Vidocq fait (encore) son retour
Le 15 mai 2023
Vincent Cassel prête son charisme animal à Eugène-François Vidocq, figure légendaire du Paris des bas-fonds, dans une épopée un peu molle qui manque de puissance.
- Réalisateur : Jean-François Richet
- Acteurs : Vincent Cassel, Denis Lavant, Fabrice Luchini, Patrick Chesnais, August Diehl, Olga Kurylenko, Denis Ménochet, Hervé Masquelier
- Genre : Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Historique
- Nationalité : Français
- Distributeur : Gaumont Distribution
- Durée : 1h50mn
- Date télé : 15 mai 2023 21:10
- Chaîne : France 3
- Âge : Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs
- Date de sortie : 19 décembre 2018
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Résumé : Sous le règne de Napoléon, François Vidocq, le seul homme à s’être échappé des plus grands bagnes du pays, est une légende des bas-fonds parisiens. Laissé pour mort après sa dernière évasion spectaculaire, l’ex-bagnard essaye de se faire oublier sous les traits d’un simple commerçant. Son passé le rattrape pourtant, et, après avoir été accusé d’un meurtre qu’il n’a pas commis, il propose un marché au chef de la Sûreté : il rejoint la police pour combattre la pègre, en échange de sa liberté. Malgré des résultats exceptionnels, il provoque l’hostilité de ses confrères policiers et la fureur de la pègre qui a mis sa tête à prix...
Critique : Il existe des héros qui sont tellement présents dans l’imaginaire collectif (et surtout populaire) que leur propre vie finit par leur échapper. Figure littéraire comme James Bond, de tradition orale tel que Robin des Bois, ou ayant réellement existé comme Eugène-François Vidocq, ils ont en commun ce quelque chose qui permet au public de s’identifier et finalement de s’approprier des exploits qui leur parlent. Ainsi qu’une existence dangereuse en totale contradiction avec un petit train-train qui rend forcément fascinante la figure intemporelle d’un héros parisien comme on n’en voit plus.
Après l’interprétation unanimement saluée de Claude Brasseur et la version plus que médiocre avec Gérard Depardieu, c’est donc au tour de Vincent Cassel de prêter sa force brute à Vidocq, resté célèbre pour s’être plusieurs fois échappé du bagne, avant de devenir un indicateur et de rejoindre la police. S’il est vrai qu’Eugène-François Vidocq a connu plusieurs vies, le réalisateur Jean-François Richet a choisi de se concentrer sur un court épisode de son existence, suivant ce héros ultra populaire dans les bas-fonds, faisant de lui le témoin de son époque et de ses tribulations.
Bien au-delà d’un simple biopic, L’Empereur de Paris est avant tout un film historique qui témoigne du décalage entre la boue de la rue et les murs étincelants des institutions, pointant du doigt une classe politique qui se méfie terriblement du peuple ; et encore plus de ses héros. Rappelant sans cesse que la nation française, après la Révolution, ne voulait plus de roi, et encore moins d’empereur, cette production française pointe du doigt un Napoléon Bonaparte invisible pour le peuple, qui doit tout de même subir ses directives. Alors que les ennemis de la veille deviennent les amis du lendemain, chacun tente de tirer parti des autres dans un jeu de pouvoir à plusieurs échelles.
- © Roger Arpajou / Mandarin Production / Gaumont
Alors que la mise en scène s’est construite de manière pyramidale, montrant tour à tour l’État, la police et les figures d’autorité puis la populace, Vidocq reste une figure centrale qui interagit avec chacun en ne mettant d’accord personne. Dans sa quête de pouvoir et de domination, et alors que prendre l’ascendant sur les autres semble être la seule manière d’exister, l’Empereur du peuple cherche sa place, permettant au film de plonger dans un portrait plus intime, suivant le héros au gré de ses doutes et parvenant à le rendre attachant.
Il n’en fallait pas moins pour rendre un film lent attractif ; il ne manque certes pas d’action mais ce blockbuster français se révèle trop soucieux de bien faire et de restituer les faits point par point. Au risque d’être ennuyeux, ce qui arrive souvent quand on cherche trop à orienter la pensée d’un public qui ne pourra que déplorer une intrigue cousue de fil blanc. Campant un Eugène-François Vidocq dans l’introspection, qui se demande si envoyer des hommes dans ce bagne maudit, dont il a tout fait pour s’échapper, fait de lui la marionnette du pouvoir, Vincent Cassel est laissé en roue libre et son interprétation ne détonne en rien dans sa filmographie, si l’on compare ce rôle à celui campé dans Le pacte des loups voire même dans Mesrine. Tout le problème est là : il ne se glisse jamais vraiment dans la peau du personnage, laissant les rôles masculins les plus forts du film au reste de la distribution.
- © Roger Arpajou / Mandarin Production / Gaumont
August Diehl est parfait dans le rôle du double maléfique de Vidocq, personnage sans scrupule bien décidé à devenir lui aussi l’Empereur du peuple. Face à eux, incarnation puissante de l’autorité et des forces de l’ordre, Denis Ménochet campe un inspecteur de la Sûreté qui ne peut que rappeler le Javert des Misérables, personnage qui paraît tout aussi cruel et hermétique mais qui finit par révéler un sens aigu de la justice.
Les rôles féminins luttent tout autant que les hommes dans le film, mais pour acquérir une indépendance que la société leur refuse. Victimes de la violence et de la quête de pouvoir des hommes, elles vivent dans l’ombres de ces messieurs et ne servent ici qu’à les glorifier davantage. Des faire-valoir, ni plus ni moins.
Si l’on retiendra surtout la beauté des costumes, la finesse des décors du Paris du XIXe siècle, ainsi qu’une bande originale d’une grande délicatesse utilisée à bon escient, force est de reconnaître qu’on n’oubliera très rapidement cette énième version de l’histoire de Vidocq, divertissement loin des vertiges du film puissant et dramatique que l’on attendait tous.
La chance sourit malgré tout aux audacieux : sans le vouloir, cette adaptation 2018 trouvera sans aucun doute un écho particulier dans l’actualité agitée de notre pays, en proie à de grandes tensions sociales et politiques. C’est toujours cela de gagné.
- © Roger Arpajou / Mandarin Production / Gaumont
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