Le 18 avril 2023
- Scénariste : Mana Neyestani>
- Dessinateur : Mana Neyestani
- Genre : Drame, Chronique sociale
- Editeur : Éditions çà et là
- Famille : Roman graphique
- Date de sortie : 3 mars 2023
Récit d’un drame dans les montagnes du Kurdistan iranien, où la pauvreté entraine les habitants à pratiquer la contrebande de marchandises.
Résumé : Les montagnes du Kurdistan iraniens, au Nord-Ouest du pays, forment une longue frontière avec l’Irak voisin. Cette région marginalisée est l’une des plus pauvres d’un pays soumis aux sanctions économiques occidentales. Pour gagner leur vie, certains Kurdes des villages de montagnes pratiquent la contrebande d’alcool, de cigarettes et de vêtement. Appelés kulbars, ces infortunés contrebandiers voyagent pendant plusieurs jours à pied, chargement sur le dos, dans les montagnes escarpées aux multiples dangers. Ils doivent éviter les gardes-frontières iraniens qui tirent à vue, les mines présentes depuis la guerre Iran-Irak ou le froid glacial. Jeune ingénieur sans emplois, Jalal s’engage comme kulbar avec d’autres hommes de son village pour pouvoir fuir le Kurdistan vers Téhéran avec la femme qu’il aime, mais qui est promise par son père à un vieux notable. La traversée s’avère périlleuse et, au fil du drame qui se joue, les montagnes deviennent le tombeau de cette expédition.
Critique : Dessinateur iranien en exil, Mana Neyestani livre avec Les oiseaux de papier sa première véritable fiction, après avoir brillamment manié l’autobiographie (Une métamorphose iranienne, Petit manuel du parfait réfugié politique), le dessin de presse (recueil Tout va bien !) et raconté l’affaire du tueur en série surnommé L’araignée de Mashhad. Fidèle à lui-même, Neyestani s’est toutefois bien documenté sur la question des kolbars, puisqu’il a échangé avec certains d’entre eux, obtenu des photographies et consulté des articles de la presse iranienne qui relaie régulièrement les décès de ces passeurs. L’album prend une connotation singulière à l’heure de la protestation populaire contre le régime autoritaire iranien, particulièrement vive dans la région du Kurdistan. En effet, c’est de cette région marginalisée par le pouvoir en place – en raison des velléités autonomistes de ses habitants – qu’est issue la jeune Mahsa Amani, dont la mort a déclenché le mouvement de protestation.
- Mana Neyestani / çà et là
L’expédition malheureuse des kolbars, mise en scène avec une tension dramatique redoutablement efficace, constitue le moyen pour Neyestani d’évoquer la vie misérable des habitants de cette région, condamnés à risquer leur vie pour les marchandises de trafiquants. Le dessinateur dévoile ainsi que, dans le Kurdistan iranien, des hommes meurent en transportant des sacs remplis de baskets Nike. Neyestani met également en évidence la structure sociale patriarcale de la société iranienne où l’on tue pour l’honneur et où la violence contre les femmes est endémique. Ce portrait sans concession constitue ainsi une fenêtre de compréhension d’un pays complexe.
- Mana Neyestani / çà et là
Les oiseaux de papier dévoile les talents de conteur de Neyestani, dont les différents personnages sont très bien campés – avec une mention particulière pour cette vieille femme qui vient hanter l’expédition. Le dessin au trait noir, très lisible, met en scène des visages durs, tannés par le poids de leurs sacs et des ans, et des paysages montagneux hostiles à la présence de l’homme. Tout, dans Les oiseaux de papier, rappelle le caractère impitoyable des éléments et des relations humaines et seule la fin, qui justifie en partie le titre, offre une (mince) lueur d’espoir.
Récit bien documenté raconté à hauteur d’hommes, Les oiseaux de papier est un récit social passionnant qui ouvre une fenêtre sur la vie en Iran.
- Mana Neyestani / çà et là
208 pages – 20 €
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Galerie Photos
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