Le 12 octobre 2016
Un regard inattendu sur une figure emblématique mais controversée de ce 20ème siècle, où l’homme se sentait tout puissant et autorisé à dompter la nature.
- Réalisateur : Jérôme Salle
- Acteurs : Audrey Tautou, Lambert Wilson, Laurent Lucas, Pierre Niney, Benjamin Lavernhe, Roger Van Hool, Thibault de Montalembert
- Genre : Drame, Aventures, Biopic
- Nationalité : Français
- Durée : 2h02mn
- Date télé : 22 mars 2024 23:05
- Chaîne : Chérie 25
- Date de sortie : 12 octobre 2016
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Résumé : 1948. Jacques-Yves Cousteau, sa femme et ses deux fils vivent au paradis, dans une jolie maison surplombant la mer Méditerranée. Mais Cousteau ne rêve que d’aventure. Grâce à son intervention, un scaphandre autonome qui permet de respirer sous l’eau, il a découvert un nouveau monde. Désormais, ce monde, il veut l’explorer. Et pour ça, il est prêt à tout sacrifier.
Critique : Alors qu’il évoque le nom du Commandant Cousteau avec quelques jeunes gens, le réalisateur Jérôme Salle (Largo Winch et Zulu) s’aperçoit que cet homme qui fut l’un des plus célèbres (et des plus appréciés) dans les années 70/80 leur est quasiment inconnu. Il décide alors de consacrer un biopic à ce héros des mers complexe et méconnu et de nous révéler ses doutes, ses failles, ses manques et ses contradictions.
- Copyright Jean-Marie Leroy
Sous un soleil éclatant de Provence, une voiture file joyeusement sur une petite route de campagne. Dans ces années de l’immédiate après-guerre, l’insouciance est de mise. Deux enfants, debout sur la banquette arrière et passant la tête par le toit ouvert, chantent et dansent. A l’avant, les parents, beaux et élégants, rient de ces instants de vie toute simple. Cette famille bohème et libre, c’est la famille Cousteau. Dans un décor superbe magnifiquement mis en lumière par le chef opérateur Mathias Boucard, ils vivent, le jour de nature et de mer, le soir de fêtes et de dîners chaleureux. Une mise en scène colorée et vive restitue exactement ce bonheur de vivre que rien ne semble jamais devoir altérer. On comprend vite que les deux garçons ne se ressemblent guère. Philippe, le cadet, est un casse-cou, amateur d’aventures et de dangers. Tout comme son père, il aime à la folie la mer mais encore plus le ciel qui, d’ailleurs, lui sera fatal. Jean-Michel, l’aîné, est timoré et réservé. Le film ne lui accordera qu’une place secondaire. En parfait homme de communication, Jacques-Yves Cousteau, l’homme au bonnet rouge, JYC pour les intimes, a toujours préféré montrer ses exploits sous-marins plutôt que son intimité. Désireux de nous dévoiler un parcours à la fois riche et secret, c’est pourtant sous l’angle familial et plus particulièrement à travers les relations conflictuelles père/fils que Jérôme Salle place son récit. En réunissant Lambert Wilson et Pierre Niney pour incarner ce couple ambivalent pétri d’admiration et de rivalité, Jerôme Salle fait un sans fautes. Le physique émacié (il a perdu une dizaine de kilos) de Lambert Wilson en fait un Cousteau plus vrai que nature. Dans nombre de scènes, la ressemblance est troublante. Son élégance naturelle apporte une belle authenticité à cet homme’ qui inspire à la fois respect et méfiance. Pierre Niney met tout son talent à faire exister Philippe, cet aventurier à la sensibilité exacerbée et au cœur brisé par l’indifférence de ce père qu’il aime par-dessus tout. Il apporte une réelle dimension humaine à ce film d’aventure. La scène de confrontation père/fils dans un restaurant à Los Angeles nous convainc définitivement de l’union parfaite de ce duo cinématographique.
- copyright Jean-Marie Leroy
Une fois la gloire venue, on découvre un autre aspect du Commandant Cousteau, qui d’aventurier des mers se transforme en vedette narcissique, négociant des millions avec les chaînes de télévision américaines, pour finir en business man accompli, succombant sans remords au charme de quelques naïades rencontrées au détour d’un océan. Pour se faire pardonner, il n’oublie pas pour autant de nous offrir de saisissantes images des fonds marins, parmi lesquelles d’impressionnants ballets de baleines mais aussi de requins. Pourtant, en même temps qu’il délaisse sa famille, il jette le spectateur dans un abîme de tiédeur déconcertante. Certes, de la Croatie à l’Afrique du Sud en passant par les Bahamas, puis l’Antarctique, les paysages sont exotiques. Mais ces courses effrénées sur la mer au prix de tous les dangers et les projets discutables au nom du profit anéantissent toute notion d’émotion et leur répétition alourdit le cours du récit.
- copyright Jean-Marie Leroy
Finalement, c’est Simone, la femme de Cousteau qui ranimera la flamme de cette épopée avant tout familiale. Pour se venger des incartades de son mari , elle décide que désormais la Calypso est sa seule maison (elle n’a d’ailleurs pas tort, puisque c’est en partie grâce à la vente des bijoux que sa mère lui a légués que le couple a pu acheter ce bateau). Merveilleusement interprétée par Audrey Tautou, qui se glisse avec la prestance qu’on lui connaît dans la peau de cette femme indépendante et rebelle, forte en gueule et pudique, toujours attachante et digne dans le bonheur comme dans l’adversité, elle règne avec tendresse et humanité sur cette tribu composée autant de sa famille que des équipages. A coup de perruque et de silicone, et grâce à une performance hors du commun, elle passe avec une évidence toute naturelle de la jeune femme heureuse et enjouée à l’épouse vieillissante amère et alcoolique.
- copyright Jean-Marie Leroy
Malgré une baisse de régime à mi-parcours compensée par des acteurs magistralement dirigés (y compris les seconds rôles), on ne peut que saluer cette œuvre offrant un regard inattendu sur une figure emblématique mais controversée de ce 20ème siècle, où l’homme se sentait tout puissant et autorisé à dompter la nature. Initié par son fils, Jacques-Yves Cousteau a su reconnaître ses erreurs et demeure à ce jour le précurseur de l’écologie moderne. A ce titre, il méritait cet hommage que L’odyssée lui rend amplement.
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