Le 7 août 2017
Ni série B bas de gamme, ni chef-d’œuvre intemporel, ce film plus ambigu qu’il n’y paraît bénéficie d’un scénario et d’une mise en scène par moments inspirés.
- Réalisateur : Mark Robson
- Acteurs : Russell Wade, Edith Barrett, Ben Bard, Richard Dix, Edmund Glover
- Genre : Drame, Thriller, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h09mn
- Titre original : The Ghost Ship
- Date de sortie : 10 août 1951
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– Année de production : 1943
Résumé : Fraîchement sorti de l’école navale, Tom Merriam embarque comme officier sur le cargo "Altaïr". Il ne tarde pas à se rendre compte que le capitaine Stone qui dirige le navire est un homme dangereux et sadique, s’arrogeant le droit de vie et de mort sur son équipage.
Notre avis : Réalisé avec très peu de moyens, sans vedettes, ce deuxième film de Mark Robson joue sur l’atmosphère à la limite du fantastique et fait preuve d’une certaine ambition, malgré quelques handicaps, dont la fadeur du héros, l’inexistant Russell Wade, ou des transparences approximatives. Dès le début, de manière très classique, le scénario sème des éléments qui seront autant de pistes à venir : l’aveugle qui prédit des coups durs, la voix intérieure du marin muet, un autre qui meurt avant de partir : autant d’annonces qui créent une ambiance lourde que la suite, évidemment, confirmera. Le protagoniste, Tom Merriam, fait ses débuts en tant que « troisième officier » ; ses premiers pas sur le bateau sont relativement plaisants, et le capitaine voit en lui son double. Mais bien sûr, tout change très vite (le film ne dure qu’à peine plus d’une heure, ce qui contribue sans nul doute à son efficacité).
Hormis quelques rares temps morts, le film déroule avec une logique implacable ses péripéties qui enfoncent peu à peu Merriam dans une nasse habilement préparée : deux incidents (le crochet dangereux, l’opération de l’appendicite), apparemment sans conséquences, révèlent le caractère sadique du capitaine en même temps qu’ils forment un piège inattendu. Si, comme le disait Hitchcock, plus réussi est le méchant, meilleur est le film, alors Le vaisseau fantôme n’a rien d’une médiocre série B : Robson a en effet soigné son capitaine, lui réservant des éclairages expressionnistes, des cadrages et des points de vue saisissants ; ainsi quand les marins se débattent pour arrimer le crochet, une plongée verticale, quasiment l’œil de Dieu, restitue-t-elle sa volonté de puissance. De même ses apparitions sont-elles à la lisière du fantastique, toujours débouchant du hors-champ pour surprendre ceux qui ne sont pas de son camp. Mais le cinéaste bénéficie également de la performance de Richard Dix, dont le sourire glaçant, les théories fumeuses sur l’autorité ou le combat intérieur valent le détour. La progression de sa folie, qui passe par un aveu à la femme qu’il aime, est magnifiquement rendue par un jeu qui frôle la caricature sans y céder.
On regrettera la fadeur du personnage féminin et de quelques dialogues, mais la tension qui imprègne le film emporte le morceau. D’autant que de belles idées scénaristiques, comme le destin du télégramme ou la chanson joyeuse pendant le combat mortel, ou des trouvailles de mise en scène (ce qui concerne le capitaine, bien sûr, mais aussi, par exemple, la fin en ombres chinoises) compensent largement le manque évident de moyens. Reste que, derrière cette histoire efficace et relativement sobre, on sent affleurer une ambition qui dépasse largement le cadre aventureux : la réflexion sur le pouvoir (et le pouvoir absolu) demeure modeste, mais le mystère du marin muet qui « entend les choses que les autres n’entendent pas » et qui consolide la foi en l’homme de Merriam est plus intrigant ; son visage marqué dissimule peut-être un secret singulier : ne maîtrise-t-il pas l’incarnation du mal malgré son physique fluet ? Bien sûr, rien n’est dit, mais on a le sentiment qu’il est le vrai personnage fantastique du film, une manière d’ange venu contrer la présence maléfique, un sauveur qui conclut que « tout est bien ».
Dans la filmographie très inégale de Mark Robson, où le meilleur (Bedlam ou Plus dure sera la chute, par exemple) côtoie le pire, Le vaisseau fantôme tire le meilleur parti d’une atmosphère noire et d’un scénario très dense et se hisse sans efforts au-dessus du film d’aventures conventionnel même si, convenons-en, on est loin du chef-d’œuvre oublié.
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