La somme de toutes les peurs - la critique

Critique : Jack Ryan reprend du service. Pour cette prequel, c’est Ben Affleck qui endosse le costume d’analyste de Jack Ryan, rôle initié avec Alec Baldwin (À la poursuite d’octobre rouge), puis repris par Harrison Ford (Jeux de guerre, Danger immédiat). À l’origine de ce nouveau délire paranoïaque, l’écrivain Tom Clancy qui, en 1991, écoula six millions d’exemplaires de son roman à travers le monde.
"Prenez le marin le plus courageux, l’aviateur le plus intrépide, le soldat le plus brave, et réunissez les autour d’une table. Qu’obtenez-vous ? La somme de toutes les peurs." Ainsi parlait Winston Churchill, dont cette citation sert de prologue au film. Dans le contexte actuel, cette peur est symbolisée par l’arme nucléaire et le fait qu’elle puisse tomber entre des mains fanatiques. Pour le film de Phil Alden Robinson, c’est un groupuscule néonazi qui joue avec les nerfs de la Russie et des États-Unis afin de déclencher des hostilités nucléaires. Évidemment, Ryan, tout jeune expert de la CIA, veille aux bons rapports entre les deux puissances mondiales.
Victime d’une vieille recette, l’industrie hollywoodienne arrivera-t-elle un jour à surprendre les spectateurs avec ce genre de production ? Aussi efficace soit l’intrigue, aussi prenant soit le suspense, jamais on ne parvient à quitter ce regard détaché tant la fin est prévisible. Un sentiment presque injuste puisqu’on est loin de s’ennuyer, notamment grâce à un habile crescendo de la tension dramatique. La somme de toutes les peurs réserve même quelques belles surprises comme par exemple la destruction d’une ville. Au moins évite-t-il à bon escient l’emphase patriotique que connaissent les dernières productions hollywoodiennes (le film a été tourné bien avant le 11 septembre).

Différence notable : à l’inverse des précédentes aventures de Jack Ryan, celle-ci a la particularité de noyer son personnage principal au cœur d’une large distribution. Jack Ryan n’est plus le sauveur sur lequel la sécurité du monde repose mais simplement un petit rouage d’un immense ensemble. Un parti pris qui renforce encore un peu plus la crédibilité de ce film : Ryan est quasiment un novice et serait même tenté d’éviter tout zèle. En ce sens, ceux qui attendent des actes héroïques et spectaculaires seront déçus. Ben Affleck donne donc la réplique à quelques beaux noms de Hollywood tels que Morgan Freeman et James Cromwell, et se fait évidemment piquer la vedette. La starification de cet acteur reste encore un mystère, vu la fadeur qu’il dégage.
En résumé, loin d’être aussi risible que Dommage collatéral, La somme de toutes les peurs n’est pas non plus le thriller techno-politique de l’année. Il se situe juste dans la catégorie des bonnes productions américaines, efficaces sans être transcendantes.