Le dernier des hommes
Le 26 juillet 2016
Bouli Lanners fixe le monde d’aujourd’hui à la faveur d’un western crépusculaire bourré d’acteurs cultes. Retour sur son quatrième film à l’occasion de sa sortie Blu-ray.
- Réalisateur : Bouli Lanners
- Acteurs : Albert Dupontel, Suzanne Clément, Bouli Lanners
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Belge
- Editeur vidéo : Wild Side Video
- Durée : 01h38mn
- Date de sortie : 27 janvier 2016
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Année de production : 2015
Sortie DVD & Blu-ray : le 29 juin 2016
Résumé : Dans une plaine infinie balayée par le vent, Cochise et Gilou, deux inséparables chasseurs de prime, sont à la recherche d’un téléphone volé au contenu sensible. Leur chemin va croiser celui d’Esther et Willy, un couple en cavale.
Le film : À ce stade terminal qu’est l’état du monde dépeint par Lanners, l’homme ne semble plus qu’un loup pour l’homme. Le constat se veut politique, social, et peut-être un peu trop à la mode et consensuel pour vraiment faire sens. Il n’empêche : Bouli Lanners tisse avec cette ambiance post-apocalyptique aux relents bibliques un assez beau néo-western crépusculaire. Avec ses chasseurs de prime, ses étendues désertiques, son bar saloon et ses bagarres, tous les codes du western ou presque sont de la partie. La dimension fin du monde a beau être un piège par son absence réelle de signification - tout et rien se réclament aujourd’hui à tort de l’apocalypse, au cinéma -, Lanners en tire un road trip sensible et bien mis en scène. Derrière la représentation d’une détresse sociale latente, filtre un regard plein d’espoir quant à l’avenir. Les derniers des hommes pourraient bien être les premiers d’un nouveau monde.
Outre une bande annonce symbolique, trois bonus sont proposés pour un total d’une trentaine de minutes.
Sous le nom "Ça Beauce dur !", le Blu-ray cache une sorte de making-of en version accélérée, doté d’un montage souvent épileptique. Manière de présenter les artisans du film et les plateaux de tournage, le tout en un peu plus de quatre minutes et sans aucun commentaire. Le sourire de Bouli Lanners entre les prises, les ratés, les techniciens... cette logique du clip est originale mais tue un peu le regard documentaire auquel l’on s’attendrait de la part d’un making of classique.
Pas tout à fait légitime bien qu’intéressant, le documentaire sur l’aerotrain (11 minutes) fait pour sa part un peu remplissage. L’on y apprend que les rails aperçus largement dans la Beauce de Les Premiers, les Derniers servaient il y a 30 ans pour l’aérotrain de Jean Bertin, TGV avant l’heure qui atteignait la vitesse de 450 km/h. Perché sur des rails à 7 m de haut, ce dernier fonctionnait sur coussin d’air. Le prototype 02, restauré il y a peu par un certain Thierry, parcourait 1 km en 8 secondes. Le projet, trop ambitieux pour son temps, fut stoppé suite à un changement politique. La SNCF hérita finalement du marché. Le seul défaut de l’aérotrain : son futurisme exacerbé. L’échec n’était non pas technique mais politique. Fin de l’aventure en 1976.
Entretien avec Bouli Lanners
L’origine du film : une idée de film crépusculaire, un sentiment de fin du monde alimenté régulièrement par l’actualité politique et économique. Quelque chose de sombre et de politique. Deux personnages qui tracent une trajectoire non normative, qui suivent un ancien rail désaffecté dans la Beauce. Symbole d’un pied de nez à l’ordre établi. La fin du monde et la Beauce, selon Lanners.
Les codes : la Beauce et fatalement les westerns. Dynamique du conte. Extirper la société par un biais surréaliste. Lanners parvient à fixer une forme grâce à cette trame. À propos du personnage de Jésus : un être pas conscient de son destin et de ce qu’il est.
Le regard : rien de verbal. Tout s’exprime dans les visages et les regards. Dans la forme, quelque chose fatalement de Leone. Ce qui sert la narration. Manière d’écrire les personnages sans avoir de dialogues pour les expliquer.
À noter que Lanners s’est projeté sur ses personnages dans la mesure où lui-même était dans une mauvaise passe avant le tournage de son film. À propos de Dupontel : protecteur et magnifique. Une douceur, presque dans son personnage. Dupontel et Lanners : un couple à contre-emploi qui s’équilibre. Un film où la comédie s’efface.
Les acteurs : heureux hasard - Lonsdale s’est fait pousser la barbe pour Don Quichotte, mais le film ne s’est pas fait. Idéal pour Lanners, qui recherchait typiquement cette apparence chez l’acteur. Il y a chez Michael, selon Lanners, une mélodie dans ce qu’il dit. Quand lui dit "vivre, ce n’est pas que respirer", tout le film est résumé. La banalité crasse des mots prend alors une ampleur sans pareille.
L’image
La copie Blu-Ray retranscrit les contrastes sombres et froids de l’atmosphère crépusculaire générale du film avec brio. Si le choix de cette dynamique post-apocalyptique prend le risque de caresser un peu trop le public dans le sens du poil, fort est ici de constater son efficience de tous les instants en matière de définition d’image. Reste un formalisme un tantinet échevelé.
Le son
Les partitions de Pascal Humbert (ex-Noir désir) mêlant guitare électrique et autres instruments à corde sur un rythme à la fois funèbre et typiquement western - rockabilly à la Morricone - brillent souvent, en dépit d’une petite monotonie. À ce titre, le Dolby Digital 5.1 fait toujours des merveilles.
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