Le 16 décembre 2019
Le Casanova de Fellini, long-métrage du maestro italien de l’onirisme, sorti le 3 mars 1977, nous est de nouveau proposé, par Carlotta Films, dans une magnifique version restaurée, en salles depuis le 11 décembre 2019.
- Réalisateur : Federico Fellini
- Acteurs : Donald Sutherland, Tina Aumont, Mary Marquet
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Américain, Italien
- Distributeur : Carlotta Films
- Durée : 2h34
- Reprise: 11 décembre 2019
- Titre original : Il Casanova di Federico Fellini
- Âge : Interdit aux moins de 12 ans
- Date de sortie : 3 mars 1977
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Federico Fellini (1920-1993) est un réalisateur italien iconique, dont la filmographie est impressionnante, pour son approche esthétique, et son volume conséquent, dépassant les vingt longs-métrages. Le Casanova de Fellini est un des films qu’il souhaitait le plus réaliser. C’est chose faite en 1977. Il s’agit d’un pari risqué, puisque le metteur en scène piétine le mythe de ce séducteur italien, dont la renommée va bien au-delà des frontières transalpines. Il en sera par ailleurs puni, en quelque sorte, car le succès ne sera pas, hélas pour lui, au rendez-vous. La profession est moins sévère avec une récompense notable : l’Oscar des meilleurs costumes est attribué au film.
Notre avis : Prenant le contre-pied des Italiens qui adulent Casanova, le réalisateur déteste l’homme comme le mythe. Le Casanova de Fellini met à mal le charme et le charisme du célèbre personnage. Durant tout le film, le séducteur, trop précieux pour être crédible, est déchu de sa superbe. Il est plus le jouet que le marionnettiste des ébats amoureux nombreux auxquels il s’adonne, insatiablement. Sa force s’érode sous une évidente fragilité. Il tombe même amoureux, d’une dénommée Henriette, mais cette dernière lui échappe. Le long-métrage est pourtant, à l’origine, une adaptation, présumée fidèle aux mémoires autobiographiques de Casanova : Storia della mia vita. Or, Fellini cache merveilleusement bien ses intentions, pour être financé. Son projet peine à décoller avec deux producteurs, dont l’immense Dino De Laurentiis, qui finissent par abandonner, faute de s’entendre, avec le réalisateur, sur le choix capital de l’acteur idéal pour incarner Casanova. Des noms prestigieux, comme Marlon Brando ou Robert Redford, sont pourtant évoqués. Le budget du Casanova de Fellini est, également, un immense frein rédhibitoire.
L’année 1975 est, pour Fellini, une délivrance, dans la mesure où Alberto Grimaldi, producteur génial de films comme Le Bon, la Brute, et le Truand (1966) ou bien encore Le Dernier Tango à Paris (1972), accepte de relever le défi pharaonique. Un défi dont il exige un budget cadré et un tournage en anglais de l’autre côté de la Manche. Les deux hommes ne manquent pas de caractère et en arrivent au compromis suivant : le film sera joué dans la langue de Shakespeare, pour une portée internationale, mais au sein des studios de Cinecittà. L’œuvre s’annonce grandiose et son coût explose. Fellini, supplicié, doit sacrifier des scènes entières de son long-métrage. Le navire du Casanova de Fellini échappe, de peu, au naufrage, et le tournage épique se poursuit. La salve écrite, par voie de presse, "Fellini est pire qu’Attila !", d’Alberto Grimaldi, certes jubilatoire, atteste d’une tension très vive, puis moins forte, entre les deux hommes.
Fellini n’épargne personne dans le périple de Casanova, sorte de Monopoly baroque, où le désormais bellâtre, joué brillamment par Donald Sutherland, passe même par la case prison, dont il s’évade cependant. Il va ensuite errer, sans grande fortune, qu’elle soit financière, ou présidant sa destinée, dans une Europe où tout n’est que décadence. Il s’introduit dans divers cénacles, avec parfois des personnages historiques et non fictifs. La musique à propos de Nino Rota, compositeur favori de Fellini, renforce le visage qui se délite, d’une haute société, vautrée au plus profond de sa vacuité, tout juste bonne à s’adonner à des fêtes orgiaques et libertines, en ce XVIIIe siècle décidément grotesque. Federico Fellini est également gargantuesque, avec son appétence pour des décors impressionnants et dévoreurs d’espace, à tel point qu’il occupe presque tout Cinecittà, également envahi par 2500 figurants. Plus sa filmographie avance dans le temps, plus l’onirisme l’emporte sur le réalisme. Par exemple, Fellini ne se préoccupe pas, avec un pointillisme historique exacerbé, des six cents perruques et mille costumes, au service de sa mégalomanie. Il y a un fossé gigantesque entre lui et son contemporain italien Visconti, dans la manière de traiter un sujet, pour ce qui est de la forme. Fellini est, qu’on l’aime ou qu’on le déteste, un cinéaste à part. C’est un citoyen de l’imaginaire. Par conséquent, il ne s’impose aucune limite dans le traitement d’un sujet : la chute de Casanova, dont il est le peintre acerbe, est en une illustration relevée. Le protagoniste atteint le summum du ridicule lorsque il danse avec un automate féminin, puis lui fait l’amour. Il ne se rendra, plus jamais, dans sa Venise chérie, qui l’a vu naître. Il va finir ses jours, comme bibliothécaire, en Bohême, vieillard presque anonyme, ridé plus que débridé, et dont le spectacle ne séduit plus personne. Le Casanova de Fellini se termine par un rêve ; rêve où il s’abandonne, au final, dans les bras d’un automate féminin. Cette triste fin rend la femme idéale chimérique et vaine sa quête éperdue.
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