L’enquête gauloise - La chronique BD

L’Histoire dessinée de la France avait débuté avec l’excellent album historiographique d’Étienne Davodeau et de l’historien Sylvain Venayre (par ailleurs directeur de la collection), La balade nationale. Après ce premier tome qui nous a fait réfléchir sur l’écriture de l’histoire de France, le deuxième volet de l’Histoire dessinée de la France questionne la pertinence de la fameuse expression « nos ancêtres les Gaulois », tant rabâchée aux jeunes têtes blondes dans les salles de classe, et offre au lecteur une histoire des Gaulois depuis la fondation de Massilia (Marseille) par les Grecs en 600 avant J.-C. - qui fait véritablement entrer les Gaulois dans l’histoire, grâce aux récits des Phocéens - jusqu’à la conquête de Jules César, dont le récit La Guerre des Gaules constitue la meilleure source écrite pour l’historien.

Nicoby et Jean-Louis Brunaux n’hésite pas à se mettre en scène au fil des pages - ©Nicoby/Brunaux - La Découverte/La Revue Dessinée

Deux auteurs sont à la manœuvre : Jean-Louis Brunaux, archéologue spécialiste des Gaulois, et le dessinateur Nicoby. Ils se mettent en scène pour faire vivre le récit, qui s’ouvre par une discussion autour d’Astérix, qui fait figure de socle de nos représentations communes sur les Gaulois. L’enquête gauloise se divise en 7 chapitres, qui alternent entre bande dessinée et un dossier explicatif de 3 à 5 pages qui complète le récit. Le dynamisme du récit naît des échanges entre l’archéologue et le dessinateur ou de leur confrontation avec des personnages historiques – notamment César lors d’une cocasse séance de dédicaces. D’autres chapitres, comme « Des hommes et des dieux », mettent en scène Cicéron et Diviciac, seul druide dont le nom nous soit parvenu, en nous faisant visiter l’habitat gaulois.

Les auteurs se rendent à une dédicace de... Jules César. L’occasion pour les auteurs de montrer l’importance et les biais de son ouvrage La Guerre des Gaules pour l’historien - ©Nicoby/Brunaux - La Découverte/La Revue Dessinée

Nicoby rend largement hommage à Astérix dans sa première représentation de l’irréductible village gaulois et dans celle de César, qui pastiche le trait d’Uderzo. La scène de bataille figurée sur la couverture rappelle bien sûr les fameuses bagarres dans le village d’Astérix. Nicoby a également la bonne idée d’agrémenter le récit de petites touches d’humour, autour du coq notamment. Le récit ne sombre jamais dans le didactisme un peu lourd, et présente l’avantage de partir de nos propres représentation pour les déconstruire, en insistant beaucoup sur les sources archéologiques qui ont permis aux chercheurs de faire des progrès considérables ces dernières années dans la connaissance des peuples gaulois. La bande dessinée nous fait découvrir les coutumes, les mœurs, la religion gauloise. Un défaut néanmoins, qui court sur l’ensemble d’ouvrage : la répétition dans chaque chapitre entre la bande dessinée et le dossier complémentaire. Intéressants au demeurant, ces dossiers donnent toutefois l’impression que la bande dessinée ne suffisait pas à elle-même pour nous faire saisir l’histoire des Gaulois.

L’enquête gauloise parvient à son objectif : offrir une vulgarisation historique en bande dessinée de qualité à propos d’un sujet sur lequel chaque lecteur dispose de représentation pré-établies. Nicoby et Jean-Louis Brunaux en ont bien conscience, eux qui déconstruisent méthodiquement ces images pour mieux nous transmettre les avancées de la recherche historique.