Le Dernier Quai – Nicolas Delestret - la chronique BD

Critique : Cette histoire surnaturelle déroule une intrigue que l’on pense anticiper jusqu’à ce qu’on se retrouve pris dans un récit qui nous réserve de belles surprises. Emile, le majordome qui tient sa routine et son hôtel, devient rapidement un personnage attachant. Son côté serviable qu’il maintient contre vents et marées, malgré tout le désordre qui s’abat sur l’hôtel, semble absurde. Mais cela lui permet de tenir le coup dans ce lieu dotée d’une seule règle : les clients de l’hôtel doivent se délester de leur derniers regrets afin de pouvoir partir. Sinon, un destin plus sinistre les attend.

Les chapitres nous entraînent de plus en plus loin, alternant avec des flashbacks sur les clients de l’hôtel, savamment utilisés, qui apparaissent régulièrement sans jamais nuire à la tension dramatique de l’histoire. La dénouement inattendu de l’intrigue est, passé la surprise, une jolie fin.

Cette BD offre une réflexion sur ce que l’on peut faire de sa vie, comment nos actions changent les choses, et aussi sur la perception que nous avons de nous-même. Ces fameux regrets à abandonner sont plus que des regrets, il s’agit des événements, des moments de nos vies qu’il faut savoir regarder d’une autre manière, pour mieux les comprendre et les accepter. Tous les personnages de l’hôtel doivent apprendre finalement à digérer leurs passé, bon comme mauvais, pour s’en délester. Et c’est souvent cela le plus dur.

Nicolas Delestret / Grand Angle

Nicolas Delestret tient les pinceaux aussi bien que la plume. Ses personnages tout en rondeur sont variés et nous offre un beau panel de visages et d’expressions. Les décors font ressortir le côté faussement paisible des lieux. Le dessin précis nous garde sans cesse aux côtés des personnages, tandis que les couleurs vives amènent les ambiances tour à tour sereines et inquiétantes de cet endroit.

La composition soignée laisse de l’espace dans des cases aérées où le rythme est porté par les cadrages choisis. Cette BD, très visuelle, est vraiment agréable à lire. Les cases aux contours ondulés sans bordure contribuent à la légèreté des planches, contrastant avec la force et le poids de l’intrigue.

Le Dernier Quai nous offre une belle histoire avec des personnages réussis qu’on prend plaisir à suivre dans cet hôtel mystérieux cerné par une forêt angoissante. Une intrigue bien menée qui nous fait réfléchir à nos propres vies.