La cité des enfants perdus
Le 13 octobre 2015
Un jeune étudiant glisse dans la voie de l’intégrisme. Une œuvre démonstrative et attachante qui révèle Rashid Debbouze dans un rôle dramatique.
- Réalisateur : Philippe Faucon
- Acteurs : Ymanol Perset, Yassine Azzouz, Rashid Debbouze
- Genre : Drame
- Distributeur : Pyramide Distribution
- Durée : 1h18mn
- Date de sortie : 15 février 2012
L'a vu
Veut le voir
L’argument : Une cité dans l’agglomération lilloise, aujourd’hui.
Ali, Nasser et Hamza, âgés d’une vingtaine d’années, font la connaissance de Djamel, dix ans de plus qu’eux. Aux yeux d’Ali et ses amis, Djamel apparaît comme un aîné aux propos acérés et au charisme certain. Habile manipulateur, il endoctrine peu à peu les trois garçons, connaissant mieux que quiconque leurs déceptions, failles et révoltes face à une société dans laquelle ils sont nés, mais dont aucun des trois ne pense plus désormais faire partie.
Notre avis : Au carrefour de plusieurs influences dont celles du cinéma à thèse d’Yves Boisset (Dupont Lajoie, 1975), du film social initié par un Mehdi Charef (Le thé au harem d’Archimède, 1985) et de l’univers plus âpre et dépouillé des Dardenne, La désintégration confirme les qualités d’écriture de Philippe Faucon. Le réalisateur des délicats Samia et La trahison est ici habile à montrer les effets du chômage et de la discrimination chez certains jeunes issus de l’immigration, tentés par l’intégrisme. Si le film s’inspire du parcours de Zacarias Moussaoui, le 20e pirate du 11 septembre, étudiant français condamné à la perpétuité en raison de son engagement terroriste, il dépasse les lieux communs d’un « dossier de l’écran » par un style incisif, proche du polar, et qui donne au pamphlet l’efficacité et la beauté rude de certaines séries B de l’âge d’or hollywoodien (Dassin, Fuller...).
- Copyright Pyramide Distribution
On peut certes voit l’œuvre comme une simple réplique démonstrative aux propos stigmatisants et xénophobes de politiciens maniant depuis quelques années la rhétorique de l’amalgame entre l’islam et le fondamentalisme religieux. Le personnage du grand frère intégré ou de la mère bienveillante sont ainsi des figures incontournables d’un dispositif didactique que le cinéaste assume, quitte à voir attribuer à son film l’étiquette de « fiction de gauche » naguère collée à un Costa-Gavras. On ne saurait pourtant lui reprocher d’être tenté par les sirènes du manichéisme et du politiquement correct, tant la narration fait du jeune Ali un personnage foncièrement sombre, individualiste et finalement peu sympathique, quand d’autres auraient choisi la voie du mélodrame larmoyant, du bon sentiment ou de la bonhomie communicative. La désintégration a plutôt des allures de tragédie et le parcours initiatique et irréversible de son protagoniste peut évoquer le héros dostoïevskien partagé entre son libre arbitre et le fatalisme social. Ce que confirme une mise en scène sobre dans ses ellipses et son dépouillement : le dernier plan montrant une mère vacillante et éplorée dans un couloir d’hôtel est dans ce sens un modèle de concision et d’émotion contenue, qui compense quelques maladresses manifestes dans le récit (la séquence au lycée). Il faut enfin souligner la révélation de Rashid Debbouze, humoriste et frère de Jamel, qui n’est pas la moindre atout de cette œuvre rugueuse présentée hors-compétition à la 68e Mostra de Venise.
- Copyright Pyramide Distribution
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.