Le ciel étoilé au-dessus de ma tête - la critique du film

Notre avis : Ilan Klipper fait ses premiers pas de réalisateur grâce aux documentaires. Après une incursion dans le monde de la justice avec un diptyque sur la police Flics et Commissariat et la web-série Les Affaires familiales pour Arte, il explore également la psychiatrie avec le documentaire Ste Anne, suivi de Juke Box dans lequel le chanteur Christophe incarne un musicien en lutte avec ses démons intérieurs. Car rien ne fascine plus Ilan Klipper que de regarder vivre cette minorité qui ose se lancer dans une vie hors cadre pour ne se consacrer qu’à sa passion créative au risque d’être rangée dans la catégorie des fous par ceux qui ont fixé les règles de la normalité. C’est ainsi qu’à travers cette tragi-comédie, tournée en douze jours, il nous invite dans l’univers de Bruno entre errance psychique et créativité.

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Le cheveu hirsute, torse nu, notre héros, la cinquantaine bien tassée erre chez lui sans but. Il joue sur les réseaux sociaux, sirote son thé et laisse la rêverie envahir son existence. Ce qui se passe à l’extérieur ne l’intéresse nullement. Il en a quelques bribes grâce à sa colocataire (la pétillante Alma Jodorowsky) et ça lui suffit amplement. Il n’a qu’une seule préoccupation : faire renaître coûte que coûte l’inspiration qui lui a permis de connaître la gloire il y a déjà plusieurs décennies. Il est persuadé que seuls l’isolement et la réflexion lui permettront de créer l’ébullition créative nécessaire pour y parvenir. Mais ce n’est pas l’avis de ses parents qui s’inquiètent de cette situation qu’ils ne sont pas loin d’assimiler à la folie. Aussi, c’est tout naturellement qu’ils débarquent chez lui un après-midi, accompagnés de son ex-femme, d’un ami et d’une jeune femme qu’il ne connaît pas. Ses parents ayant souvent tenté de lui présenter une éventuelle compagne, il l’identifie comme telle et ne manque pas de déployer tout un arsenal de charme pour la séduire. Mais l’arrivée subite de deux aides médicaux musclés transforme rapidement la douce romance en hospitalisation à la demande d’un tiers (HDT) sans pour autant que le ton ne prenne un tour dramatique.

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Car il s’agit avant tout d’un film solaire qui traite avec humour de la question de vivre sa vie comme on l’entend, indépendamment du regard des autres qui, malgré leur amour, se laissent plus largement influencés par leur attachement instinctif aux conventions que par le respect du choix de chacun. Pourtant, les flash-back incessants dans la vie de Bruno, les plans elliptiques et sombres destinés à nous faire partager le désordre cérébral de cet artiste névrosé plongent régulièrement le spectateur dans un univers cabossé et fantasque oppressant qu’il est agréable de quitter. C’est sans nul doute cette belle galerie de personnages aux caractères multiples qui donne au récit toute sa saveur, à commencer par l’excellent Laurent Poitrenaux dont l’ambivalence savamment orchestrée entre séduction et loufoquerie s’articule juste à point face à une Camille Chamoux inattendue, touchante de douceur et de compréhension. Les rôles secondaires (dont la délicieuse Michèle Moretti) complètent judicieusement cette famille aussi tendre que maladroite.
Un film libre et désordonné évoluant sans cesse entre magie transcendantale et réalité tristement banale qui peut s’enorgueillir de ne rentrer dans aucune case.