Une vie simple
Le 13 avril 2015
Un film contemplatif peignant avec grâce la campagne bourguignonne. Un subtil témoignage d’un couple au bord de la vie et du temps. Une œuvre magistrale qui connaît enfin la sortie qu’elle mérite, 40 ans après avoir été achevée.
- Réalisateur : Dominique Benicheti
- Acteurs : Jules Guitteaux, Félicie Guitteaux
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Durée : 1h31mn
- Date de sortie : 15 avril 2015
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– Année de production : 1973
– Prix spécial du jury - Festival du film de Locarno 1973
Un film contemplatif peignant avec grâce la campagne bourguignonne. Un subtil témoignage d’un couple au bord de la vie et du temps. Une œuvre magistrale qui connaît enfin la sortie qu’elle mérite, 40 ans après avoir été achevée.
L’argument : Dans la campagne bourguignonne vit un couple d’octogénaire. Jules est un forgeron et passe ses journées à créer des objets en fer. Sa femme, Félicie, s’occupe du potager, prépare leurs repas et partage avec lui le café du matin dans la forge. La simplicité de leur routine quotidienne nous immisce dans l’intimité d’une relation de toute une vie…
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Notre avis : : Le cousin Jules est tout d’abord une idée qui naît dans l’esprit de Dominique Benichetti au milieu des années 60, alors qu’il est encore à l’Institut des Hautes Etudes Cinématographiques : filmer le travail d’un maréchal-ferrant. Il décide de sauter le pas à partir de 1968 et de concrétiser son souhait de faire un documentaire. Il ne s’agit toutefois pas de filmer caméra au poing en 8mm, mais de tenter l’aventure d’une technique récente à l’époque : celle du long métrage en Cinémascope 35mm avec un son stéréo magnétique couché sur la pellicule. Le réalisateur, animé d’une volonté de capter le temps qui passe, ne se contentera pas de quelques jours de tournage ; il posera sa caméra de nombreuses fois dans cette ferme bourguignonne entre 1968 et 1973 pour fixer sur la pellicule les saisons. Ce féru de technique ne se satisfera pas plus de plans fixes pour raconter l’histoire de ce couple ; il se livrera a un très beau travail sur la photographie et aura recours au travelling pour donner vie à cette campagne, figée dans un autre temps, et mieux accompagner ses personnages dans leur quotidien. L’un des deux directeurs de la photographie, Pierre-William Glenn (La nuit américaine, Loulou, Le Prix du Danger, et accessoirement, futur réalisateur de Terminus) qui succédera à Paul Launay ancien professeur du réalisateur, s’amusera d’ailleurs de l’agitation qui pouvait régner sur le tournage : Dominique Benichetti souhaitant s’occuper de tout pour gérer les aspects techniques du film.
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L’intransigeance du réalisateur aura finalement raison du film ; destiné, par son sujet, essentiellement aux salles d’art et essai, ses caractéristiques techniques le privèrent de projections, faute de trouver des lieux disposant d’un équipement adéquat. Il faudra finalement attendre 2013, après une restauration qui débuta en 2011, pour que le film, soit quarante ans après sa réalisation, puisse bénéficier d’une première distribution aux États-Unis.
Toutefois, si le seul argument de ce film était la technique, il aurait été oublié depuis longtemps. Et c’est là où réside sa magie et le savoir-faire du réalisateur ; le procédé n’est bien ici qu’un moyen au service de l’Art.
Ce qui marque l’esprit, c’est l’aventure humaine qu’il nous est donné de voir. Celle d’un couple, que l’on peut supposer heureux et uni, qui, à l’aube de sa vie, nous offre le témoignage d’une époque.
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Il s’agit d’un film au bord du temps. La modernité propre aux années 70 ne pointe ici que discrètement, par touches : une fourgonnette Citroën type H au détour d’un chemin, un poteau télégraphique dans le lointain, la lumière issue d’une ampoule… Il s’agit également d’un film au bord de la vie ; celle finissante d’une génération sur le point d’être révolue, portée par la routine du quotidien qui, tel le volant de cette perceuse ancestrale magistralement filmé par Dominique Benichetti, permet au mouvement de perdurer encore quelques instants, alors que plus rien ne l’anime réellement. La mort n’est pas loin, elle rode en hors champ. Malgré la disparition de l’un des protagonistes, emporté par la faucheuse dont l’intervention est subtilement mise en scène, le réalisateur poursuit d’ailleurs la captation de ces images et ce témoignage.
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Ce film a frappé les esprits des rares qui le croisèrent durant ses quarante ans. Ses voyages à travers le monde lui permirent en effet d’être sélectionné dans de nombreux festivals (Moscou en 1973, Los Angeles en 1974, New York en 2012, Istanbul en 2014) dont celui de Locarno, en 1973, où il remporta le prix spécial du jury. Étonnamment précurseur, il reviendra en mémoire au spectateur regardant ce métrage, les images de Profils Paysans de Depardon, sorti en 2001.
Pour ceux qui sont prêt à tenter l’expérience, il ne faut pas hésiter à pousser la porte de son cinéma pour enfin profiter de ce documentaire, bénéficiant d’une belle restauration 2K, réalisée d’après le négatif original 35 mm.
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