Le 18 octobre 2017
Plongée violente et fascinante au royaume du machisme institutionnel.
- Réalisateur : Kaouther Ben Hania
- Acteurs : Mariam El Ferjani, Ghanem Zrelli, Noomane Hamda
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Suédois, Norvégien, Suisse, Libanais, Tunisien, Qatarien
- Distributeur : Jour2fête
- Durée : 1h40mn
- Date de sortie : 18 octobre 2017
- Festival : Festival de Cannes 2017, Festival d’Angoulême 2017
Résumé : Lors d’une fête étudiante, Mariam, jeune tunisienne, croise le regard de Youssef. Quelques heures plus tard, Mariam erre dans la rue en état de choc. Commence pour elle une longue nuit durant laquelle elle va devoir lutter pour le respect de ses droits et de sa dignité. Mais comment peut-on obtenir justice quand celle-ci se trouve du côté des bourreaux ?
Critique : Même si l’action se situe dans la Tunisie actuelle, la réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hama s’attache à dénoncer davantage les diktats des États (quel qu’ils soient) que les conséquences du viol lui-même. Du documentaire à la fiction, son cinéma conserve toujours un lien fort avec la réalité sociale. En 2014 avec Le Challat de Tunis elle s’attaque entre dérision et burlesque au machisme. Avec La belle et la meute inspirée du livre au titre évocateur « Coupable d’avoir été violée », elle intensifie d’un cran la lutte contre « la banalisation du mal » avec cette œuvre qui prend aux tripes.
- Copyright Jour2Fête
Mariam semble à peine sortie de l’enfance. Elle a un visage rond, de grands yeux rieurs. Ses amis et elle choisissent soigneusement leurs tenues pour aller à la fête où elles doivent retrouver des filles et des garçons de leur âge. Quelques plans plus tard, on retrouve Mariam en larmes, hagarde dans la rue, les vêtements déchirés, sans chaussures ni sac. Elle vient d’être violée, elle est désemparée. Ce brusque changement d’ambiance créé immédiatement un trouble destiné à faire partager au spectateur le sort de cette jeune femme qui non seulement doit surmonter le traumatisme de son agression mais aussi se justifier auprès de policiers peu enclins à l’écouter, quand ils ne sont pas carrément menaçants. Elle a la chance de retrouver Youssef, un garçon qu’elle a croisé à la fête et qui se propose de l’aider à faire valoir ses droits. D’hôpitaux en commissariats, de mépris en intimidations, on suit sans en perdre une miette le parcours de cette jeune femme naïve qui découvre l’envers d’une réalité qu’elle imaginait toute autre, et de ce jeune journaliste militant bien décidé à se battre face à un ordre social qui dénie totalement le respect des droits élémentaires des citoyens. C’est d’ailleurs cette « audace » qui poussera les policiers à user d’un méchant subterfuge pour les séparer. L’espoir du soutien de quelques bonnes volontés, elles-même révoltées par tant de violence, ne fait pas long feu. Ni le vieux policier compréhensif et paternel qui tente de se démarquer au milieu de ses collègues arrogants et brutaux, ni l’infirmière au regard compatissant, ni la femme flic prête à écouter les doléances de cette sœur de combat n’ont assez de pouvoir pour épauler celle qui de victime de viol se transforme peu à peu en citoyenne agissante. Mariam « la belle » se retrouve isolée face à « la meute » et elle est contrainte de s’en sortir seule. Confrontée à des circonstances inhumaines, elle se révèle à elle-même et fait dès lors basculer une impunité que tout le monde connaît et accepte.
- Copyright Jour2Fête
Le récit, découpé en neuf épisodes comme autant de fragments du réel, filmés en plan-séquences, nous plonge sans garde-fou dans une réalité effrayante et démonte avec force les rouages d’un système perverti où les lois censées protéger les citoyens sont détournées en toute immoralité.
S’il reste cruel et âpre, ce film n’en demeure pas moins un bel espoir pour la jeune république tunisienne, car il est bien évident qu’il n’aurait pu exister avant 2011. Bien qu’il ne fasse pas un portrait tendre des garants de l’ordre dans le pays, il a été soutenu par les autorités culturelles, symbole d’un réel changement de mentalité dans un pays encore en proie à un régime autoritaire il y a peu.
Festival d’Angoulême 2017 : Prix du jury étudiants
Festival de Cannes 2017 : Sélection Un Certain Regard
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.
Marla 22 octobre 2017
La belle et la meute - la critique du film
C’est en effet un film très dur et d’utilité publique : http://bit.ly/2yFxBX4