Ils ne sont pas légion les écrivains qui ont dépeint le milieu des courses. On sait à quel point Bukowski s’y est attaché dans ses nouvelles ou ses poèmes mais en France, les occasions sont trop rares pour qu’on passe sous silence ce nouveau roman de Christophe Donner. Passionné lui-même (après plusieurs pages, il est impossible d’en douter), Donner nous promène sur les hippodromes au bras d’un narrateur complètement accro, hypnotisé par la beauté des chevaux qu’il regarde courir, après avoir brûlé plusieurs billets et quelques espoirs.

Car ces parieurs ne sont pas que de simples adeptes du jeu, ils sont surtout aveuglés par l’amour qu’ils portent aux purs-sangs, tétanisés par la montée d’adrénaline qui leur électrise le corps au moment où le départ est lancé. Et ce narrateur n’échappe pas à la règle. Pour ressentir la fièvre du type convaincu d’avoir identifié un futur crack dans un cheval à la cote dérisoire (tout passionné des courses connaît cette sensation), sa vie va se trouver chamboulée. Car sur du long terme, ce cheval c’est du caviar. De quoi offrir à sa belle un vison à trois mille euros !

Reste simplement à convaincre celle-ci de la justesse de son jugement, elle qui n’est pas toujours très enthousiaste quand il s’agit de dépenser l’argent du ménage ou de se montrer dans "cet état" de transe devant leur fille. Roman court, drôle et léger, L’influence de l’argent sur les histoires d’amour expliquera à tous les profanes la sacro sainte messe du tiercé. Christophe Donner y parvient joliment, restituant de manière impeccable cette folie passagère et parfois destructrice qui hante les assidus des hippodromes. Un ouvrage qui, même s’il fait dans la dérision permanente, n’en conserve pas moins une indiscutable puissance tragique. On parie que les flambeurs de tout poil se reconnaîtront dans cette histoire menée au triple galop ?