Chercher la femme
Le 9 mai 2006
Esparbec cède à la tentation de la littérature et nous offre un roman désespérément intime à la recherche de la femme absolue.


- Auteur : Esparbec
- Editeur : LA MUSARDINE
- Genre : Roman & fiction, Érotique

L'a lu
Veut le lire
Esparbec écrit un "vrai livre", nous dit-on ! La Musardine avait en fait déjà publié ce texte il y a quelques années. La version qui paraît aujourd’hui, entièrement revue par l’auteur, remet au premier plan non pas "un vrai livre", - ce serait, au nom du roman de gare, renier une œuvre qui a su faire de la pornographie un genre littéraire - mais plutôt un texte intime, personnel, souvent bouleversant, parfois désespéré. Le pornographe et ses modèles est une vaste mise en abîme de l’auteur face à ses démons et cette incapacité à "écrire autre chose", à être "un vrai écrivain".
Le tableau pourrait être classique, le mari, la femme, l’amant, mais Esparbec fuit comme la peste les sentiers battus du sexe et pervertit d’emblée le trio classique. Autour de l’amant, un fils et une mère vont s’aimer et se déchirer dans un ballet mortifère où vont naître et s’enraciner les fantasmes. Les modèles, ce pourraient être ces femmes auprès desquelles l’auteur va revivre le traumatisme originel dans une remise en scène jamais achevée de souvenirs d’enfance. Le décor, c’est la Tunisie des années cinquante, la lagune putride de la banlieue de Tunis, dont les remugles se mêlent aux odeurs de sexe et de parfums de luxe ou de bazar, où l’intimité n’existe plus et cède la place à une érotisation du quotidien jusque dans ses détails les plus scabreux. Esparbec joue, avec nous, avec lui-même, avec ses souvenirs, avec ces femmes qui ne sont que des pages blanches sur lesquelles il va réécrire le fantasme pour en traquer l’origine. Il se met en scène, se flagelle, se hait, s’immole, mais en revient toujours à la figure de Magda, la mère, qui se profile, indéfectible, derrière toutes les femmes qui s’offrent.
L’auteur nous plonge, sans ménagements, parfois jusqu’à la nausée, dans la recherche désespérée d’une femme absolue, impossible, qui serait tout à la fois mère, épouse et amante, la maman et la putain, la grotte originelle où l’on pourrait se perdre et qu’il cherche toujours plus loin, toujours plus douloureusement, d’un vagin l’autre.
Esparbec, Le pornographe et ses modèles, La Musardine, 2006, 317 pages, 18 €