Le 30 janvier 2025
Guédiguian fait du Guédignian dans une comédie dramatique marseillaise, douce amère, où encore une fois, il réunit ses comédiens favoris qui se donnent à cœur joie pour illuminer leurs personnages.
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
- Réalisateur : Robert Guédiguian
- Acteurs : Jean-Pierre Darroussin, Ariane Ascaride, Robinson Stévenin, Gérard Meylan, Grégoire Leprince-Ringuet, Geneviève Mnich, Jacques Boudet, Lola Naymark, Marilou Aussilloux
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Français
- Distributeur : Diaphana Distribution
- Durée : 1h41mn
- Date de sortie : 29 janvier 2025
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Résumé : Maria n’est plus toute jeune et aide des personnes plus âgées qu’elle. Tirant le diable par la queue, elle ne se résout pas à sa précaire condition et, par-ci par-là, vole quelques euros à tous ces braves gens dont elle s’occupe avec une dévotion extrême… et qui, pour cela, l’adorent… Pourtant une plainte pour abus de faiblesse conduira Maria en garde à vue…
Critique : La Pie Voleuse c’est à la fois le nom original de ce magasin de musique et évidemment la représentation immédiate qu’on se fait de cette aide à domicile qui, pour compenser les addictions au jeu de son mari, pique dans le porte-monnaie des patients qu’elle accompagne. En une phrase, on a résumé ce joli conte moderne qui mêle harmonieusement le goût du piano, l’amour et la folie douce. Car cette Maria n’en est hélas pas à son coup d’essai. On l’a déjà prise la main dans le sac, ce qui ne l’empêche pas de continuer ses forfanteries à coups de chèques volés et de monnaie attrapée dans la tirelire de ses protégés. Mais nous ne sommes plus dans le cinéma des années 2000 de Guédiguian avec La Ville est tranquille où la désespérance gagnait sur le volonté des individus de s’en sortir. Ici, la générosité, l’empathie et la douceur de vivre ont raison du drame et finissent par donner au long-métrage un air bon enfant.
- Copyright 2024 - Agat Films
Robert Guédiguian réunit pour le meilleur ses acteurs fétiches avec en tête Ariane Ascaride et Gérard Meylan, ainsi que Jean-Pierre Darroussin et Grégoire Leprince-Ringuet. Chacun habite avec beaucoup de tendresse des personnages qui sont toujours à la limite de céder aux vertiges de la déraison. Cela donne beaucoup de douceur à ce récit qui évite les poncifs du mélodrame social. Au contraire, Robert Guédiguian les plonge dans une ville de Marseille merveilleuse, avec ces maisons dont la terrasse donne sur la mer ou survivent dans des ruelles improbables. En ce sens, en écho à l’affiche, La pie voleuse est un joli hommage rendu à la cité phocéenne.
Naturellement, un film de Guediguian, c’est d’abord la présence solaire d’Ariane Ascaride. La comédienne fait une fois de plus la démonstration qu’elle est capable de tout jouer, sans la moindre faute de goût. Elle interprète ici une aide à domicile dont on sait que les conditions d’exercice et de vie sont très difficiles. Elle donne à voir ainsi le visage d’une femme attentive aux besoins de ses patients, aimante et attentionnée, comme celui d’une voleuse sans scrupule pour extraire sa famille des difficultés financières. Le film pose bien le débat d’un capitalisme qui ne profite pas à tout le monde, mettant dos à dos ceux qui consomment et les autres, qui, faute de moyen, regardent le spectacle de la consommation. Mais Robert Guédiguian parvient merveilleusement à réunir les contraires, grâce notamment au pouvoir de l’amour.
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Ainsi, La pie voleuse a tout le charme d’un conte moderne où les bons sentiments côtoient la dureté sociale des petites gens. La part belle est faite au vieillissement dans la mesure où les comédiens acceptent sans fausse pudeur de s’abîmer le corps, d’assumer les cheveux gris et de parler d’une mort qui pourrait être la leur dans une quinzaine d’années. En même temps, le réalisateur montre que l’amour n’a pas de limite d’âge, ce qui est tout à fait rassurant dans un univers où le jeunisme domine les rapports sociaux.
On aura donc beaucoup apprécié cette page urbaine où l’espoir gagne sur le misérabilisme ambiant dont les médias se délectent quand il s’agit de parler de Marseille. Il n’y a aucun doute que les salles seront pleines pour accueillir ces personnages qui semblent très proches des spectateurs, comme si les comédiens, dans ce récit, étaient parvenus à élever dans un poème les petits drames de la vie quotidienne de chacun.