Le temps qui reste
Le 12 février 2022
Meilleure adaptation du roman d’Oscar Wilde, ce film de studio hollywoodien est typique du raffinement esthétique d’Albert Lewin, petit maître du cinéma américain.
- Réalisateur : Albert Lewin
- Acteurs : Angela Lansbury, George Sanders, Hurd Hatfield, Donna Reed, Peter Lawford
- Genre : Drame, Fantastique, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Warner Bros. France
- Durée : 1h50mn
- Date télé : 12 février 2022 00:35
- Chaîne : France 3
- Reprise: 2 décembre 2015
- Titre original : The Picture of Dorian Gray
- Date de sortie : 17 septembre 1947
Résumé : À Londres, en 1866, Basil Hallward peint le portrait d’un séduisant jeune homme, Dorian Gray. Ce dernier s’amourache de Sybil Vane, une chanteuse de cabaret, mais les conventions rigides de son milieu le font rompre et elle se suicide. En rentrant chez lui, il trouve que son portrait a une expression plus dure, presque cruelle.
Critique : Unique roman d’Oscar Wilde, Le Portrait de Dorian Gray a été porté plusieurs fois à l’écran mais l’adaptation d’Albert Lewin, produite par la MGM, est de loin la meilleure. Le film est fidèle aux éléments narratifs et à la portée du livre, si ce n’est que deux personnages ont été ajoutés, Gladys Hayward (Donna Reed) et David Stone (Peter Lawford). Sans doute cet apport a-t-il été imposé par les producteurs, pour donner un cadre sentimental traditionnel plus rassurant au sein d’un récit d’une noirceur totale. On a souvent comparé le roman à La Peau de Chagrin de Balzac ou au mythe de Faust, de par l’idée de pacte maléfique et sa réflexion sur le temps qui passe. Wilde, accusé en son temps de débauche et de perversion, a créé ses doubles avec les figures de Lord Henry et Dorian, interprétés à l’écran par George Sanders et Hurd Hatfield. La censure que dut affronter Wilde à l’époque victorienne trouve ici un écho avec les rigidités du code Hays hollywoodien. On ne trouvera allusion ni au recours à l’opium (évoqué dans le roman), ni encore moins à l’homosexualité, et les « bas-fonds de Londres » sont filmés de manière elliptique ; seules quelques brèves scènes de beuverie montrent la vie cachée de Gray, et nous ne connaissons sa cruauté morale qu’au vu de ses rapports avec la chanteuse Sybil Vane (Angela Lansbury), le peintre Basil Hallward (Lowell Gilmore) et le chimiste Allen Campbell (Douglas Walton).
Mais comme souvent dans le cinéma de l’époque, cette (auto) censure s’accorde avec un art de la suggestion rendant encore plus trouble le comportement de Dorian. Le visage angélique de l’acteur, dont on connaît la dualité sans en cerner la réelle ampleur, est ici à rapprocher du joli minois de Simone Simon, femme-panthère dans La Féline, réalisé trois ans plus tôt par Jacques Tourneur pour la RKO. Cette version du roman de Wilde, outre le dense matériau littéraire dont elle est tirée, vaut également et surtout pour sa splendeur visuelle et son épure. Albert Lewin, esthète de Hollywood, se montre réalisateur inventif et inspiré dans son traitement de l’onirisme, comme il le sera dans Pandora (1951), son film le plus célèbre, avec Ava Gardner. On louera particulièrement la beauté du noir et blanc de Harry Stradling (récompensé aux Oscars), avec quelques incursions en couleur quand la caméra s’approche du tableau. Ce procédé, novateur pour l’époque, n’est pas la moindre des surprises visuelles de ce poème cinématographique.
– Sortie américaine : 3 mars 1945
– Oscars 1946 : Meilleure photo noir et blanc
– Golden Globes 1946 : Meilleure actrice dans un second rôle pour Angela Lansbury
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nypcb 27 décembre 2019
Le portrait de Dorian Gray - la critique du film de Lewin
Magnifique. Les acteurs sont magistraux. Hurd Hatfield est simplement divin.