Tu ne tueras point
Le 5 mars 2014
Cette adaptation moderne de Crime et châtiment adopte une démarche bressonienne dont on apprécie la rigueur mais qui tend un peu trop vers l’exercice de style du film de festival.
- Réalisateur : Darezhan Omirbayev
- Acteurs : Nurlan Baitasov, Maya Serikbayeva, Edige Bolysbaevplus
- Genre : Drame
- Nationalité : Kazakhstanais
- Distributeur : Les Acacias
- Durée : 1h30mn
- Titre original : Student
- Date de sortie : 5 mars 2014
- Festival : Festival de Cannes 2012
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– Année de production : 2012
L’argument : L’action se déroule au Kazakhstan de nos jours. Un étudiant en philosophie souffre du manque d’argent et de solitude. Il va parfois acheter du pain chez l’épicier et peu à peu l’idée de cambrioler le magasin lui vient à l’esprit. Il commet finalement son crime durant lequel l’épicier et une cliente deviennent ses victimes. Le sentiment de culpabilité grandit en lui. Alors qu’il tombe amoureux d’une jeune fille, il prend la responsabilité de ses actes.
Notre avis : Darezhan Ormibayev avait été révélé par Kairat (1992), un premier long métrage qui avait remporté plusieurs prix internationaux. L’étudiant, son troisième film, a été présenté dans la section Un Certain Regard du Festival de Cannes en 2012. Auparavant, le cinéaste avait réalisé, Tueur à gages en 1998 et La route en 2001. Admirateur de Robert Bresson, il développe une démarche hiératique dans un style dépouillé, préférant la voie de l’épure et de la distanciation au romanesque psychologique. Comme Bresson (Une femme douce), il se frotte à un matériau littéraire de Dostoïevski, se le réappropriant pour l’intégrer à sa démarche intransigeante et son moralisme désenchanté. Car L’étudiant est une libre adaptation de Crime et châtiment. On se doute que l’acerbe critique sociale en filigrane du récit n’est pas un simple vernis, le cinéaste étant habile à montrer les méfaits de l’individualisme et de la précarité dans des sociétés confrontées à la compétition et au moule du marché. Une séquence de cours universitaire, qui voit une enseignante décrire avec froideur les mécanismes de la concurrence, véhiculant implicitement des valeurs douteuses, constitue moins une digression qu’une tentative de cerner, sans les justifier, les futures motivations du protagoniste.
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Un environnement froid et corrompu semble ainsi imprégner tout le récit, prédisposant l’étudiant à son crime. On se doute aussi que Ormibayev ne va pas se prêter à une transposition littérale du roman. Les fans de Crime et châtiment chercheront en vain l’apparition du juge Porphyre et L’étudiant n’a rien en commun avec l’intéressante version française de Pierre Chenal (1935), dans laquelle Pierre Blanchar campait un Raskolnikov expressionniste sombrant lentement mais sûrement dans la folie. Ici, aucune émotion n’est dévoilée, pas même lors de la visite de la mère et de la sœur aimées. La froideur atonale et le jeu inexpressif (volontaires) du jeune comédien kazakh (et de son personnage) renvoient plutôt à la sobriété de Christian Patey dans L’argent (Robert Bresson, 1983), adapté par contre d’une nouvelle de Tolstoï. Mais le style contemplatif de Ormibayev ne suscite pas autant d’adhésion et ce cinéma alternant plans-séquences et ellipses narratives pourra lasser par sa froideur hautaine.
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