Le bel été - la critique du film

Notre avis : Le cinéma s’est souvent emparé d’images chocs sur les difficultés des migrants, pour tisser des drames sociétaux propres à éveiller les consciences. Reprenant le même thème, Pierre Creton opte pour un point de vue plus doux où se croisent ambiance bucolique et beauté de la nature.
Face caméra, une femme explique le fonctionnement de l’association dont elle est la présidente. « Des lits solidaires », créée en 2017 dans la région du Havre, assure la prise en charge, par l’intermédiaire de placement dans des familles, de jeunes mineurs isolés venus de l’étranger que l’État laisse à la rue, au prétexte de ne pouvoir s’assurer immédiatement de l’exactitude de leur âge, et donc de leur statut de mineur. Nessim, qui a fui le Soudan, puis Mohamed et Walli, réfugiés de Guinée et du Mali, sont reçus par quelques membres de l’association qui s’efforcent de leur trouver un hébergement.

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Dans un sublime décor de campagne du Pays de Caux, cher au réalisateur, et de bord de mer, vivent Robert et Simon, leur amie Sophie qui prête sa voix au commentaire off, ainsi que la jeune Flora. Nessim, Mohamed et Walli se joignent tout naturellement à eux. Ici, commence une vie en autarcie où il n’est question que de cueillettes, de travaux dans les champs, de récolte de miel et de baignades collectives. Un âne manifeste sa présence, tandis qu’un chien se contorsionne pour goûter la tarte aux pommes abandonnée sur la table. Chacun vaque à ses occupations, en parfaite harmonie avec les autres et rêve à l’avenir. De cette énergie mise en commun autour de différentes activités, naît une forme de bonheur, rythmée par la musique des Liminanas. Pourtant, renvoyés à leur solitude affective, les personnages sont parfois au bord du gouffre. Les cicatrices d’un passé, dont il faut désormais faire abstraction, se réveillent, tandis que désir et pudeur s’entrecroisent autour de relations audacieusement sensuelles.

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Réalisateur à part dans le paysage du cinéma français, Pierre Creton s’ingénie à rassembler patiemment une multitude d’indicibles détails, pour faire naître, sous nos yeux, un microcosme de paix et de sérénité. Il nous sert une composition poétique dont les contours insaisissables et l’hermétisme déconcertent cependant. Cherchant sans cesse son équilibre entre une description de rencontres solidement ancrées dans la réalité, qui la mène aux portes du documentaire, et la confidentialité des dialogues, qui suggère l’ébauche d’un journal intime, le récit se perd dans un climat décousu, pendant que les métaphores se multiplient, que la langueur s’installe et que finalement l’intérêt se dissout.
Victime d’un style affecté, l’amalgame entre intime et politique ne prend pas. Le bel été ne laissera que le souvenir de la blancheur éclatante des falaises d’Albâtre, des reflets gris-bleu de la mer et des cieux tourmentés de la Normandie, filmés avec un réel sens du cadre et de la mise en scène.