Le 28 juin 2020
Un premier long métrage plein de promesses. Vero Cratzborn parvient à renouveler le portrait de l’adolescence, à travers l’histoire d’une famille impactée par la maladie psychiatrique du père.
- Réalisateur : Vero Cratzborn
- Acteurs : Ludivine Sagnier, Alban Lenoir, Léonie Souchaud, Carl Malapa
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Suisse, Belge
- Distributeur : KMBO
- Durée : 1h31min
- Date de sortie : 8 juillet 2020
Résumé : Gina, 15 ans, grandit dans une famille aimante en lisière de forêt. Elle admire son père Jimmy, imprévisible et fantasque, dont elle est prête à pardonner tous les excès. Jusqu’au jour où la situation devient intenable : Jimmy bascule et le fragile équilibre familial est rompu. Dans l’incompréhension et la révolte, Gina s’allie avec un adolescent de son quartier pour sauver son père.
- Copyright La foret de mon père - 2019
Critique : Le premier long métrage de Vero Cratzborn, ancienne assistante de Leos Carax, auteure de cinq courts et de plusieurs documentaires, revêt une dimension autobiographique : la réalisatrice s’inspire de son père atteint d’un handicap psychique. Ici, pourtant, la fiction se garde bien de nommer la pathologie de Jimmy, pour ne pas enfermer le protagoniste dans le carcan d’une nominalisation forcée, pour lui laisser sa liberté de personnage imprévisible, qui constamment interroge le spectateur en même temps que son entourage. L’institut où le père séjourne n’a qu’une valeur illustrative, comme si finalement l’essentiel était ailleurs, dans la manière dont la famille gère cette maladie : certes, sa femme Carole assume, à la fois fragile et déterminée, les conséquences psychologiques et financières de cette infortune. Mais c’est avant tout la jeune et mature Gina qui semble constamment prendre la mesure des événements, avec une volonté farouche de libérer Jimmy, l’extraire de la froideur carcérale d’un lieu où elle présume son mal-être. Elle détient la clef d’un fonctionnement hors normes, alors que ses effets entament la stabilité de la structure familiale, sans pourtant détruire les liens qui unissent tous ses membres.
Le pouvoir quasi magique du personnage engendre les séquences les plus troublantes : on retient, en particulier, la scène de voyage en voiture, où, par la grâce d’une chanson doucement entonnée, Gina conjure la pulsion suicidaire de son père, déterminé à mourir avec femme et enfants, ému à la seule pensée d’accomplir ce geste radical. L’évocation d’une jeune fille douée d’une sorte d’aptitude mystérieuse s’accorde avec un entêtement qui détermine une confiance. La réalisatrice n’a pas à forcer le trait, en accompagnant les actes de son héroïne d’une prolixité embarrassante ou de psychodrames dont le cinéma français s’encombre trop souvent, lorsqu’il s’agit de traiter l’adolescence.
- Copyright La foret de mon père - 2019
Gina est résolument du côté de la vie et n’oublie pas que son chemin initiatique transite symboliquement par la forêt, lieu d’une inquiétude forcément nocturne, mais, à la fin, illuminé par la perspective d’une première histoire d’amoureuse. Joliment amorcée devant un feu de bois, la relation sentimentale dit aussi le désir d’une émancipation.
Ce long métrage subtil et délicat se leste parfois de quelques scènes à faire, un peu plus démonstratives. Mais il procède d’un regard original, celui d’une réalisatrice à suivre. Et les acteurs sont globalement impeccables, en particulier Léonie Souchaud, qu’on avait déjà remarquée dans Le Voyage de Fanny.
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ilabrousse 1er juillet 2020
La Forêt de mon père - Vero Cratzborn - critique
Très beau film, à voir, en parler. Sensible, touchant, éclairant et inspirant.