Le 4 septembre 2019
Avec cette nullité stratosphérique, Bernard-Henri Lévy prouve que prétention et grand spectacle peuvent engendrer le rire involontaire. Comme le produit d’une punition immanente.
- Réalisateur : Bernard-Henri Lévy
- Acteurs : Lauren Bacall, Alain Delon, Marianne Denicourt, Jean-Pierre Kalfon, Arielle Dombasle, Francisco Rabal, Karl Zéro, Xavier Beauvois
- Genre : Comédie dramatique, Nanar
- Nationalité : Espagnol, Français, Canadien, Belge
- Distributeur : Mars Distribution, MKL
- Date de sortie : 12 février 1997
- Festival : Festival de Berlin 1997
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Résumé : Alexandre, écrivain veillissant qui n’a plus d’inspiration, vit, reclus dans une hacienda délabrée, au coeur du Mexique. Laure, jeune actrice qui rêve d’incarner à l’écran l’héroine de son premier roman, arrive un beau matin de Paris, pleine d’espoir, prête à le seduire et insoucieuse du destin qui la guette.
Critique : Il n’est pas donné à tout le monde d’obtenir le titre honorifique du plus mauvais film français "depuis 1945". Et pourtant, Le jour et la nuit le remporta à l’époque, grâce aux Cahiers du cinéma.
Et Max Pécas, Philippe Clair, Jean Girault ou Robert Lamoureux ?
Balayés. Par la grâce d’une grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf. Si à l’époque les sardoniques Gérard avaient existé, ils se seraient transformés en Bernard et cette incroyable navet aurait certainement tout raflé. En fait, on ne sait par quel bout prendre ce film, qui n’a ni queue ni tête, puisque comme l’écrivait Baudelaire, tout y est à la fois queue et tête.
L’inénarrable BHL, dévoré par son hubris, convoqua pour ce projet pharaonique, au budget indécent, un acteur à sa démesure, oubliant peut-être qu’au moment d’entamer cette pitoyable mascarade cinématographique, Alain Delon venait d’enchaîner les mauvais films. Le philosophe le fit entrer dans une auberge espagnole de l’actorat, qui va de l’ancienne star hollywoodienne Lauren Bacall à Xavier Beauvois, en passant par Marianne Denicourt et Jean-Pierre Kalfon, jusqu’à l’animateur Karl Zéro, dont la prestation en tant que producteur donnerait envie de se finir à la tequila.
L’ancien trublion de Canal+ est tellement pitoyable qu’à tout instant on s’attend à voir son ancien acolyte Albert Algoud faire irruption dans le champ. Quant à Arielle Dombasle, la muse du penseur, elle passe son temps à minauder en se prenant pour Ava Gardner. De son côté, Alain Delon donne le ton dès la première scène : il apparaît et disparaît en montgolfière, la star surplombant d’une hauteur inégalée la masse des petits hommes qui s’agitent sur la terre ferme. En vérité, le comédien inoubliable de Visconti, Melville ou Losey a cédé la place à la marionnette des Guignols.
Comme une métaphore ne fait pas un film de quasiment deux heures, il s’agira de ramener l’écrivain qu’incarne la star française sur le même sable que foulent ses admirateurs. Hélas, pas plus dans les nuages que sur le plancher des vaches, le héros ne se départit de sa morgue sentencieuse, qui l’exhorte à parler comme si chaque réplique était une leçon définitive assénée à une humanité misérable. Mais puisqu’il n’est pas exclu qu’une intelligence éthérée fasse bon ménage avec le désir plus prosaïque de la chair offerte, l’auteur couchera évidemment avec l’actrice qui doit jouer un de ses personnages sur grand écran. Et puis, il piquera des crises homériques devant une assemblée recueillie, parce qu’il n’est de génie qui ne se paie d’une folie délirante, nous dit Bernard-Henri Lévy. Et puis, il rossera, par le noble art, le jeune blanc-bec qui s’agite dans des milieux interlopes, flirte avec une délinquance locale.
Quelques-uns - surtout les critiques de cinéma - se sont demandés, à l’époque, s’il était raisonnable de confier une caméra à BHL, qui n’échappe donc pas à la malédiction des auteurs, ivres de leur talent, le croyant transférable à d’autres formes d’expression artistique, ambitionnant de devenir de grands metteurs en scène... et sont tombés d’une hauteur équivalente à leurs délires minables : on pense à Beigbeder ou Gary, pour ne citer qu’eux. Une dernière remarque : Le jour et la nuit a laissé sur la pellicule le faux raccord le plus stupéfiant de toute l’histoire du septième art. Si vous n’avez jamais vu le film, la monumentale erreur vous vaccinera pour l’éternité contre le philosophe prétentieux et ses ridicules gesticulations artistiques.
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