Etranger parmi les siens
Le 1er décembre 2017
Les stigmates de la mafia napolitaine s’exposent dans un film lent, qui manque singulièrement d’action et de rythme.
- Réalisateur : Leonardo Di Costanzo
- Acteur : Raffaella Giordano
- Genre : Drame
- Nationalité : Italien
- Distributeur : Capricci Films
- Durée : 1h35mn
- Date de sortie : 13 décembre 2017
- Festival : Festival de Cannes 2017
L'a vu
Veut le voir
Résumé : Naples. Aujourd’hui. Giovanna, travailleuse sociale combative de 60 ans, fait face à une criminalité omniprésente. Elle gère un centre qui s’occupe d’enfants défavorisés et offre ainsi une alternative à la domination mafieuse de la ville. Un jour, l’épouse d’un criminel impitoyable de la Camorra, la jeune Maria, en fuite avec ses deux enfants, se réfugie dans ce centre. Lorsqu’elle lui demande sa protection, Giovanna se retrouve confrontée, telle une Antigone moderne, à un dilemme moral qui menace de détruire son travail et sa vie.
Notre avis : L’Italie porte les stigmates des nombreuses années où elle a été gangrenée par des réseaux mafieux qui, s’ils continuent à provoquer peur et méfiance, ne sont que les ombres d’eux-mêmes au vu de leur gloire d’antan. A Naples, théâtre du nouveau long-métrage de Leonardo Di Costanzo, la Camorra reste l’un des acteurs les plus puissants de la cité, qui abritent les victimes directes et collatérales du réseau. Ainsi, bien que le film ne soit pas centré sur la mafia en elle-même, il s’attarde sur ces banlieues où se tassent pauvres et autres déclassés de la société, à commencer par leurs enfants qui évoluent dans un tissu social où la Camorra reste très enracinée.
Après En quête d’État, en 1999, qui mettait en scène un maire souhaitant rétablir l’état de droit dans une ville en proie au trafic mafieux, et Un cas d’école en 2003, qui dépeignait les aventures d’un professeur au cœur d’une banlieue délabrée, Di Costanzo s’intéresse de nouveau à la médiation sociale en installant sa caméra dans un de ces quartiers qui abritent les laissés-pour-compte du système.
- Copyright Capricci Films
L’action se déroule ici dans une structure sociale autofinancée, dirigée par des bénévoles qui accueillent des enfants en dehors des heures de classe. Ce refuge représente, pour les habitants des quartiers pauvres alentours, un havre de paix où ils s’estiment à l’abri. Il s’agit d’une alternative à la logique mafieuse, où les orphelins, victimes de la pègre, viennent trouver du réconfort. La police de proximité, qui patrouille quotidiennement dans un secteur dont la structure est le centre, témoigne toutefois d’un contexte délicat tant elle paraît mal à l’aise dès qu’elle met un pied dans ce secteur où la mafia était encore récemment une maîtresse incontestée.
C’est dans ce contexte où les adultes tentent d’insuffler aux enfants un vent de légèreté dans un quotidien difficile, que survient Maria, l’épouse d’un criminel de la mafia locale qui a sévi au sein de ces familles. Elle représente l’Autre, cette étrangère qui vient perturber le rouage mis en place par Giovanna, qui voudrait aider tout le monde et ne contente finalement personne en permettant au loup d’entrer dans la bergerie ; le personnage principal essaye ici de faire consensus, oubliant au passage l’histoire très difficile qui se cache derrière chacun des sourires des enfants qu’elle gère.
- Copyright Capricci Films
La jeunesse devient alors l’enjeu principal du film : la caméra est posée au niveau de son regard, tentant de capter au fond des yeux des bambini la manière dont ils comprennent tout ce qui se déroule autour d’eux. Le monde des adultes et des plus jeunes se conjugue alors : alors que les parents d’élèves se posent en juges et condamnent aussitôt cette femme qui a fait partie de l’organisation criminelle qui a détruit leurs familles, leur progéniture cherche à établir son propre système. Peut-elle se lier aux enfants nés au sein de la Camorra, alors que leurs parents sont incapables de tendre la main à une femme qui essaye de s’en libérer ? La vie des adultes éclabousse ici celle de leur engeance, qui souhaitent s’ouvrir à l’autre.
Le film s’essaie alors de s’interroger sur la façon de tisser des enfants, leurs dialogues, allant au-delà des résistances que leurs parents manifestent aussitôt. Ces résistances sont-elles justifiables ? Pouvons-nous les comprendre et passer outre le passé pour établir des liens de paix ? Le film a le mérite d’interroger, tout en manquant sûrement de souffle et de rythme pour que la prise de conscience réelle sur l’attitude fermée de ces adultes dans la perpétuation des violences, puisse exalter nos sentiments.
- Copyright Capricci Films
Alors que l’action se déroule en 2017 et que la population bénéficie du recul nécessaire pour tourner cette page douloureuse, le long-métrage ne cherche pas à aller au-delà, n’incitant ni à la clémence, ni à la compréhension en profondeur d’un sujet marqué par le déterminisme. Ainsi, L’Intrusa ne permet pas de se défaire de la loi du talion. A peine est-il suggéré que l’attitude des adultes a des conséquences parfois néfastes sur les enfants. Un cliché que nul n’ignorait en entrant dans la salle et qui reste à l’état embryonnaire dans un long-métrage aux bonnes intentions, mais pas suffisamment abouti pour transmettre le message souhaité.
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.