Le 18 février 2021
Après les Retour vers le futur, Zemeckis signait une comédie énorme, satire impitoyable d’une société des apparences.
- Réalisateur : Robert Zemeckis
- Acteurs : Isabella Rossellini, Goldie Hawn, Meryl Streep, Bruce Willis
- Genre : Comédie, Fantastique
- Nationalité : Américain
- Distributeur : UIP (United International Pictures)
- Editeur vidéo : ESC Éditions
- Durée : 1h44mn
- Date télé : 18 février 2021 22:10
- Chaîne : OCS Géants
- Box-office : 58 422 650 $ (USA) ; 1 108 386 entrées France
- Titre original : Death Becomes Her
- Date de sortie : 23 décembre 1992
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Résumé : Depuis des années, Madeline, une actrice médiocre, vole les amants de son amie Helen, écrivain. Un soir, cette dernière se rend au spectacle de son amie, accompagnée de son fiancé Ernest, séduisant chirurgien esthétique. Une fois de plus, l’actrice joue de ses charmes et finit par épouser Ernest. Helen sombre dans la dépression et devient obèse, vouant une haine secrète envers son ancienne amie. Quatorze années plus tard, Madeline essaye désespérément de lutter contre l’inévitable vieillissement de son corps. Elle a totalement anéanti Ernest, devenu alcoolique et qui en est réduit à voir sa femme parader avec ses jeunes amants. C’est alors que Helen entre alors en scène, plus sublime que jamais et venue pour reprendre son dû.
Critique : Vingt-cinq ans après sa sortie et une réception tiède, revoir La mort vous va si bien permet de mesurer la nouveauté du film qui tient, non pas à ses effets spéciaux (on a fait mieux depuis, même s’ils sont remarquables), mais à sa folie dévastatrice et foncièrement cruelle. À travers le destin de deux femmes rivales qui deviennent immortelles, Zemeckis brode une satire impitoyable des obsessions de notre temps, et notamment celle de rester jeune à tout prix ; en contrepoint, le personnage d’Ernest, interprété par un Bruce Willis de plus en plus survolté, refuse de boire la potion magique et accepte sa finitude. C’est là sa vraie grandeur et, semble nous dire le réalisateur, la grandeur de l’homme : savoir qu’il est mortel et faire de sa vie une œuvre dédiée aux autres. À l’égoïsme des deux femmes s’oppose donc un humanisme qui ne se dévoile qu’in fine, dans l’éloge funèbre, mais éclaire de façon inattendue (et peut-être moralisatrice) cette fable sarcastique.
On se souvient en général des morceaux de bravoure (le corps troué, la tête à l’envers…), mais la richesse du film est un mélange extraordinairement composite : entre les genres (le serial, le film d’horreur, de suspense ou d’aventures, la farce et la comédie), les multiples références (de Frankenstein à Faust, mais aussi les allusions à Don Quichotte, à Greta Garbo, Elvis ou James Dean entrevus) et les styles et emprunts divers, La mort vous va si bien apparaît comme un récapitulatif en même temps qu’un terme : on ne pourra pas aller beaucoup plus loin dans l’exploitation d’une situation déjantée. Cette force incontestable s’appuie sur un rythme soutenu, efficace, et une utilisation maximale des outils cinématographiques : Zemeckis se permet tout, du grand angle au ralenti en passant par le plan-séquence, d’autant qu’il multiplie au sein du film les échos et parallèles (les chutes dans l’escalier, les mortes qui se relèvent, entre autres), soutenu par la musique puissante et elle-même semi-parodique d’Alan Silvestri. Impossible de résister à ce crescendo jouissif qui fait exploser, désarticuler les corps en un rappel à la fois des cartoons et des slapsticks. Les personnages y sont des marionnettes préoccupées de leur apparence, ce que l’utilisation omniprésente des miroirs dit assez, qui au final ne font rien de leur vie, à part se repeindre à l’infini, dans une situation qu’on peut rapprocher de l’enfer sartrien.
Mais le film se fonde d’abord sur un thème rarement mis aussi en évidence, le désir triangulaire cher à René Girard : les deux femmes passent leur temps à désirer ce que l’autre désire ; ce n’est pas faire injure à Willis que de dire qu’il n’incarne pas ici le comble de la séduction, et pourtant elles se déchirent pour lui. C’est que la rivalité qu’elles s’avouent finalement guide leurs faits et gestes jusqu’à l’épuisement.
Même si le film paraît parfois trop mécanique, on ne boudera pas son plaisir : entre séquences de bravoure, répliques hilarantes (« La morgue ? Elle va être furieuse » ou la dernière, « tu te rappelles où on a garé la voiture ? » méritent de figurer dans des anthologies) et acteurs survoltés qui oscillent entre le théâtral et le cabotinage, il explore un continent peu fréquenté, celui de la farce macabre, et en révèle des potentialités inouïes. À ce titre, cette nouvelle sortie en DVD et Blu-ray fait figure d’événement.
Les suppléments :
Jacky Goldberg et Vincent Ostria analysent le film en concepts fulgurants (spectacle perverti, dualité, monstruosité) et rattachent Zemeckis à la galaxie Spielberg (Robert Zemeckis, ce film vous va si bien, 21mn) ; puis le même Goldberg étudie la carrière de Willis avec une finesse égale : on retiendra cette belle idée du « corps qui se cogne » (Bruce Willis, itinéraire d’un héros ordinaire, 22mn). Les deux autres modules sont consacrés aux effets spéciaux, avec un entretien (Ce corps vous va si bien, 21mn) et des images d’époque (3 minutes qui rendent concrètes les précisions du documentaire précédent). Au total, la moisson est bonne : on apprendra beaucoup de ces bonus divers.
L’image :
La restauration ne gomme pas l’âge du film. Mais l’image est propre, lisse, les couleurs ont de l’éclat et les contrastes sont satisfaisants.
Le son :
C’est surtout avec la musique qu’on appréciera la limpidité et la force des deux versions 5.1, qui donnent un lustre nouveau à cette composition variée et puissante. Mais on ne perdra rien des dialogues savoureux, qui toutefois sont davantage percutants en VO.
– Sortie DVD et Blu-ray : le 30 août 2017
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