Le 25 février 2024
Le premier grand film historique de Michael Mann. Les débuts d’une série somptueuse sur l’histoire des États-Unis…
- Réalisateur : Michael Mann
- Acteurs : Jodhi May, Daniel Day-Lewis, Patrice Chéreau, Dylan Baker, Pete Postlethwaite, Colm Meaney, Steven Waddington, Madeleine Stowe, Wes Studi
- Genre : Aventures, Action, Historique, Romance
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Splendor Films , AMLF Distribution
- Durée : 1h54mn
- Date télé : 17 novembre 2024 20:50
- Chaîne : TCM Cinéma
- Reprise: 25 décembre 2024
- Titre original : The Last of the Mohicans
- Date de sortie : 26 août 1992
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– Reprise en version restaurée : 25 décembre 2024
Résumé : En 1757 dans l’État de New York, alors que la guerre fait rage entre Français et Anglais pour l’appropriation des territoires indiens, un jeune officier anglais, Duncan Heyward, est chargé de conduire deux sœurs, Cora et Alice Munro jusqu’à leur père. Ils sont sauvés d’une embuscade par Hawkeye, un frontalier d’origine européenne, élevé par le Mohican Chingachgook et son fils Uncas. Les trois hommes acceptent d’escorter les deux jeunes filles jusqu’à leur destination.
Critique : Après s’être spécialisé dans les films policiers ultra documentés tels que Le Solitaire et Le Sixième Sens, puis sur l’ébauche du chef d’œuvre Heat (nommé L.A Takedown pour la télévision), on n’attendait pas forcément Michael Mann aux commandes d’un film historique rapidement étiqueté "film en costumes". Mann s’était déjà essayé à la reconstitution historique avec La Forteresse noire, une parabole sur le mal peignant le destin d’une troupe de soldats allemands de la Seconde Guerre mondiale, décimée par une présence maléfique au sein de ladite forteresse, mais sous un angle fantastique. Cette fois, le metteur en scène opte pour un cadre diégétique se situant dans les années 1700 et pose sa caméra face à d’amples mouvements de troupes, filmés en plans larges à grand renfort de panos majestueux rappelant ceux du Stanley Kubrick de Barry Lyndon. Mais ce qui frappe dès les premiers plans, c’est cette propension à capter la nature dans sa globalité par un tournage en décors naturels. L’insertion visuelle du spectateur au sein du microcosme se fait le temps de panos sur des forêts à perte de vue se ponctuant par un tilt, lui-même dominé par la superposition sonore du thème extra-filmique de Trevor Jones. Dès l’ouverture, Michael Mann annonce un cinéma du sensitif et du romanesque. Il serait alors réducteur de penser que l’auteur se laisse aller à une vision purement descriptive du conflit entre ces peuples qui ont façonné l’histoire de son pays. Là où Kubrick faisait de son long métrage une dénonciation des travers de la société bourgeoise, Mann va privilégier l’accusation d’un pouvoir qui recherche la maîtrise d’un territoire par le mensonge et la privation de liberté.
- © 2024 Splendor Films. Tous droits réservés.
Car c’est bien de mensonge et de facétie dont il est question dans Le Dernier des Mohicans. Le général Munro ne respectera aucun des engagements de la Couronne quant à la protection des populations locales, Magua dissimulera jusque tardivement la raison de sa haine envers le général susnommé puis, les dissensions relatives aux crédits à apporter aux promesses faites feront même des éclats entre Duncan Heyward et sa hiérarchie. Aussi, cette dénonciation sert un propos bien connu des admirateurs du cinéaste, c’est celui de l’humanisme ! Pas un instant le réalisateur ne va perdre de vue cette problématique de la place de l’Homme au milieu des combats livrés pour une nature, qui par ailleurs se suffit à elle-même. Mann le rappellera fréquemment lors des batailles dont les plans de coupes filmés à l’épaule se concluront souvent par des décadrages sur les espèces végétales alentour. On sait depuis Révélations que l’intrusion des pouvoirs dans l’intimité des populations est un des sujets de préoccupation du réalisateur. En 1992, dans Le Dernier des Mohicans, il est plus question des manquements de ce pouvoir, lui-même en plein combat pour son instauration. Et pour immerger pleinement son auditoire dans l’appréhension des ces choses, le maître d’œuvre va transcender l’histoire d’amour, passage obligé de ce type d’ouvrage, par les doubles sens qu’il donne à chaque scène, voire à chaque séquence.
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La réussite du Dernier des Mohicans, ce qui en fait un film essentiel autant comme pièce autonome que comme une pierre complémentaire à l’édifice de la filmographie éclatante de sens de Michael Mann, c’est son aboutissement esthétique. « Je n’ai pas voulu prendre une histoire datant de 1757 et la transposer en 1991, pour en faire une métaphore de l’époque actuelle […] c’est tout le contraire : utiliser notre compréhension de ces cultures et utiliser une perspective contemporaine pour nous faire revivre plus intensément la réalité complexe de cet univers », clamera le metteur en scène lors de la sortie du film. Une scène clef résume d’ailleurs le fonctionnement du film dans sa globalité et ce sens des métaphores permanentes : alors qu’au soleil couchant l’horizon est en train de s’embraser, Œil de Faucon étreint Cora au moment où le thème du film envahit l’espace sonore. La scène déploie trois axes de lecture caractérisant parfaitement la façon dont chaque séquence résonne en termes de signifiant. Un aspect esthétique, tout d’abord, rendant directement hommage à Thomas Cole et Albert Bierstatd. Un entêtant thème extra-diégétique, ensuite, qui rappelle que chez Mann tout est un éternel recommencement (la roue qui tourne lors de la première apparition de Cora en est la parfaite mise en abîme, reflet du pessimisme qui imprègne l’œuvre du maître)... Et finalement, un évident aspect poétique du monde en conflit qui s’embrase autour des amants. Avec cette permanence des multiples niveaux de lecture, le Dernier des Mohicans est une réussite absolue. Le film relève le défi de combler les attentes dressées par les grands films d’aventures hollywoodiens, tout en ménageant des plages de pauses contemplatives et métaphysiques magnifiées par un auteur au sens du signifiant et esthétisant plus qu’aigu. Somptueux !
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