Instinct animal
Le 3 avril 2020
Porté par tout le talent et toute l’humilité de son réalisateur, Le Garçon et la Bête est un chef-d’œuvre du cinéma d’animation et un très grand film d’apprentissage.
- Réalisateur : Mamoru Hosoda
- Genre : Drame, Fantastique, Animation
- Nationalité : Japonais
- Durée : 1h58mn
- Date télé : 3 avril 2020 20:40
- Chaîne : OCS Max
- Titre original : The Boy and the beast
- Date de sortie : 13 janvier 2016
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Porté par tout le talent et toute l’humilité de son réalisateur, Le Garçon et la Bête est un chef-d’œuvre du cinéma d’animation et un très grand film d’apprentissage.
L’argument : Shibuya, le monde des humains, et Jutengai, le monde des Bêtes... C’est l’histoire d’un garçon solitaire et d’une Bête seule, qui vivent chacun dans deux mondes séparés. Un jour, le garçon se perd dans le monde des Bêtes où il devient le disciple de la Bête Kumatetsu qui lui donne le nom de Kyuta. Cette rencontre fortuite est le début d’une aventure qui dépasse l’imaginaire...
- © Gaumont Distribution
Notre avis : Il n’est plus besoin de présenter la grande figure du cinéma d’animation japonais qu’est Mamoru Hosoda. Déjà son premier long-métrage indépendant, La Traversée du temps, posait les jalons d’une œuvre originale et novatrice, ancrée dans les traditions culturelles de son pays, tout en étant tournée vers l’avenir du monde et de la société. C’est donc naturellement qu’il est devenu, en quelques années, l’un des cinéastes les plus reconnus au monde.
Quatre ans après Les Enfants loups : Ame et Yuki, portrait bouleversant d’une mère courage luttant pour la survie et l’intégration de ses progénitures, le réalisateur signe, avec Le Garçon et la Bête, son film le plus complexe et le plus abouti, entraînant le spectateur dans un voyage initiatique mouvementé et passionnant.
En pleine soirée, alors que la population rentre de sa journée de travail, un jeune orphelin s’enfuit dans les rues sombres de la ville, hurlant de tristesse et de haine. Cherchant à s’émanciper d’une existence qu’il juge plus qu’injuste, il traverse une porte interdimensionnelle, et se retrouve perdu dans le monde des bêtes, laissant derrière lui une ombre de ténèbres, de colère et de douleur. C’est là qu’il rencontre Kumatetsu, un ours mal léché (au sens propre comme au sens figuré), qui décide de le prendre sous son aile et de l’initier aux techniques de combat. Kumatetsu sait pourtant que les humains n’ont pas leur place au sein de la communauté animale. Malgré cela, le jeune apprenti, appelé Kyuta par son maître, décide de rester et de se battre pour prouver qu’il est digne de sa terre d’adoption.
- © Gaumont Distribution
Avec ses animaux doués de parole et sa fantasmagorie enchanteresse, Le Garçon et la Bête rappelle les fables de La Fontaine et les contes de Perrault, qui s’appliquent à éduquer la jeunesse en la faisant rêver. C’est ce même procédé qu’utilise Mamoru Hosoda, pour aborder des concepts philosophiques, sociaux et humanistes, illustrés de manière très ludique par chaque plan et chaque dialogue du film.
En premier lieu, le dualisme opposant l’homme à l’animal conditionne l’intrigue, la lance, lui donne son ton. Kyuta et Kumatetsu ont chacun un caractère bien trempé, assaisonnant leurs dîners d’insultes et de courses-poursuites quand ils ne s’affrontent pas à coups de poings, de pieds et de sabres. Cependant, aux différends caractériels, culturels et identitaires s’ajoutent des conflits internes propres aux deux protagonistes : Kumatetsu veut accéder au trône du Seigneur des bêtes – un vieux lapin sage en kimono rouge et jaune – que son grand rival Iōzen convoite également, tandis que Kyuta va et vient entre le monde des humains et celui des bêtes, cherchant à savoir qui il est vraiment. Le voyage initiatique du garçon se mue peu à peu en véritable parcours d’apprentissage, semé d’embûches pour lui comme pour son maître ; parcours que les deux amis de Kumatetsu, un singe espiègle et un cochon réfléchi, ne manquent pas de commenter. Le spectateur prend plaisir à voir l’enfant tête de mule grandir autant qu’il aime à voir l’ours grognon s’assagir.
Pourtant, si l’apprivoisement mutuel de deux êtres que presque tout oppose est touchant, comme dans les histoires pour enfants, on n’est pas à l’abri d’un nuage noir qui viendrait assombrir une belle éclaircie dans le ciel du récit.
- © Vértigo Films
Si Mamoru Hosoda sait illustrer l’apprentissage, l’éducation et l’évolution dans l’âge, il montre également, avec beaucoup de subtilité, la fragilité des hommes. Leur tendance à l’auto-corruption est ici représentée par un trou noir, logé en pleine poitrine, qui aspire insatiablement l’âme de ses victimes. Mais même dans les moments les plus sombres de son film, Hosoda parvient encore à fasciner son public, grâce à la finesse de ses dessins, à l’harmonie des couleurs qui les composent, et à la précision des mouvements donnant vie aux décors et aux personnages – comme cette terrible séquence catastrophe, où une baleine géante fait irruption dans la ville, détruisant tout sur son passage. Face à tant de noirceur et de violence, une seule question se pose : l’amitié, le courage et l’amour triompheront-ils encore ?...
- © Gaumont Distribution
Alors qu’il semblait déjà avoir atteint la perfection avec Summer Wars, véritable Guerre des mondes contemporaine entre l’humanité et la cybercriminalité, Mamoru Hosoda arrive, avec Le Garçon et la Bête, au sommet de son art, traitant toujours plus de notions métaphysiques complexes (le bien et le mal, la bravoure, la famille, la religion…), exprimées, dans un registre poétique et onirique, par des images très simples et visuellement superbes.
Original et follement inventif, embrassant fougueusement la fantaisie de l’imaginaire et du merveilleux, Le Garçon et la Bête est un conte de fées suspendu dans l’espace et le temps, une aventure magnifique qui ravira petits et grands.
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