La dame au petit chien
Le 31 juillet 2024
Une romance, un grand acteur et un grand réalisateur réunis sous les soleils trompeurs d’Italie et de Russie : retour sur un film devenu culte dès sa présentation à Cannes en 1987.
- Réalisateur : Nikita Mikhalkov
- Acteurs : Isabella Rossellini, Chiara Mastroianni, Marcello Mastroianni, Marthe Keller, Elena Safonova, Roberto Herlitzka, Loredana Martinez
- Genre : Drame, Romance
- Nationalité : Américain, Italien, Russe
- Editeur vidéo : Potemkine
- Durée : 1h57mn
- Titre original : Oci ciornie
- Date de sortie : 9 septembre 1987
- Festival : Festival de Cannes 1987
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Résumé : Les souvenirs du tendre et faible Romano devenu serveur à bord d’un paquebot au début du XXe siècle. Le jour de l’anniversaire de son épouse, la belle Elisa, il apprend qu’il est ruiné et s’enfuit dans une ville d’eau. Là, il rencontre Anna, jeune et timide Russe qui finit par céder à ses pressantes avances. Effrayée par sa faute, elle rentre brusquement en Russie. Romano, devenu fou d’amour, décide de la retrouver.
Critique : C’est un rêve de peintre, ou du moins d’artiste : rassembler en un seul film les brumes de la Russie et la chaude lumière d’Italie, sous les auspices contraires de Tchekhov et Fellini. Présenté à Cannes en 1987, Les yeux noirs peut apparaître comme une « gâterie » dans la filmographie de Mikhalkov, lequel, s’il n’a jamais réellement cessé de se faire plaisir, prend ici un soin particulier à faire montre de ses goûts esthétiques. En se prêtant au jeu du mélodrame romantique et nostalgique - parachevé par la structure en flash-back -, le cinéaste s’essaie à franchir les frontières du genre, en distillant dans une série de variations une dominante tantôt comique, tantôt amère. En suivant Romano, un quinquagénaire charmeur acculé comme pour la première fois devant l’amour, nous retombons dans une innocence et une naïveté qui réussissent à éviter la niaiserie, par une mise en scène assez subtile pour faire la différence entre un poncif et un vrai moment dramatique. Mikhalkov compose cinématographiquement une musique savante, au rythme d’ensemble parfaitement étudié ; ce qui explique qu’on prend plaisir au film, dans ses excès comme dans ses accès d’intimisme. Et si l’histoire d’amour proprement dite, énième réécriture par le cinéaste de Tchekhov sur le thème de l’occasion manquée, ne touche pas au sublime de certaines séquences de Partition inachevée pour piano mécanique, les scènes de danse et de « transe collective » (en Italie et en Russie) lorgnent avec bonheur vers quelques morceaux d’anthologie de Huit et demi. Le grotesque des cures thermales pour riches hypocondriaques, ou encore les obstacles absurdes échafaudés par l’administration russe pour empêcher les étrangers de circuler librement, forment autant de détails fourmillants qui apportent au film un cachet satirique indéniable.
Malgré sa réputation de professionnel impitoyable, Mikhalkov ne cesse de révéler une sensibilité discrète, à laquelle est étrangère toute sensiblerie, et qui imprègne l’atmosphère entière des Yeux noirs. Hasard du calendrier et des échos, Andreï Tarkovski avait réalisé, quelques années plus tôt, son superbe Nostalghia, l’histoire d’un poète russe exilé sur le sol italien, emporté par les visions de sa terre natale. Mikhalkov, même si son ton reste indéniablement plus lyrique et expansif, reprend un motif similaire, en le renversant : en tombant amoureux d’une femme russe qui semble être l’allégorie de toutes ses compatriotes, Romano se découvre un berceau inédit, une origine secrète. Le talent de Marcello Mastroianni - d’ailleurs récompensé à Cannes par un Prix d’interprétation - consiste à saisir cette ambivalence du personnage, nostalgique tout aussi bien d’un regard amoureux que d’un paysage. Quant au spectateur, il pourrait bien rester suspendu entre ces deux univers, dans la rêverie que laissent à voir le talent esthétique de Mikhalkov.
Le DVD
Ce DVD, que l’on pourra apprécier en édition simple ou inclus dans un coffret réunissant sept autres films de Mikhalkov (son travail des décennies 1970 et 1980), s’inscrit dans la digne lignée des éditions du réalisateur figurant déjà au catalogue de Potemkine.
Notre test du volume 1 du coffret Mikhalkov : ICI
Les suppléments
Simple, mais efficace : un commentaire concis et éclairé de Pierre Murat (22 minutes) et un entretien avec le scénariste fétiche de Mikhalkov, Alexandre Adabachian (8 minutes), permettent de mettre le film en perspective avec les influences, les goûts, et la filmographie du cinéaste. Dommage que pour le spectateur novice dans l’œuvre de Mikhalkov, ces compléments soient peut-être trop documentés dès l’abord...
Image
Un étalonnage superbe et une copie honorable font du visionnage un moment de réel plaisir visuel, fidèle à la photographie originale. Seul bémol : une compression DVD parfois visible, surtout dans les tons clairs, malheureusement très pixellisés.
Son
Le DVD nous laisse le choix entre deux pistes stéréo -VO. et VF.-, toutes deux dotées d’un mixage très correct.
– Sortie DVD : 2 novembre 2010
Le choix du rédacteur
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