, d’un monde dont elle semble une mémoire en héritage, jusque dans des objets modestes qu’elle extirpe d’un tiroir. Certes, une recette de cuisine soigneusement consignée dans un grand cahier occasionne quelques signes d’agacement chez la vieille femme, mais ses gestes mesurés qui s’allient à la précision du verbe, lui donnent la consistance d’un personnage bienveillant. Ses conseils prodigués à Marie-Hélène Lafon n’ont jamais l’inconvenance d’une leçon. L’échange se clôture par une passionnante évocation de la Bête, du Gévaudan bien sûr, légende qui marqua durablement l’imagination de la petite Marie-Hélène. A ce moment précis, on se dit que le récit détermina peut-être une vocation d’écrivain.