L’île aux remords - La chronique BD

Cette histoire parcourt le passé, au travers des souvenirs et des moments de vie de ces deux hommes, l’un médecin a travaillé tout au long de sa vie dans les bagnes Français avant de revenir s’installer dans son pays, tandis que l’autre, son père, n’a jamais bougé, rêvant de voyage et se déplaçant grâce aux livres. Qu’est-ce qui a divisé cette famille ? Quel lourd secret, quels choix de vie vont se révéler entre ces deux hommes, bloqués ensemble dans la maison de famille par les inondations ?
Les heurts commencent par des piques au détour d’une discussion et finalement, c’est avec douceur que le passé remonte. Au fur et à mesure de la lecture, on est surpris des révélations, mais aussi des caractères et des opinions des deux hommes. Les rôles semblent s’inverser, le fils ouvert semble plus conservateur que le père, alors que ce père enfermé dans sa maison est finalement plus ouvert que son rejeton.

trait doux et belles couleurs de Sébastien Morice

L’histoire avance de rebondissement en rebondissement. On navigue dans les souvenirs, remontant jusqu’au début du vingtième siècle, même si parfois, à notre avis, les événements se cumulent un peu trop.
Le récit garde encore une part de mystère, même si la fin heureuse, semble avoir levé les derniers voiles. Le récit se conclut sur une belle image, et la BD sur un cahier expliquant le fonctionnement des bagnes français. Car ces bagnes ont un rôle dans l’histoire, c’est là que le fils a construit sa vie, en tant que médecin, et a développé ses préjugés que son père va mettre à mal. Mais ce sont justement ces préjugés qui font que cette fin heureuse en apparence n’est pas réellement un happy end, des nuages restent encore à l’horizon et on sait que le lien recréé est fragile.
Le dessin de Sébastien Morice illustre parfaitement cette histoire et cette fragilité, des ambiances de couleur nous amènent à travers le temps, ces couleur douces qui contrastent parfois avec la tempête familiale qui sépare ces deux hommes et les rapproche en même temps. Le dessin léger semble rappeler en permanence que tout ce que père et fils reconstruisent, au travers de la révélation de ces non-dits, pourrait s’écrouler comme un château de cartes, pour un rien.

L’île aux Remords est une BD douce-amère sur ces secrets de famille. Mais aussi sur les raisons pour lesquelles des événements deviennent des secrets. Dans le cas de ce père et de ce fils, l’eau semble avoir ramené la vérité en surface et tout semble rentrer dans un certain ordre, mais ce n’est pas toujours le cas.