Le 17 août 2021
Moins touchant que le précédent roman de l’auteur, Les contreforts a malgré tout cette beauté poétique qui fait le charme de la langue de Guillaume Sire.


- Auteur : Guillaume Sire
- Editeur : Calmann-Lévy
- Genre : Roman
- Nationalité : Française
- Date de sortie : 18 août 2021
- Plus d'informations : Le site de l’éditeur

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Résumé : Au seuil des Corbières, les Testasecca habitent un château fort fabuleux, fait d’une multitude anarchique de tourelles, de coursives, de chemins de ronde et de passages dérobés. Clémence, dix-sept ans, bricoleuse de génie, rafistole le domaine au volant de son fidèle tracteur ; Pierre, quinze ans, hypersensible, braconne dans les hauts plateaux ; Léon, le père, vigneron lyrique et bagarreur, voit ses pouvoirs décroître à mesure que la vieillesse le prend ; Diane, la mère, essaie tant bien que mal de gérer la propriété. Ruinés, ils sont menacés d’expulsion. Et la nature autour devient folle : des hordes de chevreuils désorientés ravagent les cultures. Frondeurs et orgueilleux, les Testasecca décident de défendre coûte que coûte le château.
Critique : Si Avant la longue flamme rouge mettait en scène Saravouth, véritable héros anonyme de la guerre du Cambodge, ombre de tous ceux qui ont dû faire face aux langues du feu Khmer, ce nouveau roman de Guillaume Sire s’éloigne de toute réalité pour embrasser un univers oscillant entre conte et vraisemblance.
L’auteur mène le lecteur sur les terres de son enfance, érige mythes et châteaux pour mieux faire revivre ses souvenirs. Montrafet est le véritable protagoniste de ce livre, citadelle qui veille sur les personnages, les quatre Testasecca. Léon, Diane, Pierre et Clémence sont les dignes descendants des bâtisseurs de ces contreforts et ils tentent de maintenir leur maison si atypique en état, à grand renfort de béton, de ciment et d’étais, transformant ainsi la demeure en patchwork étonnant, ce qui n’est pas du goût des autorités. Celles-ci craignent en outre que les murs ne s’effondrent, ensevelissant la famille sous des pierres remblayées par la fille aînée, bricoleuse en chef et forte-tête. Tous paraissent sortis d’un livre d’images, stéréotypés, sortes de figures totémiques qui permettent à Guillaume Sire de se replonger dans des réminiscences envoûtantes, de faire renaître la nature et les bois où il se cachait, petit. Les descriptions du ciel et de la terre, de l’herbe et des fleurs, des arbres et des remparts ont quelque chose de magique, tissent un sortilège qui emprisonne le lecteur autant que les héros. Ces derniers, peut-être du fait de leur manque de profondeur et de réalisme, ne sont pas attachants, malgré leur quête. Certes touchants, tous leurs efforts apparaissent comme vains dès les premières pages, portés par un père qui a perdu sa stature de demi-dieu bagarreur, même dans le regard de ses enfants. L’alternance de focalisation ne parvient pas à pallier cette distance qui s’instaure d’emblée entre eux et nous, récepteurs de ces pages pourtant fabuleuses à bien des égards. Certains détails sont de trop, brouillent les tentatives de création de toute une mythologie grandiose, sans doute un peu trop timide, passant trop au second plan. C’est sur ce combat acharné des protagonistes pour garder leur château, pour leur dignité, que Guillaume Sire a choisi de s’attarder, alors que cette histoire semble presque un prétexte, afin de faire éclore légendes et métaphores poétiques empreintes de merveilleux.
Paradoxal et non dénué de défauts, ce roman n’en rappelle pas moins que l’auteur sait manier les mots mieux que personne et créer une atmosphère aux accents oniriques. La puissance d’Avant la longue flamme rouge n’est pas présente, mais la langue a presque gagné en assurance et en beauté dans les quelques magnifiques – et trop rares – envolées qu’offre l’auteur.
Guillaume Sire - Les contreforts
Calmann Levy
136 x 215 mm
352 pages
19,90 euros